Les gouvernements afghan et américain sont parvenus à un accord sur les raids nocturnes, très contestés par Kaboul, qui seront désormais sous responsabilité afghane, a-t-on appris dimanche auprès du gouvernement afghan.

«Quand il y aura besoin de faire un raid nocturne», une entité composée de forces afghanes et de l'OTAN «décidera», «la décision finale revenant aux Afghans», qui «détermineront s'il y a besoin d'étrangers» durant ces raids, a expliqué à l'AFP Aimal Faizi, le porte-parole du président Hamid Karzaï.

Les opérations nocturnes de la coalition contre les domiciles afghans sont depuis longtemps un sujet de friction entre le chef de l'État afghan et ses alliés de l'OTAN, qui portent à bout de bras son fragile gouvernement face à l'insurrection talibane depuis dix ans.

Ces raids, et les pertes civiles attribuées à l'Isaf, irritent fortement la population et alimentent le ressentiment antioccidental, l'intimité familiale, une valeur extrêmement importante en Afghanistan, étant notamment mise à nu durant ces opérations.

D'après le document signé dimanche, les forces spéciales afghanes dirigeront les missions. Seules les forces afghanes pourront entrer de nuit dans les maisons, mais elles pourront bénéficier du «soutien des forces américaines» «si requis ou demandé».

Le rôle des troupes étrangères dans ces opérations peut inclure «le partage de renseignements, le soutien aérien ou d'autres technologies modernes», a expliqué Aimal Faizi.

Le ministre de la Défense afghan, Abdul Rahim Wardak, lors de la signature de l'accord, à effet immédiat, l'a qualifié de «pas fondamental vers la souveraineté nationale afghane».

Le général John Allen, qui commande l'Isaf, la force armée de l'OTAN en Afghanistan, l'a décrit comme «le deuxième évènement clé en moins de 30 jours vers la souveraineté afghane», alors qu'un accord sur le transfert de détenus sous contrôle afghan a récemment été signé.

Nombre d'experts du pays soulignent les effets contre-productifs des raids nocturnes, car ils attisent la colère antioccidentale des civils, en plus de mettre leur vie en danger.

«Ils ont attaché nos mains et nous ont battus devant nos femmes. C'était un déshonneur», a raconté Haji Marjan, 54 ans, qui affirme que sa maison de la province de Kandahar, un bastion taliban, a été perquisitionnée par des troupes américaines, et son frère tué.

Les militaires «afghans connaissent notre culture. Ils coordonneront les opérations avec la population», a commenté cet homme, qui s'est dit «heureux» de l'accord signé dimanche.

Quelque 2.200 raids nocturnes ont été réalisés en 2011, a indiqué le général Allen devant la commission des armées du Sénat le mois dernier. Dans 90% des cas, aucun tir n'a été rapporté, a-t-il assuré, ajoutant que peu de victimes civiles ont été recensées.

Les tensions n'ont jamais été si fortes entre Kabul et Washington qu'en 2012, en raison notamment de l'incinération d'exemplaires du Coran dans une prison sous contrôle américain ou encore du massacre de 17 civils par un soldat américain.

Après 10 ans de présence en Afghanistan, et malgré la présence de 130.000 hommes, l'Isaf, qui soutien l'armée et la police afghanes, n'a pu défaire l'insurrection antigouvernementale menée par les talibans.

La coalition de l'OTAN, qui redoute un enlisement coûteux, a décidé de retirer ses troupes combattantes du pays d'ici 2014. Quelque 15.000 soldats de l'Isaf devraient rester en Afghanistan après cette date.

Le Pentagone a qualifié l'accord d'avancée majeure». Le porte-parole du Pentagone George Little a notamment estimé que cet accord illustrait les progrès réalisés par les Afghans en matière de sécurité.