Le ministre israélien des Affaires étrangères Avigdor Lieberman a officiellement présenté sa démission dimanche dans l'espoir de revenir au pouvoir, à la faveur des élections législatives du 22 janvier, après son procès pour fraude et abus de confiance.

«Je quitte le gouvernement provisoirement. Je pense que l'interruption sera très brève. Je souhaite que mon procès soit rapide», a déclaré M. Lieberman à la presse, en faisant allusion à un éventuel accord négocié avec le parquet, avant de remettre au premier ministre Benjamin Netanyahu sa lettre de démission qui prendra effet mardi matin.

«Je ne suis pas inquiet. Mon seul souci est de pouvoir être actif dans la campagne électorale», a souligné le chef de la diplomatie israélienne.

M. Lieberman, 54 ans, a été mis en examen jeudi pour «fraude et abus de confiance» après avoir obtenu une promotion pour un ancien ambassadeur au Belarus qui lui avait fourni des renseignements confidentiels sur une enquête menée contre lui.

S'il n'est plus ministre, M. Lieberman reste député, chef du parti ultra-nationaliste Israël Beiteinou et numéro deux de la liste électorale commune élaborée avec le Likoud (droite) de M. Netanyahu, donnée largement favorite dans les sondages.

Jeudi, après l'annonce de son inculpation, ce politicien populiste, connu pour ses excès de langage, s'était gaussé des trois dirigeantes de l'opposition, la travailliste Shelly Yachimovich, la centriste Tzipi Livni et Zehava Galon, à la tête de la gauche laïque, qui exigeaient sa démission, en les qualifiant de «weibers» («bonnes femmes» en yiddish).

Il s'est excusé dimanche sur sa page Facebook.

«Je ne pensais pas qu'une petite blague ferait autant de bruit. Je présente mes sincères excuses», a-t-il écrit.

Mais en renonçant à son portefeuille ministériel, Avigdor Lieberman a finalement coupé l'herbe sous le pied de ces opposantes, qui font campagne sur des thèmes économiques et sociaux, alors que selon un sondage publié dimanche, 78% des Israéliens s'inquiètent de la corruption au sein du pouvoir.

Pari risqué

«Je ne doute pas de l'issue du prochain scrutin», a affirmé dimanche M. Lieberman, qui cède son fauteuil à M. Netanyahu jusqu'à la formation du gouvernement issu de la prochaine majorité parlementaire.

De l'avis général, le chef d'Israël Beiteinou a fait le pari d'un arrangement négocié avec le parquet pour s'assurer une rapide remise en selle.

«Il s'en va pour revenir... Il a compris que pour pouvoir être membre du prochain cabinet, il devait au plus vite se débarrasser des accusations portées contre lui», a analysé le quotidien populaire Yédiot Aharonot.

«Lieberman cherche à conclure un arrangement rapide et accommodant (avec la justice) qui le dégagera pratiquement de toutes les charges pesant sur lui et lui permettra de revenir au gouvernement d'ici quelques mois en choisissant le portefeuille qui lui conviendra», a pronostiqué le quotidien Haaretz en mentionnant la Défense, les Affaires étrangères ou les Finances.

En Israël, plus des deux tiers des affaires judiciaires se règlent par des accords négociés entre l'accusé et le parquet, relève le journal de gauche.

Toutefois, M. Lieberman doit éviter de recevoir une peine assortie de «turpitude morale», une mention infamante qui interdit à la personne condamnée d'entrer au gouvernement moins de sept ans après l'avoir purgée. En revanche, cette mention n'interdit pas de postuler pour un siège au Parlement.

Le pari d'un procès bouclé avant le 22 janvier n'est pourtant pas gagné d'avance, estime Suzie Navot, professeure de droit public dans une tribune publiée par le quotidien Maariv: «Il s'agit d'une affaire complexe et il est peu probable que le tribunal accepte de modifier son calendrier pour accélérer la procédure», prédit-elle.