Miroirs fracassés, murs défoncés par des haltères, traces de projectiles au plafond, ordinateurs, table et une porte vitrée réduits en pièces: les dégâts provoqués par le policier vraisemblablement dépressif qui s'est barricadé dans la nuit de mardi au Progym Serge Moreau sont considérables.

Les dommages s'élèvent à plusieurs milliers de dollars, selon le gérant de l'immense gymnase de la rue Hochelaga. «Mais en quelque part, on est chanceux que rien ne soit arrivé de plus grave. D'un autre côté, quelles sont les chances qu'un policier débarque armé et pète une coche?», s'interroge Joe Maglione, rencontré ce matin pendant qu'une cinquantaine de personnes suaient sur les appareils du centre de conditionnement physique.

En arpentant les pièces vandalisées par le policier, perchées au deuxième étage, difficile de contredire le gérant. Tous les ingrédients semblaient d'ailleurs en place pour que les choses dégénèrent. Un homme en détresse psychologique et une arme à feu chargé. D'autant plus que, selon nos informations, le policier impliqué aurait réintégré ses fonctions depuis quelques mois seulement, après avoir subi une dépression. Interrogé à ce sujet, le Service de police de la Ville de Montréal n'a pu valider l'information, qui relève selon lui du domaine médical et privé.

Toujours est-il que le policier de 33 ans s'est pointé en uniforme au gymnase peu après minuit mardi. Les employés de nuit et la trentaine de clients qui s'entraînaient ont tout de suite flairé son comportement louche. «Il est allé chercher une bouteille d'eau et refusait de la payer, il se parlait tout seul et il criait», a raconté M. Maglione.

L'agent est ensuite allé courir une quinzaine de minutes sur un tapis roulant situé à l'extrémité de la salle, à côté de la fenêtre de l'établissement. «Il portait sa veste pare-balle et se parlait toujours. Plusieurs clients ont pris peur et sont partis », a souligné le gérant.

Pendant qu'il joggait, un collègue du poste de quartier 23, situé de l'autre côté de la rue, lui aurait alors fait signe de venir le rejoindre dehors, au travers de la vitre. «Le policier aurait répondu non avec le doigt avant de sortir un livret, peut-être une convention collective, et de l'étamper dans la fenêtre», a expliqué M. Maglione.

Plusieurs policiers sont alors intervenus. C'est à ce moment que l'homme de 33 ans s'est barricadé au deuxième étage, dans les locaux réservés aux entraîneurs privés. «Il a d'abord défoncé la porte avec son pied», a indiqué le gérant. Ensuite, il a brisé les miroirs et aussi les ordinateurs dans lesquels se trouvent les dossiers des clients. Il a même arraché une lampe et un thermostat.

Le policier a facilement troué les murs de plâtre en projetant des haltères. Dans une pièce du fond, il a ouvert le feu au plafond à huit reprises. Les balles ont ricoché dans des poutres en métal. C'est à ce moment que les policiers sont intervenus pour le maîtriser avec une balle de caoutchouc. Le policier a été escorté à l'extérieur par une cage d'escalier à l'arrière.

Pour le moment, Joe Maglione n'entend pas renforcer la sécurité de son établissement, bien conscient qu'il s'agit d'un incident isolé.

Les clients interrogés n'ont pas l'intention non plus de modifier leurs habitudes. «Je venais dans le temps où la gang à Mom Boucher s'entraînait ici, alors...», a souligné Jean Greffe, un habitué.

Quant au policier au coeur de toute cette affaire, il subit toujours une évaluation psychiatrique. L'enquête en cours permettra de déterminer si des accusations seront ensuite portées ou non contre lui. L'utilisation d'une arme à feu dans un dessein dangereux pourrait en faire partie.