De premiers otages israéliens et étrangers enlevés par le Hamas lors de son attaque meurtrière sur le sol israélien ont été libérés vendredi, en vertu d’un accord qui a abouti aussi à une trêve entre Israël et le mouvement islamiste dans la bande de Gaza et à des libérations de détenus palestiniens.

Ce qu’il faut savoir

  • La trêve de quatre jours est entrée en vigueur vendredi à 7 h locales ;
  • Avec un ratio d’un otage contre trois Palestiniens, l’échange doit concerner un total de 50 otages pour 150 Palestiniens ;
  • Un total de 24 otages (13 Israéliens, dix Thaïlandais et un Philippin) ont été libérés vendredi par le Hamas ;
  • En contrepartie, 39 prisonniers palestiniens ont été libérés des prisons israéliennes ;
  • Dès le lever du soleil, des milliers de Palestiniens déplacés par le conflit se sont pressés sur les routes du sud du territoire pour « rentrer à la maison » ;
  • Les bombardements ont cessé à Khan Younès, dans le sud du petit territoire assiégé où les habitants qui ont fui les villages aux alentours ou le Nord pilonné par l’armée israélienne sont sortis en masse des hôpitaux et des écoles où ils avaient trouvé refuge ;
  • La trêve a permis à l’ONU d’augmenter la livraison d’aide humanitaire dans la bande de Gaza où 137 camions ont déjà été déchargés ;
  • Le calme règne aussi vendredi dans la zone frontalière entre le sud du Liban et le nord d’Israël, où des échanges de tirs ont eu lieu quotidiennement ces dernières semaines.

Bilans

  • Selon un dernier bilan communiqué jeudi par le gouvernement du Hamas, 14 854 personnes ont été tuées dans les bombardements israéliens sur la bande de Gaza depuis le 7 octobre, dont 6150 enfants et 4000 femmes ;
  • Côté israélien, l’attaque du Hamas a fait 1200 morts, majoritairement des civils tués le 7 octobre, selon les autorités. Selon l’armée, 68 soldats ont été tués dans la bande de Gaza depuis le début de la guerre.

Pour la première fois en sept semaines de guerre, cette trêve, entrée en vigueur vendredi à l’aube, offre un répit aux habitants de la bande de Gaza, assiégée et bombardée depuis le 7 octobre par l’armée israélienne en représailles à l’attaque du Hamas.

Un total de 24 otages (13 Israéliens, dix Thaïlandais et un Philippin) ont été remis vendredi au Comité international de la Croix-Rouge (CICR) à Gaza par le Hamas et sont rentrés en Israël via l’Égypte. De son côté, Israël a libéré 39 femmes et enfants palestiniens emprisonnés, a annoncé le Qatar, principal médiateur dans le conflit.

Parmi les otages libérés par le Hamas figurent quatre enfants, dont un âgé de deux ans, et six femmes âgées. « Leur condition physique est bonne et ils se soumettent actuellement à une évaluation médicale et émotionnelle », a déclaré la directrice du Centre médical pour enfants Schneider, Efrat Bron-Harlev, qui les a accueillis.

PHOTO SAMAR ABU ELOUF, THE NEW YORK TIMES

Un total de 24 otages, 13 Israéliens, dix Thaïlandais et un Philippin, ont été remis vendredi au Comité international de la Croix-Rouge (CICR) à Gaza par le Hamas.

À Tel-Aviv, des visages souriants d’otages libérés étaient projetés sur la façade du musée d’Art, avec les mots : « Je suis de retour à la maison ». Mais beaucoup de proches d’otages pensent surtout aux leurs toujours détenus à Gaza.  

« Je suis heureux d’avoir retrouvé ma famille. Ressentir de la joie est permis et il est permis de verser une larme. C’est humain », déclare Yoni Asher, qui vient de retrouver son épouse Doron et ses deux filles de deux et quatre ans, dans une vidéo diffusée par le Forum des familles d’otages.

« Mais je ne fais pas la fête, je ne ferai pas la fête tant que les derniers otages ne seront pas rentrés à la maison », ajoute-t-il.

Son épouse Doron a perdu sa mère lors de l’attaque, et son frère et le compagnon de sa mère sont toujours otages à Gaza.

Le premier ministre Benyamin Nétanyahou, qui fait de la libération des otages un préalable à tout cessez-le-feu, s’est dit vendredi déterminé à tous les « ramener » en Israël.

L’armée estime à environ 240 le nombre de personnes enlevées par le Hamas le 7 octobre.

Liesse en Cisjordanie

Le Qatar, qui a mené les négociations avec l’Égypte et les États-Unis, avait obtenu mercredi un accord portant sur une trêve renouvelable de quatre jours entre Israël et le Hamas, pendant lesquels 50 otages retenus à Gaza doivent être libérés, de même que 150 Palestiniens détenus en Israël.

Les autorités pénitentiaires israéliennes ont par ailleurs confirmé la libération de 39 détenus palestiniens.

En Cisjordanie occupée, des scènes de liesse ont accompagné le retour des prisonniers libérés, accueillis en « héros » comme à Beitunia ou plus au nord, dans le camp de réfugiés de Naplouse.

