Une professeure de théâtre qui travaillait depuis 15 ans au prestigieux Collège Brébeuf, à Montréal, a récemment été remerciée de ses services à cause de sa participation à des films érotiques vieux de dizaines d'années.

Jacqueline Laurent-Auger, âgée de 73 ans, a joué nue dans quelques films européens destinés aux adultes, dans les années 60 et 70. Plus tard dans sa carrière, elle a aussi interprété de petits rôles dans les séries L'Or du temps, 4 et demi... ou, plus récemment, Mauvais Karma.

À la fin de la dernière année scolaire, des élèves de Brébeuf ont déniché sur Internet des extraits de films dans lesquels Mme Laurent-Auger figurait dans le plus simple appareil.

En entrevue téléphonique, le directeur du Collège Brébeuf a indiqué à La Presse que la sérénité des cours de Mme Laurent-Auger avait été menacée par cette découverte.

«Ça donnait un climat tendu en classe, voire des dérapages», a regretté Michel April.

«Les étudiants commençaient à se passer le mot et à remettre en cause certaines choses, a-t-il ajouté. Vous savez, n'importe quel employé du Collège se doit d'être un modèle pour les élèves. [...] Ce n'est pas ce modèle-là qu'on veut véhiculer à nos jeunes.»

M. April a aussi confirmé qu'il s'agissait du seul motif ayant entraîné le non-renouvellement du contrat de Mme Laurent-Auger. Il a tenu à préciser qu'un contrat liait le Collège Brébeuf à l'actrice, qui n'était pas une employée en bonne et due forme de l'institution parce que c'est la petite entreprise de l'actrice qui recevait les paiements. Elle en est la seule employée et la seule propriétaire.

Érotiques, pas pornographiques

Rejointe à son domicile, Mme Laurent-Auger a indiqué qu'elle avait été extrêmement surprise lorsque son renvoi lui avait été annoncé, au début du mois de juillet.

Alors que M. April évoque une dégradation du climat en classe, la professeure assure qu'il n'en est rien. Elle ne savait même pas que des extraits circulaient parmi ses élèves avant qu'on lui annonce son renvoi, a-t-elle relaté.

Mme Laurent-Auger ne regrette rien et ne renie aucun pan de sa carrière. Elle assure ne jamais avoir tourné de scènes pornographiques, mais s'être limitée à des films érotiques «soft» comme il s'en faisait plusieurs à l'époque.

«C'étaient des films de début de carrière, a-t-elle expliqué. Ils m'ont permis de gagner ma vie, d'être à Paris, de continuer à étudier. Et après les films plus intéressants sont venus, bien entendu. » L'actrice était de la distribution de Dany la ravageuse (1972), du Journal intime d'une nymphomane (1973) ou encore de Nathalie rescapée de l'enfer (1978).

C'était «il y a presque 50 ans», a-t-elle souligné. «J'ai 73 ans maintenant.» Et «toutes les actrices du monde ont tourné des scènes nues.»

Mais pour Michel April, «le passé se conjugue au présent» dans ce dossier. Que «des jeunes de cet âge-là [puissent] voir un membre du personnel - pour le peu que j'en ai vu - complètement nu en interaction avec d'autres adultes complètement nus dans un film» n'est pas acceptable, a-t-il dit.

Le Collège Brébeuf qualifie les cours de Mme Laurent-Auger d'activités parascolaires facultatives, alors que la professeure assure qu'il s'agissait d'ateliers complémentaires aux cours de français et qui débouchaient sur une évaluation.