Poursuivi en diffamation par Russel Williams, le président d'une association de compagnies pharmaceutiques qu'il avait traité «d'escroc» et de «criminel», le député Amir Khadir n'aura pas à subir de procès. L'affaire s'est réglée à l'amiable dimanche, la veille du début du procès.

L'entente a été officialisée lundi matin, devant le juge André Roy, qui devait présider ce procès.

Peu repentant, M. Khadir a qualifié la poursuite de M. Williams de «poursuite bâillon», lors d'un point de presse qu'il a tenu, par la suite. Il a fait valoir que c'est l'autre partie (M. Williams et les compagnies qu'il représente), qui avait renoncé à le poursuivre, pour régler le litige à l'amiable.  

«J'ai réussi à convaincre M. Williams que les critiques très sévères que j'ai tenues ne le visent pas lui personnellement», a signalé M. Khadir avant de parler du projet de loi déposé par Québec solidaire pour freiner l'appétit des pharmaceutiques.

«Malgré leur engagement de donner les meilleurs prix, les compagnies pharmaceutiques se sont dépêchées de conclure des ententes secrètes avec l'Ontario et d'autres provinces, alors que les informations contenues dans ces contrats auraient permis aux contribuables d'épargner plusieurs centaines de millions de dollars par année», a-t-il dit.

Russel Williams a été député libéral de Nelligan, de 1989 à 2004. Il avait aussi été adjoint parlementaire au ministre de la Santé. Après, il a été nommé président de l'association Rx&D qui regroupe une cinquantaine d'entreprises en recherche pharmaceutique au Canada. M. Khadir reprochait à M. Williams d'avoir participé à une entente secrète qui favorisait les pharmaceutiques au détriment de l'État.

M. Khadir avait lâché des propos litigieux à trois reprises, entre le 21 octobre 2010 et le 12 juin 2012. Pourtant, le 11 novembre 2010, dans une lettre qu'il a fait parvenir à Russel Williams, M. Khadir se rétractait et reconnaissait ses torts, tout en disant vouloir continuer à critiquer l'industrie pharmaceutique. «En effet, disait la lettre, je vous ai traité de "criminel" et "d'escroc". J'ai même cité une définition légale du mot escroquerie.» M. Khadir disait regretter d'avoir évoqué maladroitement le nom de l'ex-colonel Russel Williams, condamné pour meurtres et agressions sexuelles.

Le 28 février 2012, M. Khadir y allait d'une autre charge contre Rx&D, en parlant de «pratiques frauduleuses, qui auraient privé l'État québécois de 1 à 2 milliards de dollars.»

Le 12 juin 2012, lors d'un point de presse, M. Khadir a recommencé en parlant d'une «intention illégale, frauduleuse de la part, par exemple, de Russel Williams.» C'est la goutte qui avait fait déborder le vase pour M. Williams, qui a intenté sa poursuite dans la foulée.

M. Williams réclamait 125000 $ en dommages. L'affaire s'est réglée par une lettre d'excuse de M. Khadir. «Chaque partie payant ses frais», a signalé M. Khadir, ce matin.

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Extrait de la lettre d'excuses du député Khadir

«Tel que déjà reconnu dans ma lettre d'excuse du 11 novembre 2010, il est erroné de dire que Rx&D ou vous avez personnellement participé aux négociations des ententes secrètes conclues entre le gouvernement de l'Ontario et les compagnies pharmaceutiques membres de Rx&D. Je réitère ici que je n'ai à aucun moment du point de presse voulu insinuer que vous avez agi dans l'illégalité lorsque vous étiez membre de l'Assemblée nationale. Je reconnais que c'était légal en 2004, de vous joindre à Rx&D après avoir agi comme adjoint parlementaire du ministre de la Santé», signale notamment M. Khadir dans sa lettre.