Le ministre israélien de la Défense a prévenu jeudi que la guerre contre le Hamas dans Gaza durerait « plus que quelques mois », à l’arrivée d’un émissaire américain venu exprimer les inquiétudes de son pays face aux lourdes pertes civiles dans le territoire palestinien assiégé.

Ce qu’il faut savoir

  • La guerre dans la bande de Gaza « durera plus que quelques mois », a prévenu le ministre israélien de la Défense Yoav Gallant.
  • Les États-Unis, alliés d’Israël, souhaitent que la guerre entre Israël et le Hamas « cesse dès que possible », a assuré un porte-parole de la Maison-Blanche, John Kirby.
  • Le président turc Recep Tayyip Erdoğan a alerté le président américain Joe Biden contre les « conséquences régionales et mondiales négatives » du conflit.
  • Les télécommunications dans la bande de Gaza ont été coupées, a annoncé l’opérateur palestinien Paltel. C’est la troisième fois que les télécommunications sont coupées dans le territoire palestinien.
  • L’armée israélienne a fait état d’un nouveau soldat mort pendant la nuit dans le sud de la bande de Gaza, portant à 116 le nombre de soldats israéliens morts dans le territoire palestinien.
  • Le premier ministre israélien, Benyamin Nétanyahou, a déclaré mercredi soir : « Rien ne nous arrêtera » sur le chemin de « la victoire » dans la guerre contre le Hamas, ni la mort de soldats ni « les pressions internationales » en faveur d’un cessez-le-feu.
  • Onze Palestiniens ont été tués dans une incursion, entamée mardi, de l’armée israélienne dans le camp de réfugiés de Jénine, en Cisjordanie occupée.
  • Quatre soldats ont été blessés, selon l’armée israélienne. Plus de 280 personnes ont été tuées en Cisjordanie par les tirs israéliens et les attaques des colons depuis le 7 octobre, selon des responsables palestiniens.

Israël a déclaré la guerre au Hamas, au pouvoir dans la bande de Gaza, en riposte à l’attaque sanglante menée sur son sol le 7 octobre par le mouvement islamiste, qui a fait 1200 morts, pour la plupart des civils, selon les autorités.

Le nombre de morts dans la bande de Gaza approche 18 800, dont 70 % des femmes, des enfants et adolescents, tués par les bombardements israéliens, selon le ministère de la Santé de la bande de Gaza.

L’ONU a averti jeudi qu’on assistait à un « effondrement de l’ordre civil » dans l’enclave palestinienne, plongée dans une profonde crise humanitaire, affirmant que la faim et le désespoir poussent la population à s’emparer de l’aide, qui arrive en quantité très limitée.

« Partout où l’on va, les gens sont désespérés, affamés et terrifiés », a affirmé le commissaire général de l’Office de secours pour les réfugiés palestiniens des Nations unies (UNRWA), Philippe Lazzarini.

Soumis depuis le 9 octobre par Israël à un siège total, qui provoque de graves pénuries, le petit territoire dévasté est aussi régulièrement privé de toute communication avec l’extérieur par des coupures des liaisons téléphoniques et de l’internet, comme c’était une nouvelle fois le cas jeudi.

À Khan Younès, la grande ville du Sud, des habitants inspectaient des ruines encore fumantes après une frappe israélienne.

« Un avion a frappé le bâtiment sans avertissement et il a été complètement détruit. Environ quatre personnes sont encore coincées sous les décombres », a raconté à l’AFP Hassan Bayyout, un homme de 70 ans.

PHOTO IBRAHEEM ABU MUSTAFA, REUTERS

Khan Younès jeudi

L’armée a indiqué avoir mené jeudi des « interventions ciblées » sur plusieurs sites aux alentours de Khan Younès.

Dans la soirée, de la fumée s’élevait au-dessus de la ville voisine de Rafah après une nouvelle frappe, selon des images de l’AFP.

Le ministre israélien de la Défense, Yoav Gallant, qui a rencontré jeudi le conseiller américain à la sécurité nationale, Jake Sullivan, a prévenu que la guerre dans Gaza « durerait plus que quelques mois ».

« Le Hamas est une organisation terroriste qui s’est construite au cours d’une décennie pour combattre Israël et qui a mis en place des infrastructures souterraines et aériennes qu’il n’est pas facile de détruire. Cela prendra du temps – plus que quelques mois –, mais nous vaincrons et nous détruirons » le Hamas, a déclaré M. Gallant.

