La Ville de Blainville a attribué un contrat d'infrastructures de plus de 16 millions à la firme de construction CJRB de Terrebonne après avoir disqualifié le plus bas soumissionnaire, qui proposait de faire le travail pour 3 millions de moins, avec un échéancier différent.

Le coût de ce projet d'élargissement et de reconstruction des égouts et des conduites d'eau de la rue Paul-Albert, au nord de Blainville, s'est finalement élevé l'an dernier à 25,1 millions, soit plus du double du montant (12 millions) estimé par la Ville dans son appel d'offres original, en 2009.

André Durocher, propriétaire de l'entreprise Excavations Panthère, a raconté hier à la commission Charbonneau qu'il était intéressé par ce contrat, mais qu'il y a vite renoncé en prenant connaissance des conditions de réalisation, «impensables» pour une entreprise comme la sienne.

En plus de demander l'installation de 250 puisards sur le tronçon de rue en chantier, qui s'étend sur plus d'un kilomètre, M. Durocher a relevé que la Ville exigeait que les travaux soient terminés en seulement trois mois, sous peine d'une amende de 5000$ par jour de retard.

À l'ouverture des soumissions, l'entreprise Miabec, de Sainte-Sophie, a présenté une proposition de 13,3 millions pour réaliser les travaux, estimés à 12 millions par la Ville de Blainville. Les deux entreprises suivantes, CJRB et Doncar, ont soumis des offres de 16,3 et 16,7 millions - qui dépassaient donc les estimations de la Ville de 35 à 40%.

Après analyse des soumissions, Miabec a été disqualifiée par la Ville pour des motifs d'échéancier. Le contrat a été attribué à CJRB pour 16,3 millions.

Dans les mois qui ont suivi, André Durocher affirme qu'il s'est rendu souvent au chantier, à environ un kilomètre de chez lui. Il a affirmé que Miabec, CJRB et Doncar - les trois premiers soumissionnaires - y travaillaient côte à côte.

De gros imprévus

Joint hier par La Presse, le président de Miabec, Michel Morin, a expliqué qu'avec son offre à 13,3 millions, il avait proposé à la Ville d'étirer les travaux jusqu'au printemps 2010. Ce compromis a été rejeté par la municipalité.

Il a aussi reconnu que Miabec a réalisé en sous-traitance, pour CJRB, des travaux liés à ce contrat, qu'il a estimés à 1,8 million. «Mais j'ai chargé les travaux en suivant les prix que j'avais mis dans ma soumission. Si quelqu'un a fait de la grosse argent dans ce contrat-là, ce n'est pas moi.»

À la Ville de Blainville, Yves Meunier explique pour sa part que les coûts du chantier sont ensuite passés de 16,3 millions à 25,1 millions - une augmentation de plus de 55% - à cause d'imprévus et d'ajouts au contrat original.

Il a imputé des coûts additionnels d'environ 1 million à la présence de roc à un endroit où des relevés géotechniques prédisaient des sols sablonneux.

La taille des conduites d'égout et d'eau prévues au devis original a aussi dû être augmentée pour fournir des services aux quelque 5000 résidants attendus dans un nouveau projet résidentiel voisin. Deux postes de pompage ont aussi été ajoutés au projet.

M. Meunier a précisé que l'échéancier très serré du projet, en 2009, était justifié par un programme de subvention qui se terminait le 30 novembre 2009. Un dépassement des délais aurait pu mettre en péril une subvention de 1,8 million du gouvernement du Québec.

Quant aux 250 puisards mentionnés par M. Durocher, il s'agissait de «112 puisards et de 142 tranchées drainantes», pour un total de 254 dispositifs de captage des eaux.