Le syndicaliste Ken Pereira a subi un traumatisme crânien en faisant une chute, ce matin, et a été placé en repos forcé jusqu'à lundi par son médecin. La commission Charbonneau a décidé de suspendre ses audiences jusqu'à mardi pour poursuivre son témoignage.

Les audiences de la Commission ont dû être suspendues ce matin après l'accident subi par Ken Pereira. Il a dû être hospitalisé pour des examens de la tête, annulant de ce fait la poursuite de son témoignage devant la commission d'enquête sur l'industrie de la construction, présidée par la juge France Charbonneau.

Ken Pereira «a subi un traumatisme crânien dont le grade ne peut encore être évalué. Son médecin traitant l'a en conséquence mis au repos jusqu'au lundi 14 octobre 2013, a annoncé en fin d'après-midi la Commission. Dans ces circonstances, les commissaires, après avoir pris connaissance de son dossier médical en lien avec cet incident, suspendent les audiences publiques et reportent l'interrogatoire du témoin au mardi 15 octobre 2013 à 9h30.»

Personne n'a été témoin de cet accident survenu vers 7h ce matin. Le témoin aurait fait une chute alors qu'il se rendait à sa voiture. Le porte-parole de la commission, Richard Bourdon, a indiqué que M. Pereira a contacté la commission pour l'informer de la situation.

Un policier qui devait escorter le témoin jusqu'à la salle d'audience, ce matin, aurait toutefois constaté que M. Pereira avait une bosse à la tête. Le témoin a été pris de vomissements à trois reprises en présence du policier, avant que celui-ci ne le transporte à l'hôpital, plutôt qu'aux locaux de la commission.

M. Pereira devait subir aujourd'hui un contre-interrogatoire de la part des procureurs de la Fédération des travailleurs du Québec (FTQ) et du Fonds de solidarité, après avoir passé toute la semaine dernière à la barre des témoins. Le tout a donc été reporté à la semaine prochaine.

Révélations

L'ancien directeur de la section locale 1981 des mécaniciens industriels, affiliée à la FTQ-Construction, a été à l'origine de plusieurs révélations concernant l'infiltration des Hell's Angels et d'entreprises liés à la mafia au sein de la centrale syndicale entre 2006 et 2011.

En guerre ouverte avec l'ancien directeur général de la FTQ, Jocelyn Dupuis, il s'était introduit en cachette dans les bureaux du directeur des finances de la centrale, en 2008, pour y subtiliser des documents relatifs aux comptes de dépenses pharaoniques de M. Dupuis.

Après avoir tenté de se servir des documents pour obtenir le renvoi du directeur général, M. Pereira a remis ces documents à la police, qui a porté des accusations de fraude à l'endroit de l'ex-directeur général de la FTQ, en 2010.

M. Pereira a aussi détaillé les relations de plusieurs hauts dirigeants de la centrale avec des entrepreneurs en construction, dont Tony Accurso, un des «barons» de l'industrie. Président des sociétés Construction Louisbourg et Simard-Beaudry, M. Accurso fait face aujourd'hui à de nombreuses accusations de corruption et de collusion relatives à des contrats municipaux obtenus à Mascouche et à Laval, de même qu'à plusieurs centaines de chefs d'accusation de fraudes fiscales.

M. Accurso aurait invité de nombreux dirigeants de la FTQ en croisière sur son yacht privé. Selon Ken Pereira, des réunions de travail de la FTQ se déroulaient dans un restaurant appartenant à l'entrepreneur, à Laval.

Le témoin de la commission Charbonneau a de plus affirmé, en audiences lundi, que le président de la FTQ, M. Michel Arsenault, avait refusé un pot-de-vin de 300 000$ de la part d'un «Italien», introduit auprès de lui par Jocelyn Dupuis pour favoriser une demande de financement de la firme Carboneutre. Le principal dirigeant de cette entreprise, Domenico Arcuri, était alors étroitement associé à la mafia sicilienne.

Crédibilité en jeu

Lundi, les contre-interrogatoires de Ken Pereira ont débuté. Le procureur André Dumais, du Conseil provincial québécois des métiers de la construction, où Ken Pereira a travaillé avant de se joindre à la FTQ,  a remis en cause la crédibilité du témoin, en faisant état d'un jugement défavorable rendu contre M. Pereira, en 2009.

M. Pereira avait contesté son licenciement du Conseil devant la Commission des relations de travail du Québec. Le juge qui a rédigé la décision a été extrêmement dur envers le syndicaliste, affirmant que «la Commission n'accorde aucune crédibilité» à Ken Pereira.

Ces affirmations à l'effet qu'il aurait été victime d'un règlement de compte à l'interne ont été qualifiées de «scénario de film policier de série B» par la Commission des relations de travail.

Ce matin, le procureur du Conseil provincial des métiers de la construction devait compléter son contre-interrogatoire avant de céder la place aux avocat de la FTQ et du Fonds de solidarité.

Le procureur de la commission qui a mené l'interrogatoire de M. Pereira, Me Simon Tremblay, a expliqué que son témoin devait subir «des tests» en raison de l'accident survenu ce matin, et a demandé l'ajournement des travaux pour la journée.

«J'ai cru comprendre que les tests se faisaient au niveau de la tête?», a demandé la juge. Après la réponse positive de Me Tremblay, la juge Charbonneau a reporté la suite du témoignage de M. Pereira à demain.