Ces derniers jours, les mauvaises nouvelles se propagent plus vite que le virus dans une soirée de karaoké.

Le sport étudiant ? Sur pause.

Le hockey junior majeur ? Sans spectateur.

Le tournoi pee-wee de Québec ? Annulé.

La Ligue canadienne de football ? Maganée.

La MLS ? Avez-vous deux heures ? C’est un peu compliqué…

Des milliers de jeunes Québécois ignorent s’ils pourront pratiquer leur sport cet automne. En parallèle, nos clubs sportifs constatent une chute des inscriptions. Des pourcentages dignes des soldes d’après Noël.

Depuis un an, le soccer québécois a perdu 40 % de ses membres. Le baseball, 20 %. Ce sera dans les mêmes eaux pour la natation, le plongeon, le water-polo et la gymnastique. Au hockey, des associations peinent à recruter des joueurs d’âge junior. Le quatre-contre-quatre ne les intéresse pas, me dit-on. La dynamique fédération d’athlétisme s’estime privilégiée d’avoir encaissé une correction de seulement 5 %.

Serrez bien vos lacets. L’automne s’annonce difficile. Survol des enjeux.

À l’intérieur

Les espaces intérieurs et mal ventilés — comme les vestiaires et les gymnases — sont plus propices à la propagation du virus que les terrains extérieurs, souligne le gouvernement canadien. C’est pourquoi la reprise du basketball, du volleyball et du handball est plus compliquée que celle du baseball.

À Tennis Québec, une rare fédération dont le nombre de membres augmente, on s’attend à une pénurie de terrains cet automne. « Des propriétaires de centres intérieurs sont craintifs et extrêmement prudents, explique le directeur général Jean-François Manibal. Ce ne sont pas tous les clubs qui veulent accueillir des compétitions. Nous entrevoyons des problèmes lorsque la saison intérieure débutera, car nous ne pourrons pas mettre la main sur les plateaux nécessaires pour tenir nos étapes et nos championnats. »

Pour réduire les risques de contagion dans les arénas, des clubs interdiront aussi la présence des parents dans les gradins. C’est déjà le cas pour le hockey en Outaouais.

Le retour à l’école

L’équation est simple. Plus vous rencontrez de gens dans une journée, plus vous risquez de propager le virus.

Avec le retour à l’école, le nombre de contacts quotidiens de chaque enfant explosera. Voilà pourquoi les équipes sportives des écoles secondaires sont en pause pour deux semaines. Le temps de voir comment le virus évoluera. Ça explique aussi les hésitations des cégeps et des universités par rapport à la saison de football. Des directions craignent les conséquences d’une éclosion au sein d’une équipe nombreuse, sur un campus pouvant accueillir jusqu’à des dizaines de milliers d’étudiants.

Une source dans le sport universitaire m’a résumé le problème.

« Les protocoles des fédérations sont bien faits. Mais comment allons-nous gérer un cas positif au sein d’une équipe ? Sur le campus ? Ça, c’est moins clair. »

La gestion des éclosions

D’ailleurs, comment gérer les cas positifs ?

C’est un peu flou.

Dans une ligue de baseball de Montréal, au début d’août, il y a eu deux cas isolés. Les deux joueurs ne s’étaient pas affrontés récemment. Donc pas d’éclosion. Sauf que ces deux joueurs avaient des coéquipiers. Et des adversaires. Qui, à leur tour, ont affronté d’autres équipes. Sont retournés chez eux. Sont sortis avec des amis.

Qui devait être testé ? Placé en quatorzaine ? Les parents devaient-ils être testés aussi ? Devaient-ils aller travailler ? La confusion a duré quelques jours. Finalement, la ligue a reporté une dizaine de parties.

À la suite d’une éclosion dans un tournoi de hockey-balle à Mirabel, au moins 15 personnes ont contracté le virus. Plusieurs dizaines de contacts ont dû s’isoler pendant 14 jours. Certains ont été privés d’un revenu pendant cette période.

De telles situations incitent les fédérations et les clubs à une plus grande prudence. Explications de la directrice générale de la Fédération de natation du Québec, Isabelle Ducharme.

« On est capables de faire des compétitions avec deux mètres entre chaque nageur. Mais le risque d’éclosion n’est pas de zéro. Mettons que des gens des quatre coins du Québec assistent à une compétition. Qu’il y a une éclosion. On devrait fermer une quarantaine de clubs d’un seul coup. C’est possible de le faire. Sauf qu’il y a un risque. »

Et lorsqu’un hockeyeur aura un diagnostic positif, faudra-t-il isoler tous ses camarades de classe ? Tous ses coéquipiers ? Ses adversaires ? Les compagnons de classe de ses adversaires ? Où arrête-t-on ?

PHOTO OLIVIER JEAN, ARCHIVES LA PRESSE

Au hockey mineur, les patineurs doivent jouer au sein de formations réduites.

J’ai posé la question à une demi-douzaine d’entraîneurs et de directeurs de programme. Chacun m’a fourni une réponse différente.

Québec, nous avons un problème.

La Santé publique doit mieux outiller les gens sur le terrain.

Distanciation et solution

Au hockey, les formations comptent entre 14 et 20 joueurs. Dont six sur la glace. Les autres attendent sur le banc. Or, lorsqu’ils ne patinent pas, les joueurs doivent respecter les consignes de distanciation. Pas besoin de sortir votre ruban à mesurer, j’ai fait le calcul. Il manque d’espace.

Ça explique pourquoi les formations sont limitées à 10 patineurs et un gardien chez les 16 ans et moins, et à 8 patineurs et un gardien chez les 17 ans et plus. Pour revenir aux alignements complets, Hockey Québec devra probablement trouver une solution à ce problème. Pas évident.

Les sports qui connaîtront du succès pendant la crise seront ceux qui innoveront. Comme le baseball l’a fait, cet été, en condamnant les abris des joueurs et en déplaçant l’arbitre du marbre derrière le lanceur.

La natation, elle, étudie la possibilité de présenter des compétitions virtuelles, comme on le voit parfois en athlétisme. Au hockey, les ligues junior AAA et midget AAA disputent des matchs scindés en deux. La moitié de l’alignement joue trois courtes périodes, retourne au vestiaire et est remplacée par l’autre moitié.

Est-ce idéal ? Bien sûr que non.

Mais au moins, ça fait bouger nos jeunes.

Sursis de deux semaines pour le sport étudiant
Y aura-t-il une saison de sport étudiant au Québec cet automne ? Les directions des établissements scolaires en ont débattu pendant près de trois heures, lundi matin. Elles ont finalement décidé de reporter leur décision de deux semaines, au 14 septembre. Chaque sport et chaque niveau scolaire (secondaire, collégial, universitaire) feront l’objet d’une décision indépendante. Parmi les sports touchés, on retrouve le football, le soccer, le rugby et le hockey.