Ça devient routinier, un cégep en grève ou un groupe de ses étudiants obtient une injonction forçant la reprise des cours. En réaction, des étudiants et des profs contre la hausse des droits de scolarité bloquent l'entrée au collège et forcent la direction à lever les cours. C'est ce qui s'est encore passé ce matin au collège de Maisonneuve.

Seize étudiants, issus de programmes divers, ont obtenu une injonction qui obligeait la reprise des cours ce matin. Compte tenu des programmes divers, la reprise des cours aurait dû se faire dans presque tous les programmes.

Environ 200 étudiants, locaux et d'autres institutions scolaires, et des professeurs contre la hausse des droits de scolarité ont donc érigé un blocus autour du collège dès 5h pour faire respecter le vote en faveur de la grève et empêcher la reprise des cours.

La tension a monté d'un cran, et le groupe d'intervention de la police a été mobilisé sur place. Mais tout n'est resté qu'à l'état de mots.

La direction a finalement tranché et a levé les cours pour éviter tout affrontement. Comme au cégep de Sherbrooke, où l'histoire se répétait pour une troisième journée. Et comme ce fut le cas ces dernières semaines aux collèges de Saint-Laurent, Valleyfield, Alma et Saint-Jean-sur-Richelieu, entre autres.

Mais les 16 étudiants de Maisonneuve qui voulaient rentrer son déçus. Ils ont demandé aux policiers de les aider à entrer dans leur école à partir de demain.

«La Justice a tranché. Et les grévistes ne la respectent pas. On n'a même pas pu essayer d'entrer, la police a dit que c'était trop dangereux. On ne veut pas perdre notre session. On est dans notre dernière année avant l'université. On veut finir avant le 30 juin», plaide l'étudiante en sciences humaines, Geneviève Jacob.

«On se fait insulter. Pendant qu'on donnait une entrevue tantôt, deux profs de l'UQAM sont venus nous traiter d'égoïstes, d'individualistes. C'est ridicule. C'est notre droit, on veut avoir accès à nos cours. L'administration a dit qu'on finirait peut-être en septembre. Mais l'université commence en août. On ne peut pas faire les deux», ajoute Félix Dumont, étudiant en science de la nature.

«On voit depuis la fin de semaine des économistes qui disent que l'offre du gouvernement vendredi sera profitable aux classes pauvre et moyenne, qui ont en bas de 60 000 $ de revenu familial. Les grévistes veulent le gel, mais le gel pourrait être moins profitable que ça. Le gouvernement n'a pas réussi à vendre l'offre. On dirait que la grève est de plus en plus maintenue pour une cause idéologique», renchérit un autre.

Du côté des grévistes, on martèle que la grève a été entérinée par un vote démocratique, à plus d'une reprise. Lundi, une assemblée générale au cours de laquelle on devait se prononcer sur l'offre de Jean Charest n'a pas eu lieu, parce que 60 % des étudiants seulement en ont demandé l'ouverture. Et les règles stipulent qu'il faut le deux tiers des votes (66%) pour forcer la tenue d'une telle assemblée.

«On est tous dans le même bateau. Nous aussi, on va subir les conséquences de la grève, comme eux», indique un gréviste de Maisonneuve.

Pour l'enseignant en multimédia à ce même collège, Dominic Girard, l'injonction pour forcer le retour en classe est la pire solution.

«Si n'importe quel citoyen peut se soustraire à une politique qui l'affecte au moyen d'une injonction, ça n'a aucun sens. Ici, les votes en faveur de la grève ont été clairs. L'administration fait un travail délicat pour essayer d'être solidaire avec les étudiants en grève et essayer d'accommoder ceux qui ont obtenu l'injonction, qui ne plaît à personne», analyse-t-il.

Il convient qu'il y a intimidation entre les jeunes.

«Il y en a de part et d'autre dans le conflit. C'est dommage, mais ce n'est pas la majorité du monde. Mais il faut se rappeler que ce conflit est maintenu par l'entêtement déraisonnable de notre gouvernement, qui ne veut pas nommer de médiateur alors que tout le monde lui dit qu'il en faut un. Les étudiants pour la grève sont écoeurés, et les profs sont écoeurés. Mais le gouvernement persiste parce que sa base électorale est pour la hausse», déplore-t-il.