(Beyrouth) Le juge chargé de l’enquête sur l’explosion dévastatrice l’an passé au port de Beyrouth a lancé un mandat d’amener à l’encontre de l’ancien premier ministre, Hassan Diab, après son refus de se présenter jeudi à un interrogatoire.

M. Diab avait été inculpé début juillet avec trois anciens ministres. Pour le prochain interrogatoire fixé au 20 septembre, le juge Tarek Bitar a ainsi chargé les forces de sécurité de l’interpeller, selon la même source.

L’explosion le 4 août 2020 de plusieurs centaines de tonnes de nitrate d’ammonium, stockées depuis des années au port « sans mesure de précaution » de l’aveu même des autorités, a fait 214 morts et plus de 6500 blessés, dévastant des quartiers entiers de la capitale.

En juillet, le juge Bitar avait demandé au Parlement la levée de l’immunité de trois députés qui ont occupé des postes de ministres, « en vue d’intenter des poursuites pour potentielle intention d’homicide » et « négligence et manquements ».

Le Parlement a refusé jusqu’ici de lever l’immunité des parlementaires concernés, tandis que le ministre de l’Intérieur n’a pas autorisé M. Bitar à interroger le directeur de la Sûreté générale, Abbas Ibrahim.

La classe dirigeante est accusée de tout faire pour torpiller l’enquête et éviter des inculpations et Amnistie internationale a accusé le 2 août les autorités libanaises de faire barrage sans scrupules à l’enquête.

La décision jeudi du juge Bitar — qui fait l’objet d’accusations de « politisation » de l’enquête notamment par le puissant parti chiite pro-Iran Hezbollah —, intervient au lendemain d’une lettre envoyée par la direction du Conseil des ministres arguant « d’obstacles constitutionnels » pour justifier la décision de M. Diab de ne pas assister à la séance d’interrogatoire.  

Dans une déclaration commune, les anciens premiers ministres ont dénoncé jeudi soir la démarche du juge Bitar, la considérant comme un « précédent dangereux et une mesure non innocente qui porte atteinte à la position du premier ministre ».

Après avoir catégoriquement rejeté une enquête internationale, les autorités libanaises ont dessaisi de ses fonctions le premier juge chargé de l’affaire, Fadi Sawan, après l’inculpation de hauts responsables.  

Hassan Diab avait démissionné quelques jours après l’explosion, mais continue depuis d’assumer ses fonctions de premier ministre chargé de la gestion des affaires courantes, faute de la formation d’un nouveau gouvernement dans ce pays en plein marasme politique et économique.