Après 65 jours sans nourriture, le détenu palestinien Khader Adnane risque la mort. Mais malgré l'avis des médecins, il poursuit sa grève de la faim pour protester contre sa détention sans inculpation. Sa cause a trouvé un écho chez les jeunes militants palestiniens, qui l'ont élevé au rang de symbole national.

Des affiches ont été créées représentant l'homme de 33 ans, dont la longue barbe brune et les lunettes rondes sont maintenant facilement reconnaissables. Sur certaines d'entre elles, un cadenas a remplacé la bouche. Dans les derniers jours, des milliers de Palestiniens ont participé à des manifestations dans la bande de Gaza et en Cisjordanie pour le soutenir. D'autres détenus ont eux aussi entamé une grève de la faim.

Khader Adnane, boulanger originaire de Jénine, a été arrêté le 17 décembre dernier par l'armée israélienne et placé en détention administrative. La procédure permet de détenir une personne sans procès ni inculpation pour une durée maximale de six mois, renouvelable, sur la base d'informations classées secrètes. Ni le détenu ni ses avocats n'ont accès à la preuve. Environ 300 Palestiniens seraient actuellement dans cette situation.

Khader Adnane a commencé sa grève de la faim au lendemain de son arrestation, recevant à l'occasion des infusions avec des minéraux. Il dénonce la détention administrative et affirme avoir été battu et humilié.

Militant islamiste

Le père de deux enfants a déjà été emprisonné, par Israël et par l'Autorité palestinienne, pour son militantisme. Il a été condamné pour avoir été porte-parole du Jihad islamique, un mouvement islamiste radical. Un porte-parole du premier ministre Benyamin Nétanyahou l'a qualifié de «terroriste dangereux». Mais sa famille insiste pour dire qu'il n'a jamais été impliqué dans des actes de violence. Et les groupes de défense des droits de la personne demandent à l'État d'agir: soit en l'inculpant, soit en le libérant.

Une cour militaire a confirmé la semaine dernière qu'il devait rester derrière les barreaux jusqu'au mois de mai. La Cour suprême d'Israël doit examiner aujourd'hui l'appel du détenu palestinien, devancé de deux jours en raison de la détérioration de son état de santé. Son avocat et des organisations de droits de la personne ont plaidé qu'il ne serait peut-être plus en vie ce jeudi.

Khader Adnane est en «danger de mort immédiat», selon le rapport d'un médecin de Physicians for Human Rights. Il ajoute qu'un «jeûne qui dépasse 70 jours ne permet pas la survie».

Si les grèves de la faim ne sont pas nouvelles dans les prisons israéliennes, celle-ci a battu un record de durée. Le Palestinien aurait répété à plusieurs reprises que son «honneur est plus précieux que la nourriture».

Le cas de Khader Adnane a été comparé à celui de Bobby Sands, membre de l'IRA mort après une grève de la faim de 66 jours au début des années 80 dans une prison d'Irlande du Nord. Sa mort avait provoqué des manifestations et des émeutes.