Le père de Martin Couture-Rouleau, Gilles Rouleau, a interpellé les autorités à plusieurs reprises afin qu'elles interviennent auprès de son fils. Déçu de leur inaction, il réclame à présent un changement législatif qui permettrait de renforcer les pouvoirs des services de sécurité.

«S'ils étaient intervenus, il n'y en aurait pas eu [d'attentat]», a-t-il dit vendredi, en référence à l'agression qu'a commise son fils lundi, quand il a foncé sur deux militaires dans un stationnement de Saint-Jean-sur-Richelieu.

Gilles Rouleau a souvent appelé les autorités à l'aide avant que son fils ne passe à l'action. «On me disait qu'avec la loi actuelle, il faut qu'une personne dise qu'elle va faire quelque chose ou qu'elle pose un geste. Ben, lui, il l'a fait, son move», s'est-il désolé.

C'est la famille Couture-Rouleau qui a mis les autorités sur la piste de Martin, alias Ahmad, en juin. Les proches du jeune homme s'inquiétaient des importants changements de comportements qu'ils observaient chez lui. La Gendarmerie royale du Canada (GRC) a alors commencé à suivre le converti de près. Aussi Martin Couture-Rouleau a-t-il été placé sur la liste des «voyageurs à haut risque». Quelques semaines avant qu'il ne passe à l'action, on lui a retiré son passeport.

Mais Gilles Rouleau aurait souhaité que l'intervention ne s'arrête pas là. Il aurait voulu que les autorités prennent son fils sous leur aile. «Qu'elles l'encadrent, qu'elles lui fassent passer des tests pour s'assurer que ça [un événement comme celui de lundi] n'arrive pas», a-t-il suggéré. Le père de famille aurait aimé que les services de sécurité réussissent là où il ne cessait d'échouer. Malgré ses nombreuses tentatives.

«Moi, je le voyais, mon gars. Ça n'allait pas et il ne pensait pas bien. Je lui disais: "Viens avec moi, ta pensée n'est pas bonne, on va aller voir du monde." Je lui en parlais toutes les semaines, pratiquement», a-t-il dit. Gilles Rouleau a d'abord contacté la police de Saint-Jean, qui l'a orienté vers la Sûreté du Québec, puis la GRC.

Impuissance policière

Aucun de ces corps policiers n'a pu prévenir le pire. Malgré les nombreuses rencontres de la GRC avec Martin Couture-Rouleau, malgré l'implication de l'imam de la mosquée qu'il fréquentait, les autorités n'ont pas été en mesure de pressentir l'attentat.

«Il est très difficile [d'anticiper un geste], lorsqu'une personne planifie seule un acte, qu'il n'y a pas de préparation manifeste et qu'il utilise un véhicule comme arme», a déclaré la surintendante Martine Fontaine, de la GRC.

Bien qu'il reconnaisse les limites des services de sécurité, Gilles Rouleau n'a pas perdu confiance en la police pour autant. «Le policier m'a dit qu'il veut comprendre la radicalisation de Martin de A à Z», a-t-il rapporté. Lui aussi a hâte de comprendre le processus par lequel son fils est passé.

«Je vais attendre les résultats de l'enquête», a avancé le père, qui, à l'inverse, souhaite qu'une nouvelle loi soit créée rapidement.