Le premier ministre israélien Benyamin Nétanyahou a affirmé samedi que la reprise des négociations avec les Palestiniens est dans l'intérêt «vital» d'Israël, au lendemain de l'annonce par le secrétaire d'État américain John Kerry d'un accord dans ce sens.

Au bout de sa sixième mission dans la région et quatre jours d'intense activité diplomatique, M. Kerry a arraché aux Israéliens et aux Palestiniens un accord ouvrant la voie à une reprise des pourparlers de paix, abandonnés depuis trois ans.

«La reprise du processus de paix est dans l'intérêt stratégique de l'État d'Israël», a dit M. Nétanyahou dans un communiqué. «Il est en soi important de tenter de mettre fin au conflit entre nous et les Palestiniens, et il est important en raison des défis auxquels nous sommes confrontés, en particulier l'Iran et la Syrie».

Plus tôt, des responsables israéliens avaient annoncé la prochaine libération de prisonniers palestiniens à la suite de l'accord dans un geste de bonne volonté.

«Il y aura un nombre limité de libérations de prisonniers», a déclaré le ministre des Relations internationales, Youval Steinitz, soulignant que cette mesure bénéficierait à des Palestiniens détenus depuis avant les accords de paix d'Oslo de 1993, une exigence centrale du président palestinien Mahmoud Abbas.

Le ministre Steinitz a néanmoins affirmé qu'aucun accord n'avait été conclu sur un gel de la colonisation ou une référence aux lignes de 1967, principales revendications palestiniennes.

De leur côté, les dirigeants palestiniens se sont engagés à «négocier sérieusement» au moins neuf mois, pendant lesquels ils continueraient à s'abstenir de toute démarche d'adhésion à des organisations internationales, y compris aux instances judiciaires habilitées à poursuivre Israël, a affirmé M. Steinitz.

M. Kerry a annoncé à Amman un accord «qui établit la base d'une reprise des négociations», sans plus de détails, renvoyant à des discussions la semaine prochaine à Washington avec le négociateur palestinien Saëb Erakat et la ministre israélienne responsable de ce dossier Tzipi Livni.

Les dernières négociations de paix ont très rapidement achoppé sur la poursuite de la colonisation israélienne à Jérusalem-Est et en Cisjordanie.

Mme Livni a assuré samedi à la chaîne-2 privée qu'il n'y avait pas de conditions préalables et que «tout sera sur la table» des négociations, y compris les frontières de 1967 et Jérusalem-Est dont les Palestiniens veulent faire la capitale de leur futur État.

La chef du parti travailliste et de l'opposition, Shelly Yachimovich, a salué «une occasion importante», laissant entendre qu'elle serait prête à rejoindre le gouvernement de M. Nétanyahou en cas de défection de ses alliés hostiles à la création d'un État palestinien.

Pas d'État binational

M. Nétanyahou a en outre affirmé qu'Israël voulait «empêcher (l'établissement d') un État binational (...) qui menacerait l'avenir de l'État juif, et l'établissement à l'intérieur de nos frontières d'un autre État terroriste parrainé par l'Iran.»

«J'insisterai sur les exigences d'Israël sur le plan de la sécurité et ses intérêts vitaux», a insisté M. Nétanyahou.

La présidence palestinienne a salué l'accord annoncé par M. Kerry avec circonspection, prévenant qu'il «restait des détails spécifiques à régler».

À Gaza, le Hamas a rejeté «la reprise des négociations», réaffirmant que «M. Abbas n'a aucune légitimité pour négocier au nom du peuple palestinien sur des questions fondamentales».

D'autres mouvements palestiniens étaient également sceptiques.

«Retourner aux négociations hors du cadre de l'ONU et de leurs résolutions reviendrait à un suicide politique», a prévenu le Front populaire de libération de la Palestine (gauche nationaliste).

«L'expérience de vingt ans de négociations suffit pour prouver que c'était une erreur de signer les accords d'Oslo avant un arrêt de la colonisation, le nombre de colons dans les territoires occupés étant passé depuis de 150 000 à 600 000», relève le mouvement du député indépendant Moustapha Barghouthi.

Des observateurs se montraient également critiques, soulignant les zones d'ombre de l'accord.

«C'est un gâteau à moitié cuit que Kerry a sorti du four. Il a convaincu les Israéliens et les Palestiniens qu'il était comestible, et les deux parties ont accepté de le manger», a résumé le commentateur politique de la radio publique israélienne.

Un autre souligne qu'«il ne s'agit toujours pas d'une rencontre au niveau des dirigeants».