Grâce à un éventail de fournisseurs de cocaïne qu'il connaissait dans les Antilles, Ray Kahno était devenu un précieux allié de la mafia montréalaise. De leur côté, moyennant une généreuse commission, les mafieux italiens mettaient à sa disposition leurs nombreuses relations à l'aéroport Montréal-Trudeau afin de faciliter l'entrée de la drogue.

Âgé de 33 ans, Kahno a été condamné, hier, à 14 ans de pénitencier pour avoir dirigé au moins quatre importations entre décembre 2004 et novembre 2006. Comme il est en détention préventive depuis presque trois ans, et que cette période compte pour le double, il purgera en tout huit ans et deux mois. Il s'est aussi vu confisquer plus de 4 millions de dollars en argent et en biens.

Comme l'avocat de la poursuite l'a expliqué au juge Jean-Pierre Bonin, les trafiquants se servaient de bagagistes ou d'employés d'entretien en fonction à l'aéroport Montréal-Trudeau pour récupérer la drogue. Celle-ci était cachée dans des valises, dans les faux plafonds de conteneurs à bagages ou encore dans de petits conteneurs à nourriture ou à boissons gazeuses.

À la fin de janvier 2005, Kahno s'était attiré les foudres de la mafia pour avoir fait entrer une cargaison de 218 kg de cocaïne au lieu des 120 kg prévus. Soupçonnant Kahno et son associé de vouloir éviter de payer la «taxe» leur permettant d'utiliser la «porte» de l'aéroport, les mafieux ont menacé de s'en prendre à eux. Après maintes péripéties, les trois hommes ont dû payer une «amende» de 100 000$ chacun.

Le lendemain de cette saisie de 218 kg en provenance de la Jamaïque, Kahno, qui parle au moins cinq langues, dont l'italien et le créole, s'est immédiatement remis à la tâche avec ses acolytes, cette fois pour importer la cocaïne dans des valises. Le projet a toutefois échoué. Les trafiquants se sont ensuite tournés vers Haïti, où l'un des courriers de l'organisation s'est fait prendre avec 9 kg dans ses valises juste avant de monter dans un avion à Port-au-Prince.

Dans une conversation téléphonique que les policiers ont enregistrée, Kahno soutient avoir déjà payé à la famille 3 millions de «taxes» en une seule année. Il affirmait qu'il faisait lui aussi beaucoup d'argent, mais qu'il le «brûlait aussitôt». Au cours d'une fouille éclair de la maison de ses parents, à Laval, en septembre 2006, les enquêteurs ont mis la main sur près de 2,9 millions de dollars. L'argent était caché sous un escalier, au sous-sol.

Outre ce magot, Kahno s'est fait saisir sa luxueuse résidence de Laval ainsi qu'un triplex rue Gabrielle-Roy, à Montréal. Il a aussi été délesté des 72 000 actions d'Investissements Mondi, évaluées à 277 920$. Cette firme est une filiale de l'entreprise qui a construit sa maison d'une valeur de près de 1 million au 3849, rue de L'Empereur. Un oncle lui servait de prête-nom.

En mars dernier, Giuseppe Torre, 37 ans, alter ego de Kahno au sein de la mafia montréalaise, avait aussi été condamné à 14 ans de pénitencier.