PHOTO AMMAR AWAD, REUTERS

Un prisonnier palestinien libéré par Israël

À Jérusalem-Est, occupée par Israël depuis 1967, toute célébration autour des prisonniers libérés a en revanche été interdite.

« Je suis heureuse mais ma libération s’est faite au prix du sang des martyrs », affirme Marah Bakir, 24 ans, dont huit en prison pour une tentative de meurtre d’un garde-frontière israélien, évoquant les morts dans les bombardemens israéliens à Gaza. « J’ai passé la fin de mon enfance et mon adolescence en prison, loin de mes parents et de leurs câlins, mais c’est comme ça avec un État qui nous oppresse et ne laisse aucun de nous tranquilles », ajoute-t-elle.

« Je rentre à la maison »

Selon les autorités israéliennes, 1200 personnes, en grande majorité des civils, ont été tuées lors de l’attaque du Hamas contre Israël le 7 octobre. En représailles, Israël a bombardé sans relâche le territoire palestinien et y a lancé le 27 octobre une offensive terrestre afin « d’éliminer » le Hamas, au pouvoir à Gaza depuis 2007.

Dans la bande de Gaza, 14 854 personnes, parmi lesquelles 6150 enfants, ont été tuées par les bombardements israéliens, selon le gouvernement du Hamas.

Vendredi à l’aube alors que les frappes aériennes incessantes depuis près de 50 jours s’étaient tues, tout comme les tirs de roquettes vers Israël à partir de Gaza, des dizaines de milliers de Palestiniens déplacés dans le sud du territoire avaient déjà rassemblé leurs effets personnels pour repartir vers leurs villages.

Omar Jibrine, 16 ans, avait trouvé refuge avec huit autres membres de sa famille à l’hôpital Nasser, dans la ville de Khan Younès. Un quart d’heure avant même l’entrée en vigueur de la trêve, il a pris la route vers son village à quelques kilomètres de là : « Je rentre à la maison », dit-il à l’AFP.

Mais alors que voitures et carrioles se mettaient en branle, des tracts en arabe lancés depuis les airs par l’armée israélienne prévenaient : « La guerre n’est pas encore finie ». « Revenir dans le nord est interdit. »

L’armée considère le nord de la bande de Gaza, d’où ont fui des centaines de milliers de Palestiniens vers le sud, comme une zone de combat abritant le centre des infrastructures du Hamas.

« Prochaines phases »

Israël s’est engagé, au terme de cette trêve, à « poursuivre » les combats contre le Hamas, classé organisation terroriste par les États-Unis, l’Union européenne et Israël.

PHOTO IBRAHEEM ABU MUSTAFA, REUTERS

L’armée israélienne considère le nord de la bande de Gaza, d’où ont fui des centaines de milliers de Palestiniens vers le sud, comme une zone de combat.

« Prendre le contrôle du nord de la bande de Gaza est la première étape d’une longue guerre et nous nous préparons pour les prochaines phases », a déclaré le porte-parole de l’armée, Daniel Hagari.

« Voir […] tous les visages des 24 otages libérés ce soir nous remplit de soulagement, mais cela renforce aussi notre détermination, cela nous rappelle pour qui nous nous battons et que nous ne nous arrêterons pas avant que chacun de nos otages ne soit rentré chez lui », a-t-il également affirmé.

PHOTO MOHAMMED ABED, AGENCE FRANCE-PRESSE

Un garçon palestinien tient un prospectus israélien, avertissant les citoyens de Gaza de ne pas retourner dans le nord de la bande.

Le chef du Hamas en exil au Qatar, Ismaïl Haniyeh, a affirmé vendredi que « l’ennemi a fait le pari de récupérer les otages grâce au canon de ses fusils, aux tueries et au génocide » mais « qu’après 50 jours de crimes et d’horreur, l’ennemi a dû se plier aux conditions de la résistance » (le Hamas, NDLR).  

200 camions humanitaires

Israël a placé depuis le 9 octobre le territoire, déjà soumis à un blocus israélien depuis 2007, en état de « siège complet », coupant les livraisons d’électricité, d’eau, de nourriture, de médicaments et de carburant.

La trêve doit permettre l’entrée d’un plus grand nombre de convois d’aide dans le petit territoire surpeuplé où, selon l’ONU, 1,7 million des 2,4 millions d’habitants ont été déplacés par la guerre.

PHOTO AMMAR AWAD, REUTERS

Israël s’est engagé, au terme de cette trêve, à « poursuivre » les combats contre le Hamas.

Vendredi, 200 camions chargés d’aide sont entrés à Gaza, selon le service du ministère de la Défense israélien chargé des affaires civiles à Gaza. Il s’agit du « plus gros convoi humanitaire » depuis le début de la guerre, a souligné l’agence des Nations unies chargée de la coordination humanitaire (Ocha).

En outre, 129 000 litres de carburant ont pu passer la frontière vers Gaza, selon l’Ocha.

Mais la trêve reste « insuffisante » pour faire entrer l’aide nécessaire, ont souligné des ONG internationales, réclamant un véritable cessez-le-feu.

PHOTO SAID KHATIB, AGENCE FRANCE-PRESSE

La trêve doit permettre l’entrée d’un plus grand nombre de convois d’aide dans le petit territoire surpeuplé où, selon l’ONU, 1,7 million des 2,4 millions d’habitants ont été déplacés par la guerre.