Vous êtes skieur et vous souhaitez acheter un chalet, une maison de campagne ou un condo en bordure des pentes ? Le marché de l'immobilier près des stations de ski demeure solide, mais il faut savoir trouver la bonne piste si on veut rentabiliser son investissement.

Louer avant d'acheter

Julie Pilon, 39 ans, et son conjoint Éric Martel, 40 ans, ne tiennent plus en place. Le couple de skieurs qui a trois jeunes enfants va bientôt passer chez le notaire pour prendre les clés de sa maison de campagne acquise près du mont Garceau, à Saint-Donat.

« C'est le dernier hiver où on loue pour faire du ski, souligne fièrement Julie Pilon. On a enfin trouvé ce qu'on cherchait, et au prix que nous souhaitions payer. »

« On a pris le temps d'établir nos critères avant de faire une offre, précise-t-elle. On voulait payer moins de 300 000 $. Et puisque nous ne sommes pas portés sur les rénovations, il n'était pas question d'acheter un chalet qui demandait d'importants travaux. »

Le couple Pilon-Martel avoue avoir ratissé la région avant de tomber sur cette maison qui était sur le marché depuis au moins six mois.

« Je peux vous assurer qu'on en a visité, des chalets à retaper, nécessitant des travaux de plus de 100 000 $ ! », évoque-t-elle avec une pointe d'humour... immobilière.

Les copains d'abord

C'est d'abord la passion du ski, et le désir d'aller retrouver leurs amis skieurs au pied du mont Garceau, qui ont influencé la décision de Julie et Éric d'acheter dans Lanaudière, plutôt qu'ailleurs au Québec.

Leur décision a pourtant de quoi étonner, considérant que leur résidence principale se trouve à La Prairie, sur la Rive-Sud de Montréal, où ils travaillent tous les deux.

Julie Pilon occupe un emploi en web et marketing chez Médiagrif, à Longueuil, tandis que son conjoint Éric est ingénieur chez Pratt & Whitney, à Longueuil également.

« C'est évidemment à deux heures de route de la maison, conviennent-ils. Mais lorsqu'on arrive à Saint-Donat, on décroche totalement. Nos enfants retrouvent leurs amis sur les pentes et on en fait autant. On a fait notre choix en fonction de nos loisirs en famille et entre amis. »

La maison acquise n'entre pas dans la classification « ski-in, ski-out », mais ce n'est pas un problème. « Nous sommes à cinq minutes à peine de la station, en automobile, et à 15 minutes de marche. »

« Si on coupait les arbres, on verrait la montagne à partir de notre maison ! Et nous n'avons pas acheté uniquement pour le ski. L'été, il y a les lacs, la nature. »

Une occasion

De l'aveu de Julie Pilon, cela faisait au moins trois ans que son conjoint et elle considéraient l'option d'acheter, plutôt que de continuer à louer.

« On ne trouvait rien qui nous convenait au prix que nous nous étions fixé, mentionne-t-elle. Toutefois, au cours des six derniers mois, il nous a semblé que le marché tournait enfin à notre avantage. On a constaté qu'un nombre plus élevé de maisons étaient encore sur le marché, souvent huit mois et même un an après avoir été inscrites. C'était le cas de la maison que nous convoitions. Ça nous donnait une marge de manoeuvre pour négocier avec le vendeur. »

Elle ne cache pas, par ailleurs, qu'il faut se méfier des vendeurs « audacieux » qui peuvent exiger des prix trop élevés parce que leur maison, ou leur condo, est située à deux coups de glisse des pentes de ski.

Pour les prix gonflés, « il y en a toujours qui s'essaient », constate-t-elle.

Dans ces cas, il faut parfois recourir aux conseils des experts...

La prime des pentes

« Il y a une prime à payer pour acheter à proximité d'une station de ski, mais elle est moins importante qu'il y a sept ou huit ans, quand le marché était robuste et que les vendeurs misaient davantage sur l'attrait de la montagne pour justifier leurs prix. »

La courtière immobilière Linda Minotti, de l'Équipe Jeannotte Minotti, vient de vendre une maison au couple Pilon-Martel, tout près du mont Garceau, à Saint-Donat, dans Lanaudière (voir texte précédent). Le ski, selon elle, ça demeure « un gros vendeur, dans l'immobilier, parce que c'est un sport de famille ».

« Plusieurs de nos clients-acheteurs nous disent que c'est mieux que de passer leurs journées dans les arénas à regarder leurs enfants jouer au hockey », fait-elle observer avec à-propos.

Après avoir analysé les transactions réalisées à proximité de 38 des 74 stations de ski du Québec (les stations exploitant moins de 10 pentes ont été écartées de l'étude), la firme JLR Solutions foncières a conclu que de posséder une propriété dans une municipalité où se trouve une station de ski constitue bel et bien un atout.

