En septembre, des milliers de Palestiniens ont écouté, les larmes aux yeux, le discours du président de l'Autorité palestinienne devant l'ONU. Toutes les personnes questionnées par La Presse connaissaient l'improbabilité d'obtenir un État avec cette demande d'adhésion à l'organisme. Mais l'action apportait un peu d'espoir. Près d'un an plus tard, les Palestiniens semblent désabusés. Leur demande à l'ONU n'a jamais abouti. Les pourparlers de paix sont au point mort depuis trois ans. La construction dans les colonies continue. Le gouvernement intérimaire promis après une entente de réconciliation signée par les dirigeants de la bande de Gaza et de la Cisjordanie - jugée nécessaire à la création d'un pays incluant les deux territoires - n'a jamais vu le jour.

«Ce ne sera jamais possible d'avoir un vrai pays indépendant, jamais, tranche Nabil Shourka, retraité de Bethléem. Il n'y a pas de solution. Ni l'Autorité palestinienne ni Israël ne font quoi que ce soit pour que ça change. J'aimerais voir la paix, avoir un État - sur n'importe quelle frontière -, mais c'est très difficile.»

Plus de 60% des Israéliens et des Palestiniens croient que les chances d'établir un État palestinien aux côtés d'Israël dans les cinq prochaines années sont basses ou inexistantes, selon un sondage publié en mars dernier et mené conjointement par le Harry S. Truman Research Institute for the Advancement of Peace, à Jérusalem, et le Palestinian Center for Policy and Survey Research, à Ramallah. Mais l'échec de la création d'un État palestinien ne signifie pas pour autant la mise sur pied d'un État binational. Même si près de la moitié des Israéliens estime que la solution des deux États est vouée à l'échec, une majorité d'entre eux s'oppose à un État unique où tous auraient les mêmes droits, selon le même sondage. Un pays qui engloberait tous les Palestiniens et Israéliens risquerait de perdre rapidement son caractère juif. La solution est aussi impopulaire chez les Palestiniens. Le président de Yesha, principale organisation de colons israéliens, s'oppose fermement à la solution à deux États, qu'il qualifie de «mirage». «Mais ça ne veut pas dire que la solution est un seul État, dit Dani Dayan. Il n'y a simplement pas de solution possible en ce moment.»

Les Palestiniens et les colombes israéliennes redoutent le maintien du statu quo, qui se fait notamment au détriment de la population civile palestinienne. Plus le temps passe, plus la mise en oeuvre d'une solution sera difficile, estiment-ils. Des artisans des accords d'Oslo, qui ont permis la mise sur pied de l'Autorité palestinienne et qui devaient aboutir à la création d'un État palestinien, dressent un constat d'échec. Yossi Beilin, un des architectes israéliens des accords, a déploré que les «extrémistes» des deux côtés profitent de l'entente qui devait être temporaire pour «faire ce qu'ils veulent, en perpétuant la situation plutôt qu'en aboutissant à la solution». Dans une lettre ouverte, il a appelé à la dissolution de l'Autorité palestinienne, en demandant à son président de mettre un terme à cette «farce». «L'Autorité palestinienne s'occupe de ramasser l'argent, des questions de santé et d'éducation, de coopérer sur le plan de la sécurité et c'est très pratique pour la droite en Israël, souligne l'ancien politicien travailliste, qui est maintenant consultant, dans une entrevue téléphonique. Mon idée est que l'Autorité palestinienne dise: O.K., l'accord intérimaire n'était pas pour toujours, merci, soyez notre gentil occupant et occupez-vous maintenant de toutes ces questions. Israël serait forcé de se questionner sur les actions à prendre.» Même si le président de l'Autorité palestinienne Mahmoud Abbas a déjà brandi cette menace, il est jugé improbable qu'il la mette à exécution.