(Jénine) L’armée israélienne a annoncé mercredi la fin de son opération militaire en Cisjordanie occupée, dans laquelle 12 Palestiniens et un soldat israélien ont été tués, après avoir mené des frappes aériennes sur Gaza en « réponse à des tirs de roquettes ».

Cette opération lancée lundi, la plus importante depuis plusieurs années en Cisjordanie, a mobilisé des centaines de soldats ainsi que des drones et des bulldozers de l’armée dans la ville de Jénine et le camp de réfugiés adjacent, bastion de groupes armés palestiniens.  

« L’opération est officiellement terminée et les soldats ont quitté la région de Jénine », dans le nord de la Cisjordanie, a déclaré une porte-parole de l’armée. Des colonnes de blindés ont été vues quittant la ville.

Douze Palestiniens et un soldat israélien ont été tués au cours de l’opération. Cent Palestiniens ont été blessés, selon le ministère palestinien de la Santé.

Mercredi, des milliers de Palestiniens ont participé à Jénine aux funérailles de leurs proches tués. Certains ont tiré en l’air au passage des corps, dans des rues marquées par les stigmates des violences.

« Dans notre âme et notre sang, nous nous sacrifierons pour toi, martyr », criait la foule.

Les habitants inspectaient les destructions laissées dans le camp, les trous béants dans les maisons, les voitures écrasées, le sol recouvert de douilles et de verre brisé. Environ 3000 occupants de ce camp, sur un total de 18 000, ont fui à l’arrivée des soldats israéliens.

Dans la nuit de mardi à mercredi, cinq roquettes ont été tirées sur Israël depuis la bande de Gaza, autre territoire palestinien contrôlé par le mouvement islamiste Hamas, et interceptées, a indiqué l’armée israélienne.

Des avions de combat ont riposté en frappant « une usine souterraine de fabrication d’armes utilisée par l’organisation terroriste Hamas, ainsi qu’une usine de fabrication de matières premières pour les roquettes », selon l’armée.  

« Éradiquer le terrorisme »

La veille, un attentat à la voiture bélier a fait sept blessés à Tel-Aviv, attribué par la police à un « terroriste » habitant la Cisjordanie, qui a été abattu par un passant.  

Le Hamas a salué cette attaque, parlant « d’une première réponse aux crimes contre notre peuple dans le camp de Jénine ».

Mercredi, le Djihad islamique palestinien a salué une bataille « héroïque » à Jénine. « Jénine et son camp resteront une terreur qui vous hante », a déclaré le mouvement, s’adressant à Israël.

La ministre palestinienne de la Santé, Mai al-Kaila, a qualifié mardi soir l’opération israélienne « d’agression qui défie les lois internationales ».  

Deux expertes indépendantes de l’ONU ont estimé mercredi que « les frappes aériennes et les opérations terrestres » israéliennes dans le camp de réfugiés palestiniens de Jénine « peuvent à première vue constituer un crime de guerre ».

Ces « attaques ont été les plus violentes en Cisjordanie depuis la destruction du camp de Jénine en 2002 », ont déclaré dans un communiqué ces deux Rapporteures de l’ONU, dont le mandat est établi par le Conseil des droits de l’homme, mais qui ne s’expriment pas au nom de l’organisation.

« Les opérations des forces israéliennes en Cisjordanie occupée, qui tuent et blessent gravement la population occupée, détruisent leurs maisons et leurs infrastructures et déplacent arbitrairement des milliers de personnes, constituent des violations flagrantes du droit international et des normes relatives à l’usage de la force et peuvent constituer un crime de guerre », ont-ils assuré.

Selon ces expertes, les attaques israéliennes n’étaient pas justifiées au regard du droit international et « constituent une punition collective à l’encontre de la population palestinienne ».

Depuis le début de l’année, le conflit israélo-palestinien connaît un net regain de tensions après l’entrée en fonctions, fin décembre, d’un des gouvernements les plus à droite de l’histoire d’Israël, dirigé par le premier ministre Benyamin Nétanyahou.

Le nord de la Cisjordanie a connu une récente vague d’attaques contre des Israéliens ainsi que des violences anti-palestiniennes de la part de colons juifs. Jénine et le camp de réfugiés ont été visés à plusieurs reprises par des opérations israéliennes.  

Près de trois millions de Palestiniens vivent en Cisjordanie, territoire occupé par Israël depuis 1967. Environ 490 000 colons juifs y habitent aussi dans des colonies que l’ONU juge illégales au regard du droit international.

« Nous avons terminé ce matin notre opération, la plus importante en Judée-Samarie [nom donné par Israël à la Cisjordanie] depuis 20 ans et la mission a été accomplie avec succès […] grâce à cette opération, les vies de nombreux Israéliens ont été épargnées », a déclaré mercredi soir M. Nétanyahou.

« Si Jénine renoue avec le terrorisme, nous reviendrons à Jénine et cela arrivera plus vite et avec plus de force que ce qu’on imagine », a-t-il ajouté, dans une vidéo diffusée par son bureau.

Saisies d’armes

L’armée a indiqué mercredi avoir arrêté 30 suspects au cours de l’opération et confisqué des armes et de l’argent destinés à des activités terroristes.

« Nos soldats sont intervenus dans des dizaines de sites où des terroristes fabriquaient des munitions, des explosifs et différentes sortes d’armes », a déclaré le ministre israélien de la Défense, Yoav Gallant.

Au moins 190 Palestiniens ont été tués depuis le début de l’année dans les violences liées au conflit israélo-palestinien, ainsi que 26 Israéliens, une Ukrainienne et un Italien, selon un décompte de l’AFP établi à partir de source officielle.

Ces statistiques incluent, côté palestinien, des combattants et des civils parmi lesquels des mineurs, et côté israélien, en majorité des civils parmi lesquels des mineurs, et trois membres de la minorité arabe.