Religieux et laïcs, Israéliens juifs et arabes - plus de 150 000, selon les médias locaux - ont marché côte à côte samedi dans plusieurs villes israéliennes. Ce qu'ils demandent? Des logements abordables, une justice sociale, la fin des inégalités entre riches et pauvres. Le gouvernement israélien songe maintenant à des réformes.

Depuis plus de deux semaines, le visage du boulevard Rothschild, à Tel-Aviv, s'est transformé. Des centaines de tentes ont été érigées en son centre, sur un îlot de verdure traversé par une piste cyclable. Certains ont apporté fauteuils et chaises de plastique. D'autres ont installé des petites piscines gonflables.

Le phénomène n'est pas unique à un tronçon du chic boulevard, bordé de restaurants et de commerces. Dans d'autres secteurs de la métropole et dans plusieurs grandes villes israéliennes, des manifestants ont créé leur propre «village de tentes». Ils manifestent contre le coût élevé de la vie et exigent des changements politiques sur les questions sociales.

Le mouvement a commencé par l'invitation d'une jeune Tel-Avivienne sur Facebook. Avec une dizaine d'amis, Daphni Leef s'est installée sur le boulevard Rothschild, forcée de quitter son appartement et incapable de trouver un logis abordable.

Son appel a résonné dans tout le pays. Le mouvement a pris de l'ampleur. Les protestataires, en grande partie issus de la classe moyenne, exigent des loyers abordables, mais aussi une plus grande justice sociale et des réformes dans les systèmes d'éducation et de santé. Des groupes d'Arabes israéliens, qui, avec les Juifs ultra-orthodoxes, constituent une des franges les plus pauvres de la société, se sont aussi joints aux manifestations la semaine dernière. Un sondage publié par Haaretz montre que 87% des Israéliens soutiennent le mouvement populaire, qui se veut apolitique.

«J'imagine que le terreau était fertile pour recevoir ce genre de manifestation, à cause du contexte socio-économique, confie Yigal Rambam, l'un des organisateurs. L'écart entre les gens de la classe moyenne et les riches est tel que même avec un bon salaire, on a de la difficulté à arriver, parce que les loyers sont tellement élevés.»

Le revenu moyen net par ménage israélien était d'environ 3165$ par mois en 2009, selon le Bureau central des statistiques d'Israël. Le coût moyen mensuel d'un logement à Tel-Aviv était alors de 877$. Mais le prix des loyers dans la métropole aurait bondi dans les dernières années.

Devant l'ampleur des contestations, le premier ministre Benyamin Nétanyahou a annoncé hier qu'une équipe évaluerait des réformes dans le domaine économique. Les vacances de la Knesset pourraient aussi être repoussées.

Mais les manifestants rencontrés sur place se sont dits insatisfaits des réponses du gouvernement jusqu'à maintenant. Ce qu'ils veulent, ce sont des résultats concrets. Un appel à une grève d'une journée a été lancé pour aujourd'hui.

«Si les choses ne changent pas, la prochaine étape deviendra probablement plus violente. Maintenant, ça ressemble à Woodstock. Mais ensuite, ce sera la place Tahrir», croit Moshe Gant, un des protestataires de Tel-Aviv, en référence au mouvement de contestation égyptien.