Si vous avez une maison ancestrale, qu'elle n'a jamais eu de pare-vapeur et que vous faites des travaux d'isolation dans votre grenier, devez-vous ajouter un pare-vapeur?

Le pare-vapeur est installé sur le plancher du grenier. Il protège la chaleur de la zone habitable et empêche que de la condensation se forme, comme son nom l'indique. Or, une maison ancestrale est conçue de telle façon que la vapeur va s'échapper sans que de l'humidité se forme dans le grenier ou le comble.

Plusieurs propriétaires de demeures qui datent d'une centaine d'années, parfois bien plus, font face à ce dilemme au moment de rénovations. C'est le cas, notamment, lorsqu'il y a décontamination d'un isolant contenant de l'amiante. Les normes du Code national du bâtiment exigent l'ajout d'un pare-vapeur. Mais si le toit comporte des joints ou des montants - s'il y a des obstacles, en somme -, la pose d'un pare-vapeur de plastique est plus compliquée. Pire: certains entrepreneurs estiment que, paradoxalement, on risque de créer des poches d'humidité avec l'ajout d'un plastique. La moisissure pourrait alors se mettre de la partie, de la moisissure que personne ne verrait, car elle serait cachée sous l'isolant...

Que faire alors?

La meilleure solution

«Au moment de l'isolation du toit, on utilise de l'uréthane, au moins un pouce et demi», explique Éric Proulx, d'Isolation LG4. Cela fait économiser des coûts de chauffage et sert aussi de pare-vapeur, sans qu'il y ait risque de création d'humidité, car il n'y a pas de plastique installé sur le plancher du grenier. La mousse d'uréthane adhère à la surface, même lorsqu'il y a des obstacles, comme des planches de bois latérales.

Tout le monde est d'accord, il s'agit là de la meilleure solution. Toutefois, souligne Martin Forgues d'Aire D3, c'est une solution coûteuse. Peut-être trop pour certains propriétaires.

C'est ici que les avis des experts se divisent. Il y a deux clans: ceux qui estiment qu'il faut absolument installer un pare-vapeur et ceux qui croient, à l'inverse, qu'une maison où tout va pour le mieux depuis des années n'en a pas besoin. C'est un peu la philosophie du: si ce n'est pas brisé, pourquoi le réparer? L'ajout du pare-vapeur dans un toit bien isolé qui n'a jamais eu de problèmes d'humidité ou de moisissures est donc inutile, conclut Martin Forgues.

L'architecte André Bourassa se méfie aussi des solutions uniques, préréfléchies et appliquées sans comprendre les principes fondamentaux des bâtiments. «Prétendre à tout prix qu'un pare-vapeur est nécessaire dans cette situation [une maison ancestrale] serait une insulte à l'intelligence historique», affirme-t-il. En effet, selon la nature des matériaux et la façon dont ils sont mis en oeuvre, un bâtiment peut être isolé sans «pare-vapeur» et très bien se comporter. Nombre d'immeubles anciens sont toujours bien en place pour le prouver.

À noter: les propriétaires qui décident de ne pas ajouter de pare-vapeur à l'occasion de rénovations devront signer une entente avec l'entrepreneur qui fait les travaux prouvant qu'ils refusent l'ajout du pare-vapeur.

Plusieurs entrepreneurs insistent toutefois pour se conformer au Code. «Dès que l'on ajoute de la laine minérale, on a l'obligation d'installer un pare-vapeur», tranche Frédéric Levac, de Foratech Isolation. Le principe est tout simple: si on isole (mieux) le grenier, on ne peut pas prévoir qu'il va continuer de vieillir comme il l'a toujours fait.

«En réisolant le toit, il faut considérer qu'on a affaire à une maison neuve», explique Benoit Lacas, d'Isolation Multi-Services. Et donc la traiter comme telle, dit-il, car on ne peut plus compter sur l'aération naturelle du toit. «Dès qu'on défait le gypse, il faut ajouter un pare-vapeur, dit-il, car on repart à zéro. L'isolation du toit est supérieure.»

Conclusion

Il n'y a pas une seule recette, car toutes les maisons sont conçues différemment, plaide Martin Majeau, président d'Isolation Majeau et frères. «C'est toujours une question d'équilibre entre la ventilation qui évacue le surplus de chaleur et d'humidité. En tant que professionnels, il faut toujours s'adapter, car toutes les maisons sont différentes.» Un tuyau de sécheuse percé peut tout changer, dit ce spécialiste des rénovations résidentielles. «Il peut même y avoir des cas où une partie de la maison aura un pare-vapeur et l'autre, non, explique Martin Majeau. Si on fait une rallonge sur un chalet, le toit de la nouvelle partie peut avoir un pare-vapeur et le chalet original, de 40 ans avec un plafond cathédrale, n'aura pas besoin qu'on en ajoute un.»

D'où l'importance d'avoir un bon diagnostic, d'être bien renseigné avant d'entreprendre des rénovations et de consulter plus d'un entrepreneur...

La peinture comme pare-vapeur?

Dans une vieille maison, le plafond (du dernier Ă©tage avant le grenier) comporte souvent huit ou neuf couches de peinture qui font l'effet d'un pare-vapeur, selon Martin Forgues, d'Aire D3. Dans le doute, on peut mĂŞme ajouter une peinture pare-vapeur, dit-il.

Possible, mais à certaines conditions, précise André Bourassa, de Bourassa Maillé Architectes. «Les multiples couches de peinture, si elles sont appliquées sur de petites planches embouvetées, ne constitueront pas un parevapeur et n'offriront pas une réelle étanchéité à l'air à cause des interstices entre les planches. Si la peinture est appliquée sur du gypse ou du plâtre, c'est différent. »

Une peinture pare-vapeur peut aussi être appliquée sur un plafond de gypse. « Par la suite, il faudra appliquer de la cellulose giclée entre les solives, précise André Bourassa. De cette façon, une éventuelle vapeur d'eau résiduelle pourra s'échapper entre les planches du grenier. Si on souhaite isoler davantage, on peut ajouter des espaceurs, tels des deux par quatre ou des deux par six, pour épaissir l'espace de cellulose. Finalement, il faut refaire un plancher en planches plutôt qu'en contreplaqué, car ce dernier est trop étanche pour être situé à cet endroit. »