Les États-Unis ont envoyé ces derniers jours en Afghanistan une brigade de soldats expérimentés chargés de mieux former leurs collègues afghans pour la lutte contre les talibans, dans ce conflit vieux de 17 ans.

Mais les experts sont sceptiques sur les chances de réussite des unités de Security Force Assistance Brigade (SFAB), qui regroupent ces «instructeurs» aguerris, même s'ils ont déjà été déployés à plusieurs reprises, parlent pachtoune ou dari, et sont tous volontaires.

«Ils sont là parce qu'ils sont passionnés par la mission», déclare à l'AFP le commandant Tom Gresback, un porte-parole de la coalition de l'OTAN à Kaboul.

Les États-Unis et l'OTAN ont déjà tenté à plusieurs reprises de former l'armée afghane, mais elle reste minée par la corruption, un taux de désertion massif et un taux de mortalité très élevé. Le Pentagone enquête sur des dizaines de cas de violations grossières des droits de l'Homme dans les rangs des services de sécurité afghans, y compris des viols de mineurs.

La différence entre les «instructeurs» des SFAB et les tentatives précédentes réside dans le fait qu'ils seront plus proches de leurs collègues afghans, plus près de la ligne de front, et qu'ils prendront donc plus de risques.

Ils aideront les soldats afghans à acquérir plus de compétences dans le maniement des armes et des médecins militaires les formeront à la médecine de guerre.

Résultats désastreux

Des équipes d'une dizaine de soldats se joindront ainsi à l'armée afghane au niveau du «Kandak», l'équivalent afghan du bataillon avec 300 à 400 hommes, et se déploieront dans tout l'Afghanistan, y compris dans la province du Helmand, place forte des talibans qui contrôlent la majorité de ce territoire.

Jusque-là, le travail de formation de l'armée afghane s'est largement limité à des commandos de l'OTAN ou des États-Unis envoyés auprès des Forces spéciales afghanes. Ces missions ont cessé fin 2014, lorsque l'OTAN a réduit ses effectifs en Afghanistan.

La formation est revenue aux Afghans eux-mêmes, avec des résultats désastreux: des milliers de morts chaque année et une résurgence des talibans.

Un rapport officiel américain a vertement critiqué les militaires américains pour leur manque flagrant de préparation à la formation de troupes étrangères. Dans un cas cité dans le rapport de l'Inspecteur général pour la reconstruction afghane (SIGAR), un officier s'était inspiré de séries américaines pour savoir ce qu'il était censé enseigner à ses collègues afghans.

Pour Bill Roggio, un expert de l'Afghanistan au centre de recherche Foundation for Defense of Democracies, le déploiement des SFAB est un pas dans la bonne direction, même s'il devrait avoir un impact limité.

«Est-ce que ça va améliorer les choses à la marge ou faire une réelle différence, est-ce que (les Afghans) seront capables de stopper les gains des talibans ou de les vaincre ? Je suis sceptique», dit-il à l'AFP.

Le commandement américain affirme que les SFAB, associés à une campagne de frappes aériennes plus active et une stratégie régionale plus large, incluant le Pakistan, aideront les Afghans à repousser les talibans.

«J'ai vu le programme d'entraînement», a déclaré récemment le ministre américain de la Défense, Jim Mattis. «La qualité de ces troupes, en termes d'expérience et de sélection, et leur formation, me rendent très confiant».

Les États-Unis évaluent à 64 % la proportion de la population afghane contrôlée par le gouvernement de Kaboul, 12 % les Afghans sous le contrôle des talibans, le reste vivant dans des zones dites «contestées».