Le palmarès

La firme JLR a aussi établi le top 5 des villes abritant des stations de ski où le prix médian des unifamiliales était le plus élevé en 2014.

Chelsea (Camp Fortune) arrive au premier rang, avec un prix médian de 398 067 $, suivie de Saint-Bruno-de-Montarville (Ski Saint-Bruno), avec un prix de 370 000, Lac-Beauport (Centre de ski Le Relais), avec un prix de 340 000 $, Cantley (Station Mont-Cascades), à 315 000 $ et, enfin, Orford (Mont-Orford), à 283 739 $.

La Tuque (Centre municipal de Ski alpin) est la ville « de ski » où les maisons sont les moins chères, avec un prix médian de seulement 105 000 $

En chiffres

• 5,8 millions

Nombre de jours-ski durant la saison 2014-2015

• 6 millions

Nombre de jours-ski, en moyenne, entre 2010 et 2015

• 6,5 millions

Nombre de jours-ski, en moyenne, entre 2000 et 2010

• 1,2 million

Nombre de skieurs au Québec

Source : Association des stations de ski du Québec

Bromont: le ski avant l'immobilier

Les stations de ski qui investissent dans leurs infrastructures (remonte-pentes, fabrication de neige artificielle) donnent de la valeur au marché immobilier, soutient Charles Désourdy, président de Ski Bromont et de Bromont Immobilier.

« C'est un conseil que je donne aux éventuels acheteurs, ajoute l'homme d'affaires et grand skieur. Avant d'acheter une maison ou encore un condo près des pentes, il faut voir dans quel état se trouvent la montagne et ses installations. »

Il en profite pour faire son propre marketing. « Nous avons nous-mêmes beaucoup investi, quelque chose comme 60 millions, dans la montagne de Bromont, calcule-t-il. Ces investissements ont servi, entre autres, à fabriquer de la neige plus rapidement et en plus grandes quantités, en plus d'accélérer les remontées jusqu'au sommet des pentes. »

Une valeur accrue

Il considère en outre que ces travaux majeurs ont procuré une plus grande valeur aux propriétés qui se trouvent tout à côté ou à une distance raisonnable des pentes.

À Bromont, Charles Désourdy note par ailleurs que l'assiette fiscale de la ville est passée de 300 millions à 1,6 milliard, depuis 15 ans, « en grande partie grâce au pouvoir d'attraction de la montagne ».

« C'est la preuve que les investissements dans la montagne sont profitables, note-t-il. Il y a des acheteurs pour le ski et pour la pratique des sports de plein air toutes saisons. »

Richesse foncière

En septembre 2015, l'Association des stations de ski du Québec dévoilait une étude tendant à démontrer, notamment, que la montagne est rentable. À la fois pour ceux qui investissement dans l'achat d'une propriété et pour les municipalités qui ont la chance d'avoir une pente de ski dans leur voisinage.

L'étude réalisée par le professeur Michel Archambault, de l'UQAM, fait ressortir que la richesse foncière collective a augmenté de 15 à 20 %, sur 10 ans, dans les villes où il y a une station de ski.

L'avis des courtiers

Jean Fortin

Via Capitale, Saint-Sauveur

« La donne a changé. Il y a 15-20 ans, on achetait une résidence secondaire près d'un centre de ski pour aller skier, d'abord et avant tout. La population a vieilli. Aujourd'hui, les acheteurs sont des baby-boomers qui veulent s'installer en vue de la retraite. Le ski est un élément important dans leur prise de décision, mais ils veulent pouvoir vivre dans un environnement où il y a de bons restos et une salle de spectacle. »

Marie Dubois

Sutton, Bromont

« Il y a une forte clientèle d'acheteurs qui veulent avoir une maison ou un condo près des pentes. Mais les prix demandés sont en fonction de l'emplacement. Par exemple, une propriété à Bromont se vendra 50 000 $ plus cher qu'à Granby parce qu'elle se trouve dans une ville qui bénéficie de l'attrait de la montagne. On constate que les propriétaires-skieurs font souvent des choix en fonction de la famille. La maison devient un lieu de rencontre. »

Carole St-Georges

Sutton, Saint-Donat

« Le marché immobilier tourne au ralenti. Les acheteurs de résidences secondaires recherchent encore des propriétés près des pentes, mais aussi, et de plus en plus, pour profiter de la nature. Il faut comprendre que la population vieillit. Il y a parmi mes clients des nouveaux retraités qui ont déjà loué un chalet et qui veulent venir s'établir en permanence dans la région. »

Josée Legault

Via Capitale, Tremblant

« C'est un fait que les prix sont plus élevés, plus la maison est à proximité des pentes. On va payer quelques millions à Lac-Tremblant ! Mais on peut trouver un condo "ski-in, ski-out", avec une chambre à coucher et 737 pieds carrés, à un prix variant entre 140 000 $ et 170 000 $. Nous voyons revenir les Américains, en raison de la faiblesse du dollar canadien. »