(Jérusalem) Le Parlement israélien a adopté mercredi une loi permettant de priver de leur nationalité des « personnes reconnues coupables de terrorisme » qui recevraient des fonds de l’Autorité palestinienne « en récompense » pour les actes ayant conduit à leur condamnation.

Cette nouvelle loi, qui étend les possibilités de déchoir quelqu’un de sa nationalité, permet au gouvernement israélien de révoquer pour les mêmes motifs les permis de résidence permanente accordés aux Palestiniens de Jérusalem-Est, partie orientale de la Ville sainte occupée et annexée par Israël.

Cette loi pourrait concerner plusieurs dizaines d’Arabes israéliens (Palestiniens ayant la nationalité israélienne) et des centaines de résidents de Jérusalem-Est condamnés en Israël, selon l’ONG israélienne de défense des droits civiques HaMoked.

« Frapper avec force »

Le texte avait été introduit au Parlement en décembre par une trentaine de députés, membres aussi bien de la coalition au pouvoir autour du premier ministre Benyamin Nétanyahou (droite) que de partis du centre.

M. Nétanyahou, qui détient le record de longévité pour un premier ministre en exercice, est revenu au pouvoir fin décembre à la faveur d’un accord de coalition liant son parti, le Likoud, à des partis d’extrême droite et des formations ultra-orthodoxes juives.

Adopté par 94 voix contre 10, le texte autorise « la déchéance de la nationalité [israélienne] et la révocation du permis de résidence d’une personne condamnée pour activités terroristes et qui reçoit des indemnités pour ses actes de terrorisme […] de l’Autorité palestinienne », indique un communiqué du Parlement.

L’Autorité palestinienne verse chaque mois des allocations aux familles de Palestiniens emprisonnés en Israël pour des attaques anti-israéliennes.

En vertu des dispositions existantes en cas de déchéance de la nationalité israélienne, les personnes qui seraient frappées par ces mesures pourront être expulsées vers les territoires sous contrôle de l’Autorité palestinienne en Cisjordanie ou vers la bande de Gaza, sous le contrôle du mouvement islamiste palestinien Hamas depuis 2007.

Pour la déchéance de la nationalité, une procédure judiciaire est prévue, à la demande du gouvernement, tandis que le retrait du permis de résidence dépend d’une décision ministérielle.

« Notre réponse au terrorisme est de le frapper avec force », a déclaré M. Nétanyahou sur Twitter après le vote de la loi.

« Citoyen sous conditions »

« Quand un Arabe commet un crime, il est citoyen sous conditions alors que si un Juif commet un crime, même plus grave, on n’envisage pas de lui retirer sa nationalité », a dénoncé pendant le débat le député arabe israélien Ahmed Tibi pour dénoncer cette loi.  

Le Parlement a également voté en lecture préliminaire un projet de loi visant à autoriser l’expulsion de membres de la famille d’un « terroriste » dans le cas où ces membres auraient soutenu ses actes ou s’ils avaient été tenus au courant avant et n’avaient pas dénoncé leur proche aux autorités.

En 2017, un tribunal a révoqué la nationalité d’un Arabe israélien auteur d’un attentat à la voiture bélier et d’attaques au couteau, dans une première application d’un amendement à la loi sur la nationalité votée en 2008.

Cet amendement fait en sorte que la demande de déchéance présentée par le ministère de l’Intérieur contre une personne impliquée dans des activités « terroristes » soit validée par une décision de justice.

À l’époque, l’organisation américaine de défense des droits de la personne Human Rights Watch avait indiqué qu’Israël avait privé de permis de résidence 15 000 Palestiniens de Jérusalem-Est depuis 1967 et prévenu que cette pratique pouvait relever du « crime de guerre ».

Israël avait aussi décidé en 2017 de déchoir de leur nationalité une vingtaine d’Israéliens ayant rejoint l’organisation djihadiste État islamique (EI).

En décembre 2022, Israël a expulsé l’avocat franco-palestinien Salah Hamouri, soupçonné par Israël de liens avec le Front populaire de libération de la Palestine (FPLP), une organisation jugée « terroriste » par Israël et l’Union européenne, après que la justice israélienne eut révoqué son statut de résident de Jérusalem-Est.

Paris avait condamné cette décision d’expulsion, la déclarant « contraire au droit ». Le Haut-Commissariat de l’ONU aux droits de l’Homme avait qualifié de son côté le procédé de « crime de guerre ».