(Ottawa) Le Bureau de la concurrence du Canada est incapable de déterminer si toutes les lingettes jetables peuvent l’être dans une toilette.

En 2019, les Amis de la Terre Canada et des avocats d’Ecojustice avaient déposé une plainte auprès de l’agence, alléguant que des fabricants d’une vingtaine de marques de lingettes jetables affirmaient erronément dans leur publicité que leurs produits pouvaient être jetés dans une toilette.

En février, le Bureau de la concurrence a informé le groupe qu’il mettait un terme à son enquête, expliquant qu’elle ne savait ce que signifiait exactement « jeter à la toilette ».

Il existe un nombre de lignes directrices contradictoires au sujet des produits pouvant être jetés dans les réseaux d’égout des municipalités.

Extrait de la lettre du Bureau de la concurrence

La cheffe de direction des Amis de la Terre Canada, Beatrice Olivastri, juge que la décision de l’agence fédérale « est inacceptable ».

Le groupe avait fondé sa plainte sur une étude menée par l’Université du Toronto métropolitain qui avait révélé que 23 sortes de lingettes étiquetées comme « jetables dans des toilettes » ne l’étaient pas en réalité.

Mme Olivastri déplore que le Bureau de la concurrence n’ait pas contacté aucune organisation ou expert cité dans la plainte, notamment les auteurs de l’étude ou l’International Water Services Flushability Group, une association qui a établi des normes pour ce qui peut être réellement jeté dans une toilette.

Prétextant la confidentialité, le Bureau de la concurrence n’a pas voulu dire ce que son enquête avait découvert ou identifier les personnes interrogées.

Une porte-parole du Bureau de la concurrence, Julie Baribeau, a déclaré par courriel à La Presse Canadienne que l’agence « n’approuvait pas les représentations sur ce qui était jetable dans une toilette et les tests visant à évaluer ces produits », même si elle a mis fin à son enquête.

Les lingettes à usage unique sont une épine pour le réseau d’égout des municipalités. Elles peuvent bloquer le système. De nombreux recours collectifs ont été intentés contre les fabricants.

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Les municipalités canadiennes estiment qu’il leur en coûte au moins 250 millions par an pour retirer les amas qui obstruent les égouts, appelés « fatbergs », qui se créent lorsque des lingettes et d’autres solides non désintégrés se collent à des substances telles que la graisse de cuisine.

PHOTO PATRICK SANSFAÇON, ARCHIVES LA PRESSE

Aux États-Unis, de nombreux recours collectifs ont été intentés contre des fabricants.

Quelques jours avant la décision du Bureau de la concurrence de mettre un terme à son enquête, un juge américain avait approuvé un règlement dans une poursuite intentée par la municipalité de Charleston, en Caroline du Sud, contre Kimberly-Clark.

L’entreprise n’a pas commenté la décision du Bureau de la concurrence, mais un de ses porte-parole a indiqué à La Presse Canadienne qu’elle persistait à affirmer que ses lingettes pouvaient être jetées dans une toilette.

Mme Olivastri dit que le ministre fédéral François-Philippe Champagne peut demander une révision de la décision du Bureau de la concurrence.

Mais un porte-parole de M. Champagne a indiqué que le ministre ne le fera pas.

« Les enquêtes menées en vertu de la Loi sur la concurrence doivent être menées de façon indépendante par le Bureau de la concurrence, peut-on lire dans le courriel. Il peut agir à sa discrétion en fonction des preuves qu’il a amassées. »

Au Royaume-Uni, le gouvernement envisage d’instaurer des normes à cause des importants bouchons dans les canalisations. On aurait même retiré des amas de lingettes de la taille d’un avion de passagers ou d’un autobus.