(Ottawa) La police militaire a porté des accusations d’agression sexuelle et d’actes indécents contre l’ancien responsable des ressources humaines au sein de l’armée, même si le gouvernement libéral avait promis qu’il transférerait dorénavant aux autorités civiles toute affaire d’inconduite sexuelle.

Le Service national des enquêtes des Forces canadiennes (SNEFC) a annoncé mardi que le vice-amiral Haydn Edmundson était formellement accusé au criminel.

Ces accusations interviennent quelques semaines après que la nouvelle ministre de la Défense, Anita Anand, a annoncé qu’elle avait accepté la recommandation provisoire de la juge à la retraite de la Cour suprême Louise Arbour : transférer aux corps policiers civils toutes les allégations d’infractions sexuelles dans l’armée.

En annonçant mardi les accusations portées contre Haydn Edmundson, le SNEFC a toutefois noté que Mme Arbour laissait la porte ouverte à maintenir les enquêtes entre les mains de la police militaire si elles étaient « presque terminées ».

« Dans ce cas particulier, l’enquête était presque terminée », indique le SNEFC, qui ajoute toutefois que le dossier du vice-amiral Edmundson est maintenant confié au système de justice civil, pour la suite des procédures au criminel.

Haydn Edmundson avait démissionné en mars dernier de son poste de commandant au Commandement du personnel militaire, en raison d’une enquête policière à la suite d’un reportage de la CBC sur une allégation d’agression sexuelle commise en 1991.

Son avocat, Brian Greenspan, a nié les allégations, mardi. Il a indiqué dans un communiqué que le vice-amiral Edmundson « attend avec impatience l’opportunité de restaurer sa réputation ».

La CBC a rapporté que l’allégation contre M. Edmundson avait été portée par une ancienne militaire. Son avocat, Paul Champ, a refusé de commenter, sinon pour dire que « la justice doit suivre son cours ».

Son successeur visé par une allégation

L’armée canadienne doit composer depuis des mois avec des reportages et des manchettes sur des comportements sexuels inappropriés impliquant des officiers de haut rang.

Après sa démission, le vice-amiral Edmundson a été remplacé en mai par le lieutenant-général Steven Whelan au Commandement du personnel militaire, qui supervise tout en matière de ressources humaines, du recrutement et de la formation jusqu’aux promotions et aux soins de santé.

Mais M. Whelan s’est retiré en octobre en raison d’une enquête de la police militaire sur une allégation d’inconduite sexuelle. Il a également nié tout acte répréhensible.

La Presse Canadienne a révélé le 4 novembre dernier que l’ex-juge Arbour avait écrit une lettre en octobre au prédécesseur de Mme Anand, Harjit Sajjan, où elle recommandait que les affaires criminelles impliquant des inconduites sexuelles dans l’armée soient confiées aux autorités civiles.

Justin Trudeau avait fait appel à Mme Arbour en avril pour mener un examen d’un an sur les inconduites sexuelles dans l’armée et recommander des moyens d’y remédier. Cette décision fait suite à des mois d’allégations contre des officiers supérieurs et à des critiques sur la gestion de ces allégations par les libéraux.

Dans sa lettre au ministre Sajjan, Mme Arbour explique que toutes ces allégations l’ont amenée à conclure que « des mesures correctives immédiates sont nécessaires afin de commencer à rétablir la confiance » envers les Forces armées.

À cette fin, dans une recommandation provisoire, elle demandait au ministre que toutes les affaires criminelles à caractère sexuel, y compris les affaires « de nature historique », soient renvoyées aux autorités civiles. Cela inclut les cas qui faisaient déjà l’objet d’une enquête, à moins qu’elles soient « presque terminées ».

La recommandation de Mme Arbour ne porte que sur les affaires criminelles, y compris les agressions sexuelles. Elle ne s’applique pas aux affaires non pénales telles que les relations inappropriées, qui ne sont pas autorisées dans l’armée et continueront d’être traitées comme une question disciplinaire.

L’ex-juge a également laissé la porte ouverte à la modification de cette recommandation, en attendant les résultats de son rapport final.

Peu de temps après l’article de La Presse Canadienne, la ministre Anand a annoncé sur Twitter qu’elle acceptait « dans leur intégralité » les recommandations de Mme Arbour.

Des responsables ont depuis déclaré que le plus haut officier de la police militaire et procureur de l’armée, le Grand Prévôt des Forces canadiennes, était en pourparlers avec ses homologues provinciaux et territoriaux pour faciliter ce transfert.