Israël a annoncé mardi l'arrestation d'un second humanitaire palestinien accusé de s'être mis au service du Hamas dans la bande de Gaza, jetant le soupçon sur l'utilisation de l'aide internationale dans le territoire dévasté dirigé par le mouvement islamiste.

L'arrestation de Wahid Borsh est la deuxième annoncée par Israël en moins d'une semaine après celle du directeur à Gaza de World Vision.

Ce n'est plus cette fois la grande ONG chrétienne américaine World Vision qui est sous la loupe israélienne, mais le Programme des Nations unies pour le développement (Pnud), et à travers lui toute l'activité onusienne. Le gouvernement israélien a laissé entendre que ces arrestations pourraient ne pas être les dernières.

Wahid Borsh, 38 ans et originaire de Jabalia (nord de la bande de Gaza), a été arrêté le 16 juillet dans des circonstances non précisées, et a été inculpé mardi, a indiqué la sécurité intérieure israélienne dans un communiqué publié par le gouvernement.

Ingénieur employé depuis 2003 par le Pnud et travaillant à la démolition des bâtiments endommagés au cours des conflits successifs dans la bande de Gaza, il est accusé de «s'être servi de son poste pour fournir une assistance matérielle aux activités terroristes et militaires du Hamas», dit le Shin Beth.

Israël et le Hamas se sont livré trois guerres dans l'enclave palestinienne depuis 2008 et restent en état de guerre larvée sur leur frontière.

Des gravats déroutés

Si le Hamas dirige sans partage la bande de Gaza, Israël en contrôle les frontières (sauf celle du sud fermée quasiment en permanence avec l'Égypte) et soumet le territoire à un strict blocus.

Deux tiers des 1,9 million de Palestiniens qui vivent entassés sur un territoire exigu en proie à une crise humanitaire chronique sont tributaires d'une aide étrangère dont l'acheminement dépend à la fois d'Israël et du Hamas, ennemis l'un pour l'autre.

Approché par un haut responsable de la branche du Hamas, Wahid Borsh avait accepté que les camions évacuant les gravats pour le Pnud les déchargent sur le chantier de construction d'une jetée destinée aux activités navales du Hamas, selon son acte d'inculpation.

Autres incriminations rapportées par le Shin Beth, mais ne figurant pas dans l'acte d'inculpation: interventions auprès de responsables du Pnud pour qu'ils donnent la priorité à des secteurs habités par des membres du Hamas, ou partage de l'information avec le Hamas quand des travaux de réhabilitation du Pnud mettaient au jour des armes ou des tunnels à vocation militaire.

Israël avait annoncé la semaine passée l'arrestation le 15 juin du directeur à Gaza de l'ONG World Vision, Mohammed Halabi. Les services israéliens l'accusent d'avoir détourné chaque année 7,2 millions de dollars (6,5 millions d'euros) pour le Hamas et sa branche armée.

Les autorités israéliennes ont vu dans ces deux dossiers la confirmation de ce qu'elles disent depuis longtemps.

«Tendance inquiétante»

«Il ne s'agit pas d'un cas isolé, mais d'une tendance inquiétante à l'exploitation systématique des organisations onusiennes par les terroristes du Hamas», a déclaré dans un communiqué l'ambassadeur d'Israël aux Nations unies, Danny Danon.

Selon le Shin Beth, Wahid Borsh a dit que d'autres humanitaires palestiniens servaient aussi le Hamas.

Les Nations unies doivent écarter tous leurs employés travaillant en même temps pour le Hamas, couper tous les ponts avec des organisations qui le soutiennent et mettre en place de vigoureux mécanismes de contrôle, a estimé Danny Danon.

Comme dans le cas de World Vision, un porte-parole du Hamas, Hazem Qassem, a jugé les nouvelles accusations israéliennes «dénuées de fondement» et participantes d'un plan visant à «étouffer la bande de Gaza».

World Vision a dit prendre les accusations très au sérieux. Mais, sans s'exprimer sur la responsabilité de son directeur, elle a jugé irréalistes les chiffres avancés par Israël pour le mettre en cause.

L'arrestation du directeur de World Vision a cependant suscité l'émoi et des interrogations parmi les nombreuses organisations intervenant à Gaza et dans la communauté des pays donateurs qui les financent.

Elles s'inquiètent des répercussions sur leurs activités alors qu'entre Israël et le Hamas, leur tâche est déjà ardue. L'Allemagne et l'Australie ont déjà annoncé suspendre leur aide à World Vision.