(Doha) Les États-Unis et les talibans, au pouvoir en Afghanistan, doivent discuter jeudi à Doha d’un mécanisme permettant de débloquer des fonds après un séisme meurtrier dans le pays, Washington cherchant à s’assurer qu’ils sont utilisés à des fins humanitaires.

La Maison-Blanche a dit travailler « en urgence » sur le dossier, mais un membre de la Banque centrale afghane a estimé que parvenir à un accord prendrait du temps.

Le ministre taliban des Affaires étrangères, Amir Khan Muttaqi, est arrivé mercredi dans la capitale du Qatar avec des responsables du ministère des Finances et de la banque centrale, a indiqué sur Twitter le porte-parole du ministère des Affaires étrangères des talibans, Hafiz Zia Ahmed.

Ils échangeront avec le représentant spécial des États-Unis pour l’Afghanistan, Tom West, a confirmé mercredi le département d’État américain. Washington souhaite aborder toute une série de points, notamment les questions des droits de la personne et de l’éducation des filles, a-t-on ajouté de même source.

« Aucun de ces engagements ne doit être vu comme la “légitimation” des talibans ou de leur soi-disant gouvernement, mais sont le simple reflet d’une réalité : nous devons mener de telles discussions afin de soutenir les intérêts américains », a déclaré un porte-parole de la diplomatie américaine, qui ne reconnaît pas le gouvernement taliban.

Après la prise du pouvoir par les taibans en août 2021, Washington avait saisi en février sept milliards de dollars de réserves de la banque centrale afghane déposés aux États-Unis.

Joe Biden souhaitait que la moitié de cette somme soit réservée à l’indemnisation des familles de victimes des attentats du 11 septembre 2001 aux États-Unis et l’autre moitié à de l’aide humanitaire à l’Afghanistan, mais versée de manière à ce que l’argent ne tombe pas aux mains des talibans.  

Or le pays, déjà touché par une crise économique sévère, a été frappé la semaine dernière par un séisme d’une magnitude de 5,9 dans l’est du pays, faisant plus de 1000 morts et des milliers de sans-abri.

« Nous travaillons ardemment afin de résoudre des questions difficiles sur l’utilisation de ces fonds, pour nous assurer qu’ils bénéficient au peuple afghan et non aux talibans », a déclaré la semaine dernière Karine Jean-Pierre, la porte-parole de la Maison-Blanche.

« Déblocage limité et contrôlé »

Un membre du conseil d’administration de la Banque centrale d’Afghanistan a confirmé mercredi à l’AFP que des négociations étaient en cours, mais a prévenu que cela pourrait prendre encore un peu de temps.

« Les détails du mécanisme de transfert des réserves à la banque centrale n’ont pas été finalisés », a affirmé Shah Mehrabi, également professeur d’économie au Montgomery College dans le Maryland (est des États-Unis).

« Cela va prendre du temps, ce genre de choses ne se fait pas du jour au lendemain ».

Pour M. Mehrabi, 3,5 milliards de dollars des réserves devraient être rendus à la Banque centrale afghane. Il propose pour sa part « un déblocage limité et contrôlé des réserves, comme 150 millions par mois pour payer des importations ».

Une telle mesure aiderait à soutenir la devise afghane, stabiliser les prix et permettre aux Afghans de se procurer des produits de base comme du pain, de l’huile, du sucre ou encore du carburant, explique l’économiste.

L’utilisation des fonds « peut être contrôlée et auditée de manière indépendante par des cabinets d’audit externe avec la possibilité d’y mettre fin en cas d’utilisation abusive », affirme M. Mehrabi à l’AFP.

Selon le Haut Commissariat des Nations unies pour les réfugiés, 24 millions d’Afghans, soit plus de la moitié de la population du pays, ont besoin d’une aide humanitaire d’urgence.