Le chef radical chiite Moqtada Sadr a menacé samedi de réactiver l'Armée du Mahdi, sa puissante milice, et de renouer avec la lutte armée contre les forces américaines si celles-ci ne quittaient pas l'Irak, comme prévu, à la fin de l'année.

Moqtada Sadr, qui vit en Iran et dont la milice a plusieurs fois combattu les troupes américaines, a profité du huitième anniversaire de la chute du régime de Saddam Hussein pour adresser cet avertissement aux États-Unis, mais également aux dirigeants irakiens qui seraient tentés de solliciter une prolongation de la présence américaine.

Vendredi, au dernier jour d'une visite en Irak, le chef du Pentagone, Robert Gates, avait exhorté Bagdad à apporter au plus vite une réponse définitive à cette question.

«Si les Américains ne partent pas dans les temps, cela aura deux conséquences. Nous intensifierons la résistance et l'Armée du Mahdi reprendra ses activités», a déclaré Salah al-Obeidi, un porte-parole de Moqtada Sadr, lisant un de ses discours devant des dizaines de milliers de personnes rassemblées dans le nord-est de Bagdad.

L'armée américaine compte encore près de 50 000 militaires en Irak, qui devront avoir quitté le pays à la fin de l'année, conformément à un accord bilatéral.

«Nous attendons le retrait américain de toute la terre sainte irakienne, jusqu'au dernier soldat, jusqu'à la dernière base», a lancé M. Obeidi lors de ce grand rassemblement qui débordait de la place Moustansiriya sur la longue rue de Palestine.

«Dehors, dehors, l'Amérique», scandaient les manifestants en brandissant des drapeaux irakiens tandis que d'autres brûlaient une effigie de l'ancien président américain George W. Bush ou des drapeaux américains.

L'Armée du Mahdi, qui a plusieurs fois combattu les forces américaines, a un temps été considérée par le Pentagone comme la principale menace pour la stabilité de l'Irak.

Elle a compté jusqu'à 60 000 miliciens totalement dévoués à Moqtada Sadr qui, surfant sur la popularité de son père Mohammed Sadek Sadr assassiné par les forces de Saddam Hussein en 1999, a pris le flambeau de la «résistance» chiite à l'occupation américaine en 2003.

L'Armée du Mahdi a suspendu en 2008 ses activités armées et le courant sadriste, fortement soutenu par Téhéran, est devenu une force politique  incontournable qui compte plusieurs ministres.

Les forces américaines, qui ont achevé en août leur mission de combat, se concentrent sur la formation de la police et de l'armée irakiennes, démantelées en 2003 par la coalition.

Mais huit ans après la chute du régime, la situation est loin d'être stabilisée en Irak sur le plan de la sécurité. Le chef de l'état-major irakien, le général Babaker Zebari, a lui-même jugé le retrait américain prématuré, affirmant l'été dernier que son armée ne serait pas prête à remplir complètement sa mission avant 2020.

Vendredi, M. Gates a réaffirmé que l'armée américaine pouvait rester en Irak l'année prochaine. «Nous sommes