Les ministres québécois de Stephen Harper sont des «béni-oui-oui» qui n'ont pas à coeur les intérêts de la province, a affirmé Gilles Duceppe samedi.

De passage dans la circonscription de Vaudreuil-Soulanges, où le sénateur ministre Michael Fortier tente de gagner un siège aux Communes, le chef du Bloc a défié le chef conservateur de ne nommer que des élus dans son cabinet. Quitte à ce que le Québec n'y envoie aucun représentant.«C'est mieux d'avoir personne du Québec qui vienne dire "on appuie quelque chose contre le Québec" que d'avoir des "béni-oui-oui" qui tiennent à leur limousine plutôt qu'aux intérêts du Québec», a tonné M. Duceppe.

Même s'il n'avait fait élire que 10 députés dans la province lors des élections de 2006, Stephen Harper avait nommé plusieurs Québécois au conseil des ministres. Il a d'abord choisi Josée Verner, Lawrence Cannon, Jean-Pierre Blackburn, Maxime Bernier et Michael Fortier, qui n'avait pourtant pas présenté sa candidature aux élections. Puis, plus tard, il a confié un portefeuille à Christian Paradis.

Cela n'a pas empêché le gouvernement conservateur de défendre des projets nuisibles pour le Québec, dénonce Gilles Duceppe. Il montre du doigt la réforme du Sénat et la création d'une Commission nationale des valeurs mobilières, deux projets abhorrés par Jean Charest.

«On a actuellement des ministres qui restent muets, qui sont incapables de se prononcer durant une campagne électorale, a-t-il dit. S'ils sont incapables de parler à leurs concitoyens, j'imagine qu'ils ne doivent pas parler très fort à la table du cabinet.»

Vendredi, le chef conservateur a refusé de s'engager à n'inclure que des élus dans le conseil des ministres qu'il formera, s'il remporte le scrutin du 14 octobre.

«Arrogance»

Les conservateurs ont vivement réagi à la sortie du leader bloquiste.

«C'est une arrogance incroyable de la part de Gilles Duceppe de prétendre dire au premier ministre comment former un cabinet», a dénoncé le ministre des Transports Lawrence Cannon.

Le député de Pontiac, dans l'Outaouais, est revenu à la charge contre le Bloc québécois, l'accusant de se cantonner dans le rôle de gérant d'estrade.

«C'est la seule fois dans l'histoire du Québec qu'un parti promet aux électeurs de ne jamais faire partie d'un Cabinet, a-t-il raillé. Que les bloquistes restent donc assis dans les estrades et qu'ils laissent les autres former le gouvernement.»

Les derniers sondages laissent entrevoir un gouvernement conservateur minoritaire. C'est notamment le cas d'une enquête Segma-La Presse publiée ce matin, qui montre que le Bloc domine largement les intentions de votes au Québec avec 42% des appuis contre 20% pour les conservateurs.

Un sondage Ekos confirme que la formation de Gilles Duceppe a le vent dans les voiles, lui prédisant 57 sièges sur 75 dans la province. Mais la firme affirme aussi que le PC se rapproche d'un gouvernement majoritaire : elle prévoit que Stephen Harper fera élire 152 députés sur un total de 308, loin devant les libéraux (60) et le NPD (39).

L'épouvantail de la majorité

C'est pour cette raison que M. Duceppe a une fois de plus brandi l'épouvantail d'un gouvernement Harper majoritaire. Lors d'un discours à Dorion, en compagnie de sa candidate Meili Faille, il a écorché le sénateur et ministre Michael Fortier, l'accusant de mépriser le choix démocratique des Québécois en remettant en question l'existence du Bloc.

Il a appelé ses supporters à sortir en grand nombre, le 14 octobre, afin que le sénateur et ministre «non élu reste un non élu». Même si celui-ci a reçu l'appui du maire de Montréal, Gérald Tremblay, et du ministre Raymond Bachand, de l'équipe de Jean Charest.

«Les électeurs ont vu un ministre non élu dénigrer le choix démocratique de 7,8 millions de Québécois à travers cinq élections, qui ont voté pour le Bloc au fil des ans, a-t-il lancé. Ça c'est mépriser les Québécois, c'est mépriser la démocratie.»

Avec la collaboration de Joël-Denis Bellavance