Krists Neilands s’est fait servir quelques remontrances par son coéquipier Hugo Houle à l’issue de la cinquième étape du Tour de France, la semaine dernière.

En échappée dans le col de Soudet, le Letton d’Israel-Premier Tech (IPT) s’était un peu trop montré quand les meilleurs du groupe ont accéléré à l’approche du sommet de ce premier col pyrénéen. Il avait fini 39e à près de sept minutes du gagnant et maillot jaune d’un jour, Jai Hindley (Bora).

Après sa quatrième place à la 10étape, remportée par l’Espagnol Pello Bilbao mardi, Neilands pouvait s’attendre à un autre « briefing » de la part de Houle.

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Krists Neilands

« Il faudrait qu’il soit un peu plus malin et il va gagner », a avisé le Québécois, déçu de le voir passer si proche.

Constamment à l’attaque pendant cette journée étouffante – près de 40 degrés à l’arrivée à Issoire –, Neilands s’est extirpé du petit groupe de meneurs de huit coureurs dans la côte de la Chapelle-Marcousse, à 32,5 km du fil. Au sommet de cette dernière ascension, il s’est donné une priorité de 35 secondes sur cinq poursuivants, dont le fringant Bilbao (Bahrain).

Excellent pilote, Neilands a conservé un peu moins de la moitié de son avance dans la descente, mais il a manqué de pétillant passé Perrier dans la dernière ligne droite de 7 km.

Rejoint à 3 km, le natif de Ventspils n’a pu jouer que les figurants dans le sprint, habilement négocié par Bilbao, qui a respectivement devancé l’Allemand Georg Zimmerman (Intermarché) et le renaissant Australien Ben O’Connor (AG2R).

« Il montre trop sa force », a souligné Houle, qui s’est relevé dans l’ultime montée pour terminer 115e, à plus de 20 minutes.

« Je l’avais chicané un peu après la cinquième étape quand on est partis en échappée. Il avait fait le même genre de coup. Je lui disais qu’il faut qu’il soit très malin. Il est tellement fort qu’il est capable de gagner, mais il doit quand même jouer le jeu avec le groupe. »

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Kirts Neilands à l’arrivée

Élu le plus combatif du jour, Neilands est en quelque sorte le miroir de son partenaire de chambre sur le Tour. « Krists, c’est un super coursier, un coureur complet. Il est parfois très discret, mais il est également très solide pour faire du travail. J’étais content qu’il se montre aujourd’hui. J’espère qu’il va en claquer une très bientôt. Mais depuis le début du Tour, il est en jambes et ça me fait plaisir. »

Au lendemain du jour de repos et moins de 48 heures après la victoire inspirante de Michael Woods au puy de Dôme, Houle souhaitait lui aussi tenter sa chance au départ de cette étape nerveuse lancée de Vulcania.

À l’affût, l’athlète de Sainte-Perpétue s’est même retrouvé dans un peloton considérablement réduit où les UAE de Tadej Pogačar ont réussi à partiellement isoler le maillot jaune Jonas Vingegaard et sa garde rapprochée de Jumbo-Visma.

« Je pensais que ça allait peut-être y aller dans la descente après la deuxième montée. Il restait très peu de coureurs et j’étais déjà content d’être là, surtout avec la chaleur. Il y a eu plusieurs attaques, mais ça ne voulait pas partir et ça s’est fait sur une route plus roulante où c’était plus tactique. »

Son coéquipier Nick Schultz « a flairé le bon coup » et Houle a voulu le rejoindre dans un contre. « J’avais très envie d’y aller, mais Neilands m’a damé le pion et il est parti un peu plus vite. C’est comme ça. Je respecte les coéquipiers. Au final, c’était bien d’avoir ces deux coureurs-là devant. C’est ce qui fait la force de notre équipe. Je vais me reprendre sur une autre étape. »

PHOTO FOURNIE PAR ISRAEL-PREMIER TECH

Hugo Houle (au centre)

En mode économie d’énergie depuis le départ à Bilbao, le vainqueur d’étape à Foix l’an dernier se réjouit de sa condition à mi-chemin de son cinquième Tour de France.

