La procureure de la Couronne Lise Archambault n'avait jamais porté d'accusations de témoignages contradictoires dans sa carrière. Mais dans le cas de Guy Lafleur, en 2008, cela s'imposait.

«Ce n'était pas banal, dire que ton fils reste chez vous pour qu'il soit remis en liberté. Quand on vient à la Cour, il faut dire la vérité», a fait valoir Me Lise Archambault, mercredi, dans le cadre du procès civil intenté par Guy Lafleur. 

Mme Archambault et une policière du SPVM, Françoise Fortin, sont visées par cette poursuite. L'ex-vedette du Canadien leur reproche de l'avoir accusé injustement et de la mauvaise manière, en lançant un mandat d'arrestation visé contre lui. Il réclame 2,16 millions de dollars en dommages. Déclaré coupable au terme de son procès, en 2009, il a été acquitté en Cour d'appel, l'année suivante.

Autorisé

Me Archambault est la procureure qui a autorisé le dossier contre Guy Lafleur, en janvier 2008, mais elle l'a fait avec l'approbation de ses supérieurs. C'était un dossier particulier, pas de ceux que l'on laisse dans un pigeonnier, a-t-elle illustré. On lui avait demandé de regarder les transcriptions des deux témoignages que M. Lafleur avait rendus, à l'automne 2007, pour voir s'il y avait matière à accusations. 

À cette époque, le fils de Guy Lafleur, Mark, avait été réincarcéré parce que la maison de thérapie ne voulait plus le garder. En septembre, le jeune homme se retrouvait devant le juge Robert Sansfaçon, pour tenter de retrouver sa liberté. Son père, Guy, s'est porté garant de son fils en disant que celui-ci était toujours rentré à la maison quand il avait des autorisations de sortie de la maison de thérapie l'Exode.

Un mois plus tard, devant la juge de la Cour supérieure Carole Cohen, Guy Lafleur a toutefois reconnu que son fils était allé coucher à l'hôtel à quelques reprises, avec son approbation, afin d'avoir de l'intimité avec une nouvelle copine. M. Lafleur avait été averti quelques minutes avant l'audience, que le ministère public avec une facture de l'hôtel en main. Il aurait pu renoncer à témoigner, mais il l'a fait quand même, soutenant qu'il n'avait rien à cacher. «Ce n'était pas banal. Ce n'est pas lui qui a déballé son sac. Les enquêteurs avaient enquêté», a témoigné Me Archambault. 

Tous d'accord

La procureure a soumis ses conclusions lors d'une rencontre avec ses patrons, le 14 janvier 2008. «Tout le monde autour de la table était du même avis», a-t-elle expliqué lors de son témoignage. Elle a eu le feu vert pour autoriser la plainte.

Pour Me Archambault, il s'agissait d'une accusation grave. En raison de cette gravité, elle n'a jamais envisagé de procéder par sommation, qui fait en sorte qu'une personne doit se présenter au palais de justice à une date précise pour être accusé. Elle a procédé par mandat d'arrestation visé, ce qui fait que M. Lafleur a été contraint de se présenter au poste de police. Sur place, il a été arrêté «techniquement», et remis en liberté avec une promesse de comparaître. 

Me Alexandre Bergevin, un des avocats qui représente M. Lafleur, a fait admettre à la procureure que son client ne représentait aucun danger. Il n'avait aucun antécédent, ne risquait pas de fuir...

Me Archambault a soutenu qu'il s'agissait d'une accusation grave, et que l'arrêt d'agir était important. M. Lafleur devait témoigner à nouveau en mars 2008. 

«On voulait qu'il rende un témoignage franc. Je voulais qu'il ait le temps de se virer de bord et se prendre en main.»

Le procès se poursuit en après-midi.