Les États-Unis souhaitent que la guerre « cesse dès que possible », a assuré un porte-parole de la Maison-Blanche, John Kirby. Il a ajouté que M. Sullivan avait discuté jeudi, au cours de sa visite en Israël, d’un basculement « dans un avenir proche » de l’offensive israélienne vers des « opérations de faible intensité ».

Le chef du Hamas, Ismaïl Haniyeh, en exil au Qatar, avait qualifié mercredi d’« illusion » tout plan d’après-guerre qui imaginerait Gaza sans son organisation et les autres « mouvements de résistance ».

Initiatives diplomatiques

Après une résolution non contraignante, massivement adoptée mardi par l’Assemblée générale de l’ONU pour appeler à un cessez-le-feu, les initiatives diplomatiques se multiplient.

Fervents soutiens d’Israël, les États-Unis sont opposés à un cessez-le-feu dans l’immédiat, qui selon eux laisserait au Hamas le contrôle du territoire, mais ont exprimé ces derniers jours leur impatience. Le président Joe Biden a critiqué des « bombardements aveugles » et évoqué une possible « érosion » du soutien occidental à Israël.

Le secrétaire américain à la Défense, Lloyd Austin, est attendu sous peu en Israël, tandis que la cheffe de la diplomatie française, Catherine Colonna, doit se rendre au Liban samedi et en Israël dimanche.

En parallèle à sa campagne de frappes aériennes dévastatrices lancée le 7 octobre, l’armée israélienne mène depuis le 27 octobre une offensive terrestre contre le Hamas à présent étendue à tout le territoire, y compris dans le Sud, où se sont massés des centaines de milliers de civils déplacés par la guerre.

Quelque 240 personnes ont été enlevées en Israël le jour de l’attaque, dont 135, selon l’armée, sont toujours aux mains du Hamas et de groupes affiliés après la libération de 105 otages pendant une trêve de sept jours qui a pris fin le 1er décembre.

L’armée a annoncé jeudi que 116 soldats avaient été tués depuis le début de l’offensive terrestre.

D’après Keren Hajioff, une porte-parole de l’armée, les soldats ont découvert jeudi « de vastes dépôts d’armes et des tunnels dans de multiples écoles ».

Israël affirme que le Hamas, classé organisation terroriste par les États-Unis, l’Union européenne et Israël notamment, a installé des bases dans des bâtiments civils, comme des hôpitaux, des écoles et des mosquées, ou dans des tunnels creusés dans leur sous-sol, et se sert de la population comme de « boucliers humains », ce que le mouvement islamiste dément.

« Où est la zone de sécurité ? »

Dans la bande de Gaza, les civils sont acculés dans des zones toujours plus petites, cherchant désespérément à échapper aux frappes.

À l’extrême sud, Rafah, ville frontalière avec l’Égypte, est devenue un gigantesque camp fait de tentes bricolées à l’aide de bouts de bois, de draps et de bâches en plastique, où les déplacés s’abritent tant bien que mal sous la pluie, alors que l’hiver et le froid s’installent.

PHOTO MAHMUD HAMS, AGENCE FRANCE-PRESSE

Rafah jeudi

Là aussi, les frappes israéliennes meurtrières sont quotidiennes.

Abu Muhammad Abu Dabaa, 53 ans, se recueillait jeudi avec des proches sur les dépouilles de victimes.

« La frontière avec l’Égypte n’est qu’à 300 mètres. Ils nous ont dit de venir du nord au sud et nous voilà à l’extrême sud. Où est la zone de sécurité ? », lance-t-il.

« Aujourd’hui, Israël affirme que le secteur de Rafah est sûr. Mais il n’y a plus aucune zone sûre dans toute la bande de Gaza », témoignait aussi Dhia Abou Zin, un homme de 32 ans.

Selon l’ONU, environ 1,9 million de personnes, soit 85 % de la population, ont été déplacées, beaucoup plusieurs fois depuis le début de la guerre.

L’ONU ne cesse de répéter que l’aide humanitaire, qui ne parvient pour l’essentiel que jusqu’à Rafah, est insuffisante et que la surpopulation dans les camps entraîne des maladies, en plus de la faim et du manque de soins.

Le COGAT, l’organisme du ministère israélien de la Défense chargé des affaires civiles palestiniennes, a toutefois assuré que l’armée avait observé des « pauses à des fins humanitaires pour permettre aux civils de reconstituer leurs stocks tels que de la nourriture et l’eau ».

La violence s’est par ailleurs intensifiée en Cisjordanie occupée, où un raid israélien a fait 11 morts depuis mardi, selon un nouveau bilan communiqué jeudi par l’Autorité palestinienne.