Un avocat qui représentait le Mouvement Desjardins a raconté lundi l’« effroi incroyable » ressenti lorsqu’un individu lui a tiré dessus à travers la porte de sa maison en mars 2020, un attentat qu’il a tout de suite relié à un litige entre l’institution financière et un promoteur immobilier de Joliette.

MNicholas Daudelin, du cabinet LCM Avocats, a témoigné avec aplomb lundi, au palais de justice de Longueuil, dans le cadre du procès de Daouda Dieng et de Cheikh Ahmed Tidiane Ndiaye, deux hommes accusés de tentative de meurtre sur sa personne.

L’avocat a raconté que le soir du 26 mars 2020, il s’était installé dans son salon avec sa conjointe pour écouter le radio-théâtre de Radio-Canada. La chaîne publique diffusait ce soir-là une pièce de Michel Tremblay.

Il a relaté avoir vu une voiture passer très lentement devant sa maison. Puis, quelqu’un a frappé à sa porte et a demandé à travers la vitre s’il était M. Daudelin. Méfiant, l’avocat a nié et a demandé à la personne de quitter sa propriété, sans ouvrir la porte.

« Je le sais que c’est toi », aurait alors répliqué l’homme qui se tenait dehors. Un deuxième homme serait alors sorti de l’obscurité, un pistolet noir à la main.

« Ce dont je me rappelle le plus, c’est son regard, vraiment, qui m’a glacé le sang. J’ai comme été saisi d’un effroi incroyable. J’ai vraiment eu peur », a relaté le témoin devant la cour.

Touché à la jambe

Il s’est souvenu avoir vu l’homme lever le bras, en tenant l’arme à l’horizontale, « pour me viser de plus en plus haut », a raconté MDaudelin.

Le juriste dit s’être lancé pour se protéger derrière un mur. « Au même moment, j’ai senti une douleur incroyable, je savais que j’étais touché dès ce moment-là », a-t-il expliqué. Atteint à la jambe, il avait « énormément mal », s’est-il souvenu, évoquant au moins deux détonations, peut-être plus, parce que le vacarme du verre brisé de sa porte couvrait tous les autres bruits.

Inquiet de voir le tireur entrer pour l’achever, il dit ne pas avoir demandé immédiatement à sa conjointe d’appeler le 911. « J’étais convaincu que si je lui parlais, bien, je mettais sa vie en péril », a-t-il raconté.

Lorsqu’il l’a finalement alertée, la femme a rampé en passant derrière le foyer, pour appeler au secours sans risquer d’être atteinte, selon le témoin. La police et les ambulanciers sont arrivés peu après, a-t-il dit dans son témoignage.

Inquiet pour ses collègues

MDaudelin dit avoir tout de suite demandé à son amoureuse d’appeler deux avocats de son bureau qui représentaient comme lui le Mouvement Desjardins dans un litige avec le promoteur immobilier de Joliette Jean-François Malo.

« J’ai dit : “C’est Malo qui m’a tiré, appelle-les, il faut les mettre à l’abri.” Ils ont des enfants, j’avais peur d’une attaque coordonnée », a-t-il raconté.

MDaudelin a expliqué avoir connu d’abord Jean-François Malo dans le cadre d’un litige local avec la Caisse populaire de Joliette. Le dossier était « chaud », et le directeur de la caisse avait été « passé à tabac », a-t-il rappelé.

En 2019, il a ensuite entrepris au nom de la Fédération des caisses Desjardins du Québec une série de recours civils en lien avec des soupçons de fraude de la part du groupe d’entreprises de M. Malo. S’en est suivi un « feu roulant » de procédures de part et d’autre, un conflit qui menait les deux parties devant la cour « toutes les semaines », selon lui.

Jugé séparément

Jean-François Malo est aujourd’hui accusé de tentative de meurtre en lien avec l’attaque contre MDaudelin, mais son dossier a été séparé de celui des coaccusés Daouda Dieng et Cheikh Ahmed Tidiane Ndiaye. Il sera jugé plus tard. L’acte d’accusation contre M. Malo précise qu’il a agi « avec l’intention de provoquer la peur sur une personne du système judiciaire et d’entraver à la justice en usant de violence ».

En contre-interrogatoire lundi, les avocats de MM. Dieng et Ndiaye ont posé plusieurs questions à la victime au sujet de la description physique des deux hommes qu’il dit avoir vus le soir de l’attentat, afin de vérifier si elle correspondait bien à celle des deux accusés.