« Quand c’était la grande bataille, j’avais les jambes pour être devant. Je pense qu’il restait 25 coureurs dans le peloton au moment où l’échappée est officiellement partie. Des gars comme [David] Gaudu et [Romain] Bardet étaient lâchés. Ça montre que je suis en forme et que j’ai le niveau. Éventuellement, ça va sortir et mon tour va arriver. »

Bilbao, qui a admis que « Neilands était le plus fort », attendait le sien après deux déceptions chez lui durant le grand départ au Pays basque.

Le double gagnant d’étape au Giro a ajouté un premier succès sur le Tour à son palmarès. Le champion du Tour de Beauce de 2015 a évidemment dédié sa victoire à son coéquipier Gino Mäder, mort tragiquement le 16 juin au lendemain d’une chute dans une descente au Tour de Suisse. « J’ai simplement lâché toute ma colère » en traversant la ligne, a exprimé Bilbao, qui a montré le nom du disparu inscrit sur son casque.

« Ç’a été difficile de se préparer ces deux dernières semaines avec lui en tête », a-t-il ajouté, se retenant pour ne pas craquer.

« Je suis demeuré avec ma famille à la maison. Ma fille Martina [1 an] m’a beaucoup aidé à seulement rester calme et à essayer de conserver mon énergie positive pour réussir quelque chose de bien au Tour. Ça n’a pas été possible de le faire aux deux premières étapes, qui étaient si spéciales pour moi, mais j’ai simplement attendu mon moment. »

En l’honneur de Mäder, Bilbao a repris son initiative en reversant 1 euro à une cause environnementale pour chaque coureur arrivé derrière lui durant les étapes de la Grande Boucle. Mardi, il a donc amassé le maximum avec 168 euros.

En plus de sa victoire, Bilbao a grimpé de six échelons au général pour s’installer au cinquième rang derrière son jeune compatriote Carlos Rodriguez, forcé de faire rouler ses Ineos pris au piège. Après l’escarmouche de la première heure, Vingegaard et Pogačar ont conservé leurs positions respectives. Dix-sept secondes les séparent toujours en tête.

Avec seulement trois côtes de quatrième catégorie et un final roulant, la 11étape de 179,8 km entre Clermont-Ferrand et Moulins semble promise aux sprinteurs ce mercredi.

Hugo Houle, lui, a déjà coché la 12e, jeudi, dont le profil est similaire à celle de mardi. « Ça, tout le monde le sait, mais bon, on va essayer. »

Le top 10 de la 10étape

  1. Pello Bilbao (ESP/TBV) les 167,2 km en 3 h 52 : 34 (moyenne : 43,2 km/h)
  2. Georg Zimmerman (ALL/ICW) à 0 seconde
  3. Ben O’Connor (AUS/ACT) 0
  4. Krists Neilands (LAT/IPT) 0
  5. Esteban Chaves (COL/EFE) 0
  6. Antonio Pedrero (ESP/MOV) 3
  7. Mattias Skjelmose (DAN/LTK) 27
  8. Michal Kwiatkowski (POL/IGD) 27
  9. Warren Barguil (FRA/ARK) 30
  10. Julian Alaphilippe (FRA/SOQ) 32

99. Michael Woods (CAN/IPT) 13 : 02
115. Hugo Houle (CAN/IPT) 20 : 18 149. Guillaume Boivin (CAN/IPT) 25 : 03

Le top 10 du classement général

  1. Jonas Vingegaard (DAN/TJV) 42 h 33 : 13
  2. Tadej Pogačar (SLO/UAD) à 17 secondes
  3. Jai Hindley (AUS/BOH) 2 : 40
  4. Carlos Rodríguez (ESP/IGD) 4 : 22
  5. Pello Bilbao (ESP/TBV) 4 : 34
  6. Adam Yates (GBR/UAD) 4 : 39
  7. Simon Yates (GBR/JAY) 4 : 44
  8. Thomas Pidcock (GBR/IGD) 5 : 26
  9. David Gaudu (FRA/GFC) 6 : 01
  10. Sepp Kuss (É.-U. /TJV) 6 : 45

27. Michael Woods (CAN/IPT) 29 : 48
82. Hugo Houle (CAN/IPT) 1 h 32 : 14 126. Guillaume Boivin (CAN/IPT) 2 h 03 : 41