Il arrive que notre rubrique « Le tour du propriétaire » aboutisse à une poignée de main entre un acheteur et un vendeur. Dans l’histoire qui suit, elle se conclut plutôt par un entrelacement de doigts. Laissez-nous vous raconter la charmante rencontre entre Diane et Lino, provoquée par l’un de nos articles.

Lectrice assidue de La Presse, Diane Audet se plaît à parcourir les propriétés qui y sont présentées chaque samedi. En août 2020, un reportage du « Tour du propriétaire », chronique où sont dépeintes des maisons remarquables sur le marché, retient particulièrement son attention. Intitulé « Un cœur tanguant sur le bord du lac », il présente la magnifique demeure de Lino Bramucci, érigée sous son orchestration à L’Île-Bizard.

Au-delà des baies vitrées panoramiques et des jardins entretenus avec grand soin, Diane est surtout touchée par le récit de Lino, dont la femme a été emportée par un cancer deux ans plus tôt, et qui, ballotté entre deuil et doutes, mettait sa propriété en vente. « Cet article fut la bougie d’allumage. J’ai été très émue par son histoire et les raisons pour lesquelles il vendait sa maison. Je trouve toujours injuste, quand des gens vivent un tel bonheur, que cela vienne à se terminer », évoque celle qui a cheminé sur des sentiers de vie plus cahoteux en matière de cœur.

Lisez notre texte « Un cœur tanguant sur le bord du lac des Deux Montagnes »

L’article se terminait sur cette exclamation de Lino : « On verra bien ! » Il n’aurait pu mieux dire, car la suite, il ne l’a pas vue venir. Après avoir lu le reportage, Diane se renseigne un peu sur le personnage, sans oser le contacter. Mais quelques semaines plus tard, quelle n’est pas sa surprise de le voir apparaître sur un site de rencontres auquel elle s’était inscrite. Coup de pouce du destin, Lino y avait effectivement établi un profil, sous l’insistance de ses enfants qui souhaitaient le voir tourner la page.

Complicité naissante

PHOTO MARCO CAMPANOZZI, LA PRESSE

Le couple se retrouve régulièrement sous le toit de Lino… qui n’est plus à vendre.

Un premier contact s’établit, suivi d’un rendez-vous.

Ces sites de rencontres nous bombardent de visages. Mais quand j’ai vu celui-là, ces yeux bleus… J’ai aimé le raffinement de cette femme, sa manière de dire les choses, avec gentillesse, tout en sachant ce qu’elle veut.

Lino Bramucci

Diane se garde bien de révéler qu’elle a consulté l’article, préférant d’abord observer et s’assurer que l’homme correspond bien à celui y étant décrit. « Le premier rendez-vous fut une très bonne soirée… mais ce ne fut pas le coup de foudre », avoue le duo, dont les contacts sont complexifiés par le contexte de la COVID-19.

Ils se découvrent des personnalités certes contrastées (elle est réservée, il est expressif), mais surtout des atomes crochus : la fine gastronomie, l’activité physique, les beaux-arts, le bon goût, l’aspiration au voyage. Elle aime son humour, il aime son aura. Tous deux connaissent aussi les défis posés par des postes à responsabilités. Une complicité s’installe. « Plus ça allait, plus je sentais cette compatibilité entre nous », confie Lino.

PHOTO FOURNIE PAR LINO BRAMUCCI

Le couple voulait vérifier s'il avait la même philosophie du voyage. La réponse à cette question se trouve dans ces sourires, captés à Paris.

Puisque l’amour donne des ailes, ils s’envolent ensemble pour Paris et Berlin, histoire de sceller ce beau départ. Ce dont ils se doutaient devient clair comme un ciel sans nuage : leur façon de voyager coïncidant, ils passent le test du premier voyage, un classique de couple naissant, haut la main… et main dans la main. Déjà, ils lorgnent l’Italie comme prochaine destination.

Un duo dansant

Depuis, la porte rouge de la demeure de L’Île-Bizard, arborant plus que jamais la couleur de la passion, s’est ouverte toutes les fins de semaine à Diane. Le soir, devant la baie vitrée panoramique donnant sur le lac des Deux Montagnes, les amoureux se partagent des gorgées de vin, des soupers raffinés et des pas chorégraphiques langoureux. « Lino était “un cœur tanguant sur le bord du lac”, maintenant, nous sommes “deux cœurs dansant au bord du lac” », se réjouit Diane. Tous deux en excellente forme, ils aiment également marcher longuement, tout en débattant d’architecture au gré des bâtiments sur leur chemin.

PHOTO FRANÇOIS ROY, ARCHIVES LA PRESSE

La fameuse résidence de L’Île-Bizard, vue en été.

D’ailleurs, la fameuse résidence de Lino, point de départ de l’histoire, agit comme le centre de gravitation de leur union. Diane, qui avait déjà déniché son petit paradis dans les Cantons-de-l’Est, s’est vite aperçue que les murs faisaient corps avec Lino, et vice-versa. « La maison, son terrain, ça fait partie de lui, il ne passe pas une journée sans qu’il prenne une photo. »

En nous présentant la propriété, Lino avait insisté sur le ballet des astres autour de son toit, entre le soleil chatoyant sur les terrasses et la lune plongeant dans le lac. Un tango similaire s’est amorcé autour de la maisonnée ; mettant cette fois, face à face, un Lino solaire, expansif, flamboyant et une Diane sélène, force tranquille à l’élégance tamisée. De quoi contredire Charles Trenet : le rendez-vous entre le soleil et la lune a bien eu lieu.

Ébranlé par le deuil au moment de mettre en vente sa maison, Lino a retrouvé une belle sérénité. « Le décès de ma femme a été dur. On était très amoureux et elle restera toujours dans mon esprit. Je n’ai que de bons souvenirs et aucun regret. Mais l’avenir, c’est l’avenir. Diane, c’est une autre personne, attachante, qui va me chercher aux bonnes places. Tout cela fait partie de la suite logique », lance-t-il.

Cette même logique qui l’a fait retirer sa demeure du marché, un geste qui a même reçu la bénédiction du courtier ! Et tant pis pour ceux qui convoitaient cette perle rare. Lino et Diane ont trouvé la leur, sur un autre terrain ; et celle-ci n’a pas de prix.