(Montréal) Le vapotage et le tabagisme pourraient rendre plus vulnérables au coronavirus des populations, comme les plus jeunes, chez qui le risque de complications graves liées à la COVID-19 serait autrement moins élevé, prévient un expert.

« On sait que les gens qui fument ou vapotent ont un système respiratoire affaibli, qu’ils ont des conséquences possibles au niveau de leur système cardiovasculaire, ils ont un système immunitaire qui est plus faible, et tout ça les met à risque de développer des infections respiratoires plus sévères, a expliqué le docteur Nicholas Chadi, un pédiatre spécialisé en médecine de l’adolescence et toxicomanie au CHU Sainte-Justine.

« C’est vrai pour l’influenza, c’est vrai pour une pneumonie, et c’est particulièrement vrai pour le coronavirus qui tend à frapper très fort au niveau respiratoire et au niveau de la circulation. »

Fumer ou vapoter peut être considéré comme des facteurs de risque, croit-il.

Des études précédentes ont démontré que les fumeurs sont deux fois plus susceptibles que les non-fumeurs d’avoir l’influenza et de souffrir de symptômes plus graves.

On a aussi noté une mortalité plus élevée chez les fumeurs lors d’une épidémie de syndrome respiratoire du Moyen-Orient, lui aussi causé par un coronavirus.

« On a peu d’études scientifiques qui le prouvent concrètement […], mais au niveau des mécanismes physiologiques de comment le corps fonctionne, ça apparaît logique, basé sur d’autres types d’infections, que les gens qui fument ou qui vapotent et qui seraient ensuite exposés au coronavirus auraient des risques de développer des infections plus sévères », a précisé le docteur Chadi.

Le coronavirus est tellement nouveau que les études à son sujet sont effectivement rares. Des travaux menés en Chine démontreraient toutefois que les fumeurs étaient 1,4 fois plus susceptibles de ressentir des symptômes graves de la COVID-19 et environ 2,4 fois plus susceptibles d’être admis aux soins intensifs, d’avoir besoin d’aide pour respirer ou de mourir que les non-fumeurs.

Le docteur Chadi souligne aussi qu’on sait que le vapotage affecte les petits cils qui permettent de dégager le mucus dans les voies respiratoires.

« Les gens qui sont atteints de coronavirus décrivent la sensation de suffoquer, d’être incapables de respirer, que leurs voies respiratoires se ferment, a-t-il dit. Tout ça est en lien avec ce qu’on peut voir avec le coronavirus. »

Aspect social

On ne doit pas non plus sous-estimer l’aspect social du vapotage et du tabagisme, poursuit le docteur Chadi, puisqu’il s’agit d’activités que les jeunes pratiquent souvent en groupes, ce qui multiplie les risques de voir le virus se propager d’un à l’autre.

On peut aussi se demander quel impact auront les mesures de confinement sur ces jeunes.

« Pensez à un ado qui est accro au vapotage, qui doit vapoter plusieurs fois par jour, a dit le docteur Chadi. Comment cet ado-là va avoir accès à des produits de vapotage ? Il va trouver des façons de les acheter, de les acquérir, de voir des amis, de s’échapper de la maison. (Ça crée) une détresse chez ces gens-là qui ont besoin de consommer ces produits-là, mais qui sont pris à la maison, en plus chez les ados chez qui c’est peut-être fait de façon secrète, ça crée beaucoup de casse-tête. »

D’autant plus que les pédiatres et médecins ne sont présentement pas faciles d’accès pour prescrire des produits de remplacement de la nicotine.

« Des experts préconisent qu’on devrait fournir gratuitement tous les produits de remplacement de la nicotine, justement pour que les gens puissent mettre une patch, rester à la maison et cesser de sortir fumer sur le trottoir ou en groupes ou de façon sociale », a expliqué le docteur Chadi.

Il croit toutefois que la crise actuelle présente une excellente occasion d’adopter de meilleures habitudes de vie.

« Il y a un volet positif à tout ça : c’est une très bonne occasion de faire un arrêt ou une diminution, que ce soit tabagisme, vapotage ou autre consommation […] on se fait un ’challenge’ tous ensemble, on va arrêter de fumer par solidarité envers le réseau de la santé », a-t-il dit.