(Jérusalem) Israël a juré mardi de faire payer à l’Iran le prix de son attaque sans précédent contre le territoire israélien, malgré les appels internationaux à la retenue dans une région déjà ébranlée par la guerre dans la bande de Gaza.

À Téhéran, le président Ebrahim Raïssi a prévenu que « la moindre action » d’Israël contre « les intérêts de l’Iran » provoquerait « une réponse sévère, étendue et douloureuse » de son pays.

Dans ce contexte qui renforce les craintes d’un embrasement au Moyen-Orient, l’offensive de l’armée israélienne dans la bande de Gaza assiégée et menacée de famine, ne montre aucun signe de répit, avec 46 Palestiniens tués ces dernières 24 heures, selon le Hamas.

Douze jours après une frappe meurtrière contre son consulat à Damas le 1er avril, imputée à Israël, l’Iran a lancé samedi soir une attaque de drones et de missiles contre le territoire israélien, la première jamais menée à partir du sol iranien.

La quasi-totalité des 350 projectiles ont été interceptés avec l’aide des États-Unis et d’autres pays alliés, a affirmé Israël en faisant état de blessés.

« Nous ne pouvons pas rester les bras croisés face à une telle agression, l’Iran ne sortira pas indemne » de son attaque, a affirmé le porte-parole de l’armée Daniel Hagari, lors d’une visite organisée pour les médias sur une base dans le sud d’Israël.

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Daniel Hagari

« Tirer 110 missiles directement sur Israël ne restera pas impuni. Nous répondrons au moment, au lieu et à la manière que nous choisirons », a dit le contre-amiral Hagari, dont le pays est l’ennemi juré de la République islamique d’Iran.

« La goutte d’eau »

Juste après son attaque, l’Iran a affirmé avoir agi « en exerçant son droit à l’autodéfense » à la suite de la frappe qui a détruit son consulat à Damas et coûté la vie notamment à deux hauts gradés iraniens, et dit considérer « l’affaire close ».  

L’armée israélienne a affirmé que les victimes de la frappe dans la capitale syrienne étaient des « terroristes » agissant contre Israël, sans confirmer ou non son implication.  

Craignant une explosion dans la région, les États-Unis, alliés indéfectibles d’Israël, ont vite fait savoir qu’ils ne voulaient pas « d’une guerre étendue avec l’Iran » et qu’ils ne participeraient pas à une riposte israélienne.

Le premier ministre britannique Rishi Sunak a appelé son homologue israélien Benyamin Nétanyahou à faire preuve de « sang-froid ». La Russie a appelé à la retenue et l’Arabie saoudite a estimé que la région n’avait « pas besoin d’un conflit supplémentaire ».  

Prenant le contrepied des Occidentaux qui ont condamné l’attaque iranienne, le président turc Recep Tayyip Erdogan a accusé M. Nétanyahou d’en être « le principal responsable ». La frappe sur le consulat iranien a été « la goutte d’eau qui a fait déborder le vase », a-t-il dit.

Après le soutien de plusieurs alliés dans l’interception des missiles, Benyamin Nétanyahou a appelé la communauté internationale à « rester unie » face à « l’agression iranienne, qui menace la paix mondiale ».

« Sans pitié »

L’Iran, qui appelle à la destruction d’Israël, s’était gardé jusqu’à présent de l’attaquer frontalement et l’affrontait via ses alliés comme le Hezbollah libanais.

Mardi, le Hezbollah a revendiqué une attaque aux drones explosifs lancés depuis le Liban sur des positions israéliennes dans le nord. Le Hezbollah a ensuite annoncé la mort de trois de ses membres dans des frappes israéliennes.  

Malgré les rebondissements liés à l’Iran, M. Nétanyahou a redit sa détermination à en finir avec le Hamas, affirmant vouloir « repousser un ennemi cruel, les monstres qui nous ont attaqués. Nous les frappons en retour sans pitié et nous les vaincrons ».

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Le premier ministre israélien, Benyamin Nétanyahou

La guerre a été déclenchée par une attaque sans précédent menée le 7 octobre par des commandos du Hamas infiltrés depuis Gaza dans le sud d’Israël, qui a fait 1170 morts en majorité des civils, selon un bilan de l’AFP établi à partir de données officielles israéliennes. Plus de 250  personnes ont été enlevées et 129 restent retenues à Gaza dont 34 sont mortes d’après des responsables israéliens.

En représailles, Israël a juré de détruire le Hamas, au pouvoir à Gaza depuis 2007, qu’il considère comme une organisation terroriste de même que les États-Unis et l’Union européenne.

L’offensive israélienne dévastatrice dans la bande de Gaza a fait 33 843 morts la plupart des civils depuis le 7 octobre, selon le ministère de la Santé du Hamas. Dans un communiqué mardi, l’agence onusienne ONU Femmes estime que plus de 10 000 femmes ont été tuées, laissant 19 000 enfants orphelins.

« Pour une miche de pain »

Outre les destructions colossales et le lourd bilan humain, la guerre a provoqué une catastrophe humanitaire avec la plupart des 2,4 millions d’habitants menacés de famine selon l’ONU. L’organisation s’apprête à lancer un appel aux dons de 2,8 milliards de dollars, principalement pour Gaza et la Cisjordanie, un territoire palestinien occupé par Israël depuis 1967.

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Un jeune Palestinien prépare un repas tandis que des personnes cherchent des objets récupérables parmi les décombres des bâtiments détruits par les bombardements israéliens à Khan Yunès.

Devant une boulangerie qui vient de rouvrir dans la ville de Gaza, des Palestiniens font pendant des heures la queue pour acheter du pain.

« J’ai attendu six heures pour avoir une miche de pain », a témoigné un homme, Khaled al-Ghoula.

Selon l’agence de l’ONU pour les réfugiés palestiniens (UNRWA), le volume d’aide humanitaire autorisé par Israël à entrer dans Gaza reste très inférieur à l’objectif de 500 camions par jour, avec « 181 camions » chaque jour depuis début avril.

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Khan Younès après des bombardements israéliens.

Le Hamas continue à réclamer un cessez-le-feu définitif en vue d’une trêve dans la guerre. Mais Benyamin Nétanyahou maintient son projet d’offensive terrestre contre la ville de Rafah (sud), qu’il présente comme le dernier bastion du Hamas.

La communauté internationale redoute un bain de sang dans cette ville devenue un refuge pour 1,5 million de Palestiniens, la plupart des déplacés.