Premier signe de répit depuis le début de la guerre : une entente a été conclue entre Israël et le Hamas pour permettre une « trêve » dans les combats ainsi que la libération d’otages, au moment où une véritable « tragédie » sanitaire se profile dans la bande de Gaza, selon le Fonds des Nations unies pour l’enfance (UNICEF).

Ce qu’il faut savoir

La libération d’une partie des otages israéliens à Gaza a été confirmée mardi soir par Israël et le Hamas.

En principe, le Hamas devra libérer 50 des quelque 240 otages qu’il détient dans la bande de Gaza sur une période de quatre jours.

Huit civils, dont deux journalistes, ont été tués dans des frappes israéliennes au Liban.

Deux médecins de Médecins sans frontières (MSF) ont perdu la vie dans une frappe sur l’hôpital indonésien.

Le gouvernement israélien a annoncé en fin de soirée, heure de Montréal, qu’il avait approuvé un accord de cessez-le-feu avec le Hamas, ce qui entraînera une pause dans la guerre dévastatrice qui dure depuis plus de six semaines.

D’après les paramètres de cet accord, le Hamas devra libérer 50 des quelque 240 otages qu’il détient dans la bande de Gaza sur une période de quatre jours. Selon des sources proches des pourparlers, cela viendrait en échange de la libération d’environ 150 Palestiniens prisonniers en Israël.

Selon l’Associated Press, qui s’est entretenue avec des responsables de la Maison-Blanche, les libérations d’otages commenceront environ 24 heures après que l’accord aura été approuvé par toutes les parties. L’accord inclurait au moins trois ressortissantes américaines, dont une enfant de 3 ans, a précisé un haut responsable de la Maison-Blanche, qui s’attend à une pause de plusieurs jours dans les combats.

PHOTO RONEN ZVULUN, REUTERS

La photo d’une fillette enlevée par le Hamas lors de son attaque surprise du 7 octobre dernier dans le kibboutz de Nir Oz est encerclée d’impacts de balles.

Ce sont surtout des femmes et des enfants qui font partie des otages identifiés pour être échangés contre des prisonniers palestiniens détenus en Israël.

Le gouvernement israélien a déclaré que la trêve serait prolongée d’un jour pour chaque dizaine d’otages supplémentaires libérée par le Hamas.

À Washington, on s’attend déjà à ce que plus de 50 otages soient libérés. Les États-Unis espèrent également une pause dans les combats à la frontière israélo-libanaise, où des affrontements ont lieu quotidiennement entre l’armée israélienne et le Hezbollah libanais, qui dit intervenir en soutien au mouvement palestinien.

Le Qatar a confirmé tard mardi l’accord pour une « pause humanitaire » dans la bande de Gaza, tandis que le président des États-Unis, Joe Biden, s’en disait « extraordinairement satisfait ».

Encore en guerre

Cet accord ne signifie pas la fin de la guerre qui a éclaté lors de l’attaque du Hamas le 7 octobre, qui a coûté la vie à au moins 1200 personnes, pour la plupart des civils, et qui a engendré l’enlèvement d’environ 240 autres personnes.

Benyamin Nétanyahou, premier ministre israélien, s’est d’ailleurs à nouveau engagé à reprendre l’offensive israélienne contre le Hamas dès la fin de la trêve. « Le gouvernement israélien, l’armée israélienne et les forces de sécurité poursuivront la guerre pour ramener toutes les personnes enlevées, éliminer le Hamas et garantir qu’il n’y ait plus aucune menace pour l’État d’Israël depuis Gaza », a clairement indiqué le gouvernement en ce sens.

PHOTO MENAHEM KAHANA, AGENCE FRANCE-PRESSE

Soldats israéliens en activité près de la frontière avec la bande de Gaza

Le Hamas, dont le chef Ismaïl Haniyeh avait fait état d’avancées dans les pourparlers, a précisé que les « dispositions de cet accord ont été formulées conformément à la vision de la résistance et de la détermination qui visent à servir notre peuple et renforcer sa ténacité ». « Nous confirmons que nos mains resteront sur la gâchette et que nos bataillons triomphants resteront aux aguets », a averti le Hamas.

Cette annonce survient alors que les troupes israéliennes combattent des militants palestiniens dans un camp de réfugiés au nord de Gaza, et autour des hôpitaux surpeuplés de patients, en plus d’abriter des familles.

