(Beyrouth) Une députée libanaise a pu récupérer mercredi une partie de ses économies pour payer une opération chirurgicale, après un sit-in à la banque où ses avoirs sont bloqués, comme la plupart de la population dans ce pays ravagé par une crise économique inédite.

Les banques avaient rouvert fin septembre avec des mesures de sécurité draconiennes après avoir fermé pendant une semaine en raison d’une série de braquages commis par des clients voulant retirer leurs économies bloquées depuis trois ans.

Cynthia Zarazir s’était rendue en matinée dans une banque de la banlieue nord de Beyrouth, accompagnée de deux avocats membres d’un groupe de soutien aux épargnants, tandis que des militants se rassemblaient devant l’établissement pour la soutenir.

Selon l’agence nationale d’information ANI, Mme Zarazir a quitté la banque dans l’après-midi après avoir reçu 8500 dollars américains (environ 8600 euros).

Fouad Debs, un avocat accompagnant la parlementaire, a expliqué à l’AFP qu’elle avait besoin de cette somme pour payer une opération chirurgicale qui n’est pas couverte par son assurance maladie.

Depuis trois ans, les banques imposent de strictes restrictions, empêchant les clients de retirer leurs économies, en particulier en dollars, ou d’effectuer des virements vers l’étranger.

Quelques heures après le sit-in de Mme Zarazir, un policier à la retraite a fait irruption dans une banque de la banlieue sud de Beyrouth, réclamant ses indemnités de fin de service.

Hussein Chokr a pu finalement récupérer près de 270 millions de livres, une somme qui représentait environ 180 000 dollars avant la crise et qui équivaut aujourd’hui près de 7000 dollars du fait de l’effondrement de la monnaie nationale. Il a également réussi à obtenir 3000 dollars, selon un porte-parole de l’association des épargnants qui l’accompagnait.

Mardi, un diplomate à la retraite et consul honoraire d’Irlande, Georges Siam, avait observé un sit-in dans une banque de la banlieue de Beyrouth pour récupérer ses économies avant de parvenir à un compromis avec l’établissement en soirée.

« On veut notre argent »

Dans le même temps, plusieurs clients armés avaient braqué des banques mardi, notamment un policier retraité qui exigeait de transférer de l’argent à son fils étudiant en Ukraine et privé de fonds.

L’homme a été arrêté sans obtenir gain de cause.

Les banques avaient fermé pendant une semaine après une série de braquages spectaculaires le 16 septembre, avant leur réouverture avec des mesures de sécurité renforcées pour tenter d’éviter la répétition de tels incidents.

En réaction à la nouvelle vague de braquages, l’Association des banques du Liban (ABL) s’est défendue mardi en accusant dans un communiqué l’État et la Banque centrale d’avoir contribué au « tarissement » des économies des épargnants.

« La chose la plus dangereuse que le secteur public ait faite est d’avoir […] mis la main sur les épargnes » du secteur privé, affirme le communiqué.  

À Beyrouth, plusieurs dizaines d’épargnants se sont rassemblés mercredi matin devant la Banque centrale contre les restrictions « injustes », selon un journaliste de l’AFP.

PHOTO BILAL HUSSEIN, ASSOCIATED PRESS

À Beyrouth, plusieurs dizaines d’épargnants se sont rassemblés mercredi matin devant la Banque centrale contre les restrictions « injustes ».

Les manifestants ont jeté des bouteilles vides sur le bâtiment et mis le feu à des pneus, au milieu d’un important déploiement de l’armée.

« On est venu réclamer nos droits, ça fait trois ans qu’on attend et on n’a toujours pas de solution », s’est insurgé Houssam Machmouchi, 42 ans. « On n’est pas des mendiants, on veut juste notre argent », a-t-il ajouté.