Le puissant lobby des colons israéliens voit son poids renforcé dans le nouveau gouvernement de Benyamin Nétanyahou, qui va prêter serment lundi, nombre de portefeuilles clé étant attribués à d'ardents promoteurs de la colonisation.

Après six semaines d'âpres négociations, le Premier ministre a réussi à mettre sur pied un gouvernement très ancré à droite, dont les analystes prédisent qu'il se traduira par «un renforcement considérable du pouvoir des colons.»

Bien que la nouvelle coalition comprenne les mouvements centristes Yesh Atid (19 sièges) et HaTnuah (6), ouverts à un règlement de paix avec les Palestiniens, elle est largement dominée par des tenants de la droite nationaliste et/ou religieuse: l'alliance Likoud-Israël Beiteinou (31) et le Foyer Juif (12) très proche des colons.

«La plupart des positions clé vont être attribuées à des colons et à ceux qui les soutiennent», relève Barak Ravid dans le quotidien de gauche Haaretz, expliquant que cela revenait à «faire entrer le renard dans le poulailler».

Selon les accords de coalition signés vendredi, le ministère de la Défense et celui du Logement, qui jouent tous les deux un rôle crucial dans l'approbation des constructions dans les colonies, ont été attribués à des partisans déclarés de l'expansion des implantations.

Le likoudnik et ex-général Moshé Yaalon, nouveau patron de la Défense, est connu pour son soutien aux colons et sa farouche opposition à tout gel de la construction.

Son collègue du Logement, Uri Ariel, N° 2 du Foyer juif, qui habite une colonie de Cisjordanie, est quant à lui totalement opposé à la création d'un Etat palestinien.

«Ca démarre bien avec le Likoud et le Foyer juif (...) Nous espérons que cela se traduira par un développement supplémentaire des implantations de Judée-Samarie», s'est félicité Avi Roeh, le nouveau président du Conseil de Yesha, organisme représentant les colons de Cisjordanie, sur le site d'information Ynet.

L'ONU inquiète

Le coordinateur spécial de l'ONU pour le processus de paix au Proche-Orient, Robert Serry a récemment fait part de son inquiétude face à la nomination du faucon Uri Ariel.

«Si cette nomination se traduit par une vague de nouvelles constructions dans les colonies, son but aura été de détruire toute chance de parvenir à un compromis et à la paix entre les deux peuples (palestinien et israélien)», a-t-il averti.

Le mouvement anti-colonisation La Paix Maintenant n'est guère plus rassuré.

«Le ministre du Logement détient un rôle important dans la construction des colonies et peut créer des faits accomplis sur le terrain», explique à l'AFP Hagit Ofran, la spécialiste du dossier au sein de l'ONG.

«N'oublions pas que ses électeurs sont les colons et qu'il vit lui-même dans une colonie», observe-t-elle.

Le Foyer juif, mené par un jeune entrepreneur, Naftali Bennett, qui a modernisé l'image de la droite nationale-religieuse, va également contrôler la puissante commission parlementaire des Finances, qui joue un rôle capital dans la distribution des budgets.

Toutes les autorisations de construction en Cisjordanie doivent recevoir l'aval du ministère de la Défense et la présence de Moshé Yaalon à la tête du ministère rassure la direction des colons et inquiète ses détracteurs.

«Yaalon est très proche des colons», relève Hagit Ofran, rappelant qu'il avait qualifié La Paix Maintenant de «virus» en raison de l'activisme de son mouvement.

Pourtant, certains restent prudents, comme Guershon Messika, président du Conseil régional de Samarie, qui administre plus de 30 colonies: «Yaalon à la défense et Ariel au Logement, ça ressemble à un rêve mais on ne peut jamais savoir de quoi l'avenir sera fait».

«Quand Ariel Sharon a été élu, nous avons fait la fête et on sait ou ça nous a menés», souligne-t-il, faisant allusion au retrait unilatéral de la bande de Gaza en 2005 et au démantèlement des 21 colonies juives de ce territoire.