M. Nétanyahou a aussi déclaré que pendant l’accalmie, les efforts de renseignement seraient maintenus, permettant à l’armée de se préparer aux prochaines étapes de la bataille. Il a affirmé que la guerre se poursuivrait jusqu’à ce que « Gaza ne menace plus Israël ».

Nous sommes en guerre et nous continuerons la guerre. Nous continuerons jusqu’à ce que nous atteignions tous nos objectifs.

Benyamin Nétanyahou, premier ministre d’Israël

« Ce soir, nous sommes confrontés à une décision difficile, mais c’est la bonne. Toutes les organisations de sécurité la soutiennent pleinement, avait déclaré le premier ministre Benyamin Nétanyahou lors d’une allocution télévisée, mardi soir, en évoquant une éventuelle signature de l’accord. La guerre a ses étapes, et la libération des otages a aussi ses étapes. »

PHOTO JOHN MACDOUGALL, AGENCE FRANCE-PRESSE

Volutes de fumée s’élevant dans le ciel au-dessus de la bande de Gaza après des frappes israéliennes

Mardi, le gouvernement canadien avait de son côté dit attendre avec impatience la libération d’otages. « Ce que nous attendons de cet accord, c’est que nous voulons nous assurer que tous les otages soient libérés, que tous les ressortissants étrangers soient autorisés à quitter Gaza, y compris, bien sûr, les quelque 200 Canadiens qui sont toujours à Gaza, et que l’aide humanitaire puisse entrer – et bien plus que ce qui est autorisé jusqu’à présent », avait fait valoir la ministre des Affaires étrangères, Mélanie Joly.

Des civils tués au Liban

Un peu plus tôt mardi, huit civils, dont deux journalistes, ont été tués dans des frappes israéliennes au Liban, a rapporté l’agence de presse officielle du pays.

La chaîne de télévision libanaise Al-Mayadeen a annoncé que sa correspondante Farah Omar, 25 ans, et son caméraman Rabih Maamari, 40 ans, avaient été tués « par une frappe israélienne », ce que l’armée libanaise a confirmé.

Médecins sans frontières (MSF) a dit mardi être horrifiée d’apprendre que deux médecins de l’organisation, le DMahmoud Abu Nujaila et le DAhmad Al Sahar, avaient été tués avec un troisième médecin, le DZiad Al-Tatari, lors d’une frappe sur l’hôpital indonésien de Gaza, l’un des derniers hôpitaux encore fonctionnels dans le nord de l’enclave palestinienne.

L’UNICEF a quant à elle sonné l’alerte sur les conditions de vie des Palestiniens ayant été obligés de fuir leur demeure pour éviter les attaques israéliennes, évoquant le spectre d’une véritable « tragédie » sanitaire.

PHOTO MOHAMMED ABED, AGENCE FRANCE-PRESSE

Une Palestinienne accroche des vêtements parmi les débris dans une rue de Khan Younès, dans le sud de la bande de Gaza.

« S’il n’y a pas assez de carburant, nous allons assister à l’effondrement des services d’assainissement », a déclaré un porte-parole, James Elder, lors d’un point de presse en visioconférence à partir du Caire, décrivant la situation comme une véritable « tragédie » ou comme une « tempête parfaite » causée par l’apparition de maladies.

Nous manquons cruellement d’eau. Les matières fécales jonchent les zones densément peuplées. Il y a un manque inacceptable de toilettes.

James Elder, porte-parole de l’UNICEF

« Insécurité totale »

Rachad Antonius, chercheur et professeur de sociologie retraité de l’Université du Québec à Montréal (UQAM), note que la crise humanitaire est un problème « encore plus criant » que celui des 13 000 morts à Gaza depuis le début des frappes.

Il y a 2,3 millions de personnes à Gaza qui vivent dans une insécurité totale, sans eau, sans médicaments, sans maison. Ça dépasse de très loin les morts.

Rachad Antonius, professeur de sociologie retraité de l’UQAM

Pour sortir de l’impasse, il suggère qu’Israël implante un cessez-le-feu humanitaire, mette fin au blocus de Gaza qui dure depuis 16 ans, et annonce une solution basée sur le retrait des territoires occupés en Cisjordanie et dans la bande de Gaza, ce que demande notamment le Canada. « Les amis d’Israël devraient inciter Israël à se retirer. Sinon, on est là pour des générations encore », dit-il.

Avec l’Agence France-Presse et La Presse Canadienne