L'option souverainiste ayant été totalement évacuée de la campagne électorale, les électeurs de l'Outaouais ont, pour la première fois depuis plusieurs décennies, tourné le dos au Parti libéral du Québec (PLQ) et jeté leur dévolu sur la Coalition avenir Québec (CAQ) dans trois des cinq circonscriptions que compte la région.

À l'instar du reste du Québec, la région de l'Outaouais, longtemps considérée comme un bastion libéral imprenable, est passée du rouge au bleu pâle aux élections de lundi.

Selon le candidat caquiste élu par plus de 8000 voix de majorité dans la circonscription de Papineau, Mathieu Lacombe, la proximité de l'Outaouais avec la capitale fédérale rendait une large majorité des électeurs allergiques à l'option souverainiste. Leur réflexe était donc de trouver refuge dans le camp libéral, élections après élections.

Mais la montée en force de la CAQ dans les sondages au cours des derniers mois a donné aux électeurs des cinq circonscriptions de la région l'occasion de jeter leur dévolu sur une autre formation politique qui souhaite que le Québec demeure au sein de la fédération canadienne.

EX-VALEUR REFUGE

« Au-delà de la volonté de changement dont on a tellement parlé, il s'est passé quelque chose dans la région de l'Outaouais. La région a longtemps été tenue pour acquise pendant des décennies par les libéraux. Nous étions pris dans le débat identitaire en raison de notre proximité avec l'Ontario. [...] Et c'était clair pour la majorité des électeurs de l'Outaouais qu'ils votaient pour le Parti libéral car pour eux, l'idée que le Québec devienne un pays était impensable. Le Parti libéral était donc devenu la valeur refuge, et il n'y avait pas d'option de rechange. La Coalition avenir Québec était là en 2012 et en 2014, mais elle n'était pas ce qu'elle est aujourd'hui », a analysé M. Lacombe dans une entrevue accordée à La Presse.

M. Lacombe, qui pourrait être appelé à siéger au Conseil des ministres que doit former le premier ministre désigné François Legault d'ici 15 jours et devenir ainsi le ministre régional de l'Outaouais, a affirmé avoir entendu ce message à maintes reprises en faisant du porte-à-porte ou en rencontrant les électeurs de sa circonscription durant d'autres activités liées à la campagne.

« Je l'ai beaucoup senti sur le terrain. "Enfin, on a l'occasion de faire un choix. On n'est plus prisonniers d'un seul parti." Compte tenu que la souveraineté n'était plus un enjeu, les électeurs ont pu regarder ailleurs. » - Mathieu Lacombe, nouveau député de la CAQ

Les autres candidats qui ont été élus dans la région sont Mathieu Lévesque, dans la circonscription de Chapleau, et Robert Bussières, dans Gatineau. Les deux libéraux qui ont survécu à la vague caquiste sont le ministre des Transports André Fortin, dans Pontiac, et Maryse Gaudreault, dans Hull. M. Fortin est considéré comme un des candidats potentiels pour succéder à Philippe Couillard à la tête du Parti libéral si ce dernier décide de quitter la politique au terme de la courte réflexion qu'il s'est imposée lundi soir après la défaite.

Selon Jacques Hudon, sympathisant du Parti libéral du Canada sur la scène fédérale qui milite au sein de la CAQ sur la scène provinciale, la promesse de François Legault de construire un nouvel hôpital à Gatineau d'un minimum de 170 lits d'ici cinq ans a été un tournant de la campagne. Il s'agit d'un engagement ambitieux qui vise à améliorer les soins de santé dans une région où ils sont déficients depuis des années, au point où bon nombre de patients préfèrent se faire traiter de l'autre côté de la frontière, en Ontario, où les soins sont nettement meilleurs.

« Ce qui a vraiment donné le ton à la campagne, c'est notre engagement sur l'hôpital. François Legault est venu ici pour annoncer cet engagement et je suis convaincu que cela a pris de court le Parti québécois et le Parti libéral. Cela a démontré qu'on avait pris l'initiative dans ce dossier. Et nous avons gardé l'initiative après », a dit M. Hudon, responsable des communications de la CAQ pour la région de l'Outaouais, entre autres.