La Cour suprême a décidé d'entendre l'appel du gouvernement canadien, qui refuse de rapatrier le jeune prisonnier Omar Khadr, détenu depuis 2002 à Guantanamo.

Ottawa s'est tourné vers le plus haut tribunal du pays après avoir été débouté à deux reprises en Cour fédérale.

Le 14 août dernier, la Cour d'appel a confirmé le jugement du mois d'avril, dans lequel le juge Walter O'Reilly, de la Cour fédérale, estimait que le refus du gouvernement de réclamer auprès des États-Unis le retour du détenu de 22 ans violait la Charte canadienne des droits et libertés.

M. Khadr est le dernier ressortissant occidental encore détenu à Guantanamo. Il a été arrêté et fait prisonnier au tout début de la guerre en Afghanistan, alors qu'il était âgé de seulement 15 ans.

La Cour suprême n'a pas précisé les raisons de sa décision d'entendre la cause. L'audition aura lieu le 13 novembre prochain. Le plus haut tribunal du pays s'était déjà penché sur le dossier Omar Khadr, obligeant Ottawa à remettre au prisonnier les documents relatifs à sa cause, lesquels faisaient état de la torture que le jeune homme a subi au cours de sa détention.

Libéraux et Amnesty montent au créneau

Le gouvernement fédéral n'a pas commenté la décision de la Cour suprême.

Il a rappelé la position affichée par le gouvernement le mois dernier. Il a alors souligné avoir «toujours déclaré qu'Omar Khadr faisait face à des accusations graves» et que la justice américaine devait pouvoir aller jusqu'au bout de la procédure contre lui.

En revanche, la décision de la Cour suprême a été critiquée par Amnesty International, tandis que les libéraux ont tiré à boulets rouges sur le gouvernement.

«Le gouvernement Harper continue à diminuer la valeur de la citoyenneté canadienne pour des raisons idéologiques», a déclaré le porte-parole libéral responsable des affaires consulaires, Dan McTeague.

«Un Canadien est un Canadien, un point c'est tout. M. Harper ne comprend pas cela et ne s'inquiète pas que le Canada reste le seul pays occidental à permettre qu'un de ses citoyens soit encore détenu au mépris de ses droits dans la tristement célèbre prison de Guantanamo», a-t-il ajouté.

Pour Béatrice Vaugrante, directrice de la section francophone d'Amnesty au Canada, «Omar Khadr doit être rapatrié» car il y a clairement dans son affaire «violation des conventions contre la torture, des conventions qui protègent les enfants-soldats et de notre charte (canadienne des droits et libertés)».

Amnesty compte demander le statut d'intervenant pour être entendue par la Cour suprême.

La Cour d'appel fédérale avait ordonné le rapatriement du jeune homme en se fondant en partie sur un devoir de «réparation» de la part du Canada.

Elle avait souligné que, contrairement à la position d'Ottawa, le ministre des Affaires étrangères «n'a pas autorité pour choisir de demander le rapatriement de tel ou tel citoyen canadien détenu dans un pays étranger».

Et surtout, la Cour a estimé que le Canada «a participé» aux mauvais traitements subis par M. Khadr à Guantanamo lorsque deux agents des services secrets canadiens sont allés l'interroger en 2004, ayant connaissance de son sort. 

Avec AFP