Le cofondateur de Cinar Ronald Weinberg a été arrêté hier soir à l'aéroport Pierre-Elliott-Trudeau, à Montréal, à la sortie d'un vol en provenance de Punta Cana. L'homme d'affaires est l'auteur présumé d'une fraude de 120 millions de dollars commise entre 1998 et 2005.

Visé par un mandat d'arrêt depuis le 2 mars, Ronald Weinberg, figure emblématique du scandale Cinar, est arrivé à 21 h 45 à bord du vol 1837 d'Air Canada. Il comparaîtra aujourd'hui au palais de justice de Montréal.

Escorté par deux agents, les mains menottées, Ronald Weinberg n'a pas desserré les lèvres lorsqu'il est sorti de l'aéroport, deux heures et demie après son arrivée : il n'a répondu à aucune question des journalistes et n'a fait aucun commentaire. Vêtu d'une veste verte, de jeans et de chaussures de sport, un bonnet de laine sur la tête, il a rapidement monté à bord d'une voiture de la SQ.

L'arrestation couronne une vaste enquête menée depuis huit ans au Canada, aux Bahamas et aux États-Unis par la Sûreté du Québec (SQ). Plus de 50 témoins ont été rencontrés au Canada et aux Bahamas. Véritable feuilleton qui a rythmé l'actualité au cours des années 2000, l'affaire Cinar a connu un développement inattendu la semaine dernière alors que la SQ a déposé 36 chefs d'accusation de fraude, de faux et usage de faux ainsi que de faux prospectus. Selon les accusations, 120 millions de dollars américains auraient été détournés aux Bahamas à l'insu du conseil d'administration de Cinar. Les sommes n'ont pas été intégralement remboursées.

Aux côtés de Ronald Weinberg, trois autres hommes sont visés par ces accusations : John Xanthoudakis, PDG de Norshield, la firme impliquée dans l'administration des fonds détournés de Cinar aux Bahamas. Lino Pasquale Matteo, comptable, aurait maquillé les états financiers du groupe Globe-X pour tromper Cinar tandis que Hasanain Panju était l'ancien chef des finances de Cinar : tous deux ont comparu la semaine dernière au palais de justice de Montréal et ont été relâchés sous caution.

Fleuron de la production audiovisuelle québécoise, Cinar a été fondée par Ronald Weinberg et sa femme Micheline Charest. L'entreprise, cotée en Bourse, s'est fait connaître grâce à ses programmes pour enfants. Mais sous cette réussite apparente, l'entreprise cachait diverses irrégularités, mises au jour à la fin des années 90, dont l'usage de prête-noms pour toucher des subventions et le plagiat d'une série créée par l'auteur Claude Robinson, Les aventures de Robinson Sucroë.

En 2000, l'entreprise se retrouve au coeur d'un scandale quand le conseil d'administration découvre que 120 millions ont été transférés aux Bahamas, au profit de ses dirigeants et au détriment de ses petits actionnaires. La SQ entreprend alors une enquête, qui débouche sur les accusations criminelles. En 2004, la femme et partenaire d'affaires de Ronald Weinberg, Micheline Charest, meurt à la suite d'une chirurgie esthétique. Son décès ainsi que l'affaire Cinar ont fait l'objet d'un documentaire, La femme qui ne se voyait plus aller, de Francine Pelletier, ironiquement diffusé hier soir sur RDI.

- Avec la collaboration de Francis Vailles et Christiane Desjardins