(Jérusalem) Toutes espèrent serrer leurs proches dans les bras très vite, mais n’osent encore y croire. Des familles des otages israéliens et des prisonniers palestiniens hésitaient mercredi entre angoisse et espoir, après l’accord signé sur un échange entre Israël et le Hamas.

Selon les termes de l’accord, le mouvement islamiste palestinien relâchera dans un premier temps « 50 femmes et enfants de moins de 19 ans » enlevés lors de l’attaque du 7 octobre dans le sud d’Israël, d’une violence incomparable dans l’histoire du pays.  

Ils seront libérés en échange de la libération de 150 prisonniers palestiniens, également des femmes et des jeunes de moins de 19 ans, en plus d’une pause humanitaire de quatre jours.

Israël a publié une liste de noms de prisonniers, mais le Hamas n’a pas communiqué sur les otages. Mais l’émotion des familles était toute aussi vive dans les deux camps.

« Nous sommes très heureux qu’une libération partielle soit en cours », a déclaré le Forum des familles, principale association de proches d’otages. Mais « pour l’instant, nous ne savons pas exactement qui sera libéré et quand ».

Parmi les quelque 240 otages retenus à Gaza, il y a au moins 35 enfants, dont 18 âgés de 10 ans et moins, selon un décompte de l’AFP, et plus de 50 femmes.

« Le Hamas publiera chaque soir les noms de ceux qui sortiront le lendemain », croit savoir Gilad Korngold, qui compte sept membres de sa famille retenus, dont son petit-fils Naveh, huit ans, et sa petite-fille Yahel, trois ans.

« Déchirée »

« Tout ce que nous savons, c’est que nous devons rester à la maison », souffle-t-il à l’AFP, la voix nouée. « Tant que je ne les verrai pas de mes propres yeux, je ne croirai pas ce qu’on me dira ».  

Shemi Calderon, dont le neveu Ofer est otage, confirme un entre-deux infernal. « Nous sommes contents qu’il y ait un accord. Mais ils ne sont pas là jusqu’à ce qu’ils soient réellement là ». Il ajoute : « espérons que cette folie cesse aussi vite que possible pour tout le monde ».

À Tel-Aviv, où les proches des otages manifestent depuis plus de six semaines, beaucoup mêlent soulagement et accablement. Tous réclamaient un accord sur l’ensemble des otages.

 « Nous sommes heureux pour ceux qui vont être libérés, mais nous pensons encore à tous ceux qui vont rester derrière », résumait Marva Tovia, une enseignante de 42 ans. « Je me sens déchirée ».

Les otages ont été emmenés à Gaza quand des commandos du Hamas venant du territoire palestinien ont lancé une attaque sur le territoire israélien le 7 octobre, tuant 1200 personnes, pour la plupart des civils.

Depuis, Israël bombarde sans relâche la bande de Gaza, et plus de 14 100 personnes ont été tuées dans le territoire côtier, d’après le gouvernement du Hamas.

Parmi les prisonniers palestiniens apparaissant sur la liste, aucun n’a « de sang sur les mains », selon les autorités israéliennes. S’il y a 300 noms, les dispositions ne concernent pour l’heure en théorie que 150 détenus.

Ascenseur émotionnel

Leurs familles vivent, elles aussi, l’ascenseur émotionnel.

 « Je pleure, je ris, je tremble », raconte à l’AFP Samira Douayyat, une Palestinienne de Jérusalem-Est, la partie de la ville occupée par Israël depuis 1967. Sa fille Shourouk, 26 ans, qui aura purgé la moitié de sa peine de 16 ans de prison, pourrait être libérée. « Cette année, je n’ai cessé de l’imaginer franchissant la porte d’entrée ».

Sur la liste des prisonniers palestiniens susceptibles d’être libérés figurent 33 femmes, 123 garçons de moins de 18 ans et 144 jeunes hommes âgés d’environ 18 ans, originaires de Cisjordanie occupée ou de Jérusalem-Est.

Certains ont été condamnés, mais la plupart attendent leur procès pour des accusations allant d’incitation au jet de pierres à la tentative de meurtre, selon Jessica Montell, directrice de l’association israélienne de défense des droits humains Hamoked.

On compte aussi des femmes et des mineurs en détention administrative. « Ces personnes auraient déjà dû être libérées sans condition, donc cet accord […] est vraiment bienvenu ».

Israa Jaabis, 38 ans, est la prisonnière la plus connue de la liste. Elle a été condamnée à onze ans de prison pour avoir fait exploser une bonbonne de gaz dans sa voiture à un barrage en 2015, blessant un policier.

Après 47 jours de guerre à Gaza, sa sœur Mouna est partagée. « On essaie d’accepter l’idée que tous ces détenus soient libérés après que des milliers de personnes ont été tuées, mais c’est difficile et notre joie se mêle au sang versé ».