(Jérusalem) Vainqueur des législatives du 1er novembre, l’ex-premier ministre israélien Benyamin Nétanyahou recevra officiellement dimanche le mandat pour former un nouveau gouvernement, qui pourrait être le plus à droite de l’histoire du pays, suscitant déjà des craintes localement et à l’international.

Au terme de trois jours de consultations avec les représentants des partis élus au Parlement, une majorité de députés, 64 sur un total de 120, ont recommandé au président Isaac Herzog de désigner M. Nétanyahou pour la formation d’un gouvernement, a annoncé la présidence dans un communiqué.

D’après cette source, 28 députés ont recommandé son rival, le centriste Yaïr Lapid, et 28 se sont abstenus.

M. Nétanyahou, par ailleurs inculpé pour corruption, sera convoqué dimanche à la présidence « pour qu’il accepte la tâche de former le gouvernement », a dit la présidence.

Il aura 28 jours pour mettre sur pied son équipe ministérielle, avec un supplément de 14 jours si nécessaire.

Déjà en poste de 1996 à 1999 et de 2009 à 2021, ce qui fait de lui le premier ministre le plus pérenne de l’histoire d’Israël, Benyamin Nétanyahou avait dès après l’annonce des résultats des élections commencé les discussions avec ses alliés en vue de la formation d’un gouvernement, qui pourrait être le plus à droite de l’histoire d’Israël.

Son parti, le Likoud, a obtenu 32 sièges à la Knesset, ses alliés ultra-orthodoxes 18 et l’alliance « Sionisme religieux » 14, un record pour l’extrême droite.

Or ces alliés lorgnent des portefeuilles ministériels éminents, ce qui a d’ores et déjà suscité des inquiétudes.

« Répugnante »

Chez les ultra-orthodoxes, le chef du parti séfarade Shass, Arieh Dery, revigoré par ses onze sièges, lorgne sur les Finances ou l’Intérieur, d’après la presse. M. Dery a été reconnu coupable de fraude fiscale en 2021 et avait auparavant été emprisonné pour corruption.

L’alliance d’extrême droite « Sionisme religieux » a réclamé le ministère de la Défense pour son chef Betzalel Smotrich alors qu’Itamar Ben Gvir, le numéro 2, voudrait le portefeuille de la Sécurité intérieure.

Selon des médias israéliens, le président Herzog, dont la fonction est avant tout symbolique, aurait tenté de convaincre le premier ministre sortant Yaïr Lapid et le ministre de la Défense Benny Gantz, des rivaux de M. Nétanyahou, de former avec lui un cabinet d’union pour éviter l’entrée au gouvernement de figures controversées comme Itamar Ben Gvir.

Le président a nié ces informations. Mais lors de son entretien avec ce ténor de l’extrême droite jeudi, il lui a déclaré recevoir « des questions de citoyens israéliens et des dirigeants du monde […] des questions très sensibles sur les droits humains ».

« Il y a une certaine image de vous et de votre parti qui semble, et je le dis en toute honnêteté, inquiéter à bien des égards », a dit M. Herzog au député Ben Gvir, notamment connu pour ses diatribes anti-Arabes.

M. Ben Gvir a participé à une cérémonie jeudi à Jérusalem en hommage au rabbin extrémiste Meir Kahane, dont le mouvement Kach a été banni en Israël après l’assassinat en 1994 de 29 Palestiniens en train de prier à Hébron, en Cisjordanie occupée, par un de ses sympathisants, Baruch Goldstein.

Washington a jugé « répugnante » sa participation à cette cérémonie.

Les États-Unis restent « préoccupés, comme nous l’avons déjà dit, par l’héritage laissé par Kahane Chai et l’usage persistant de rhétorique d’extrême droite », a déclaré le porte-parole du département d’État américain, Ned Price, appelant par ailleurs « toutes les parties à la retenue et à s’abstenir d’actions qui ne peuvent qu’exacerber les tensions ».

Les législatives du 1er novembre étaient les cinquièmes en trois ans et demi en Israël, un pays divisé politiquement qui peine à accoucher de coalitions ou les maintenir.

Face à Benyamin Nétanyahou, le bloc de l’actuel premier ministre Yaïr Lapid a obtenu 54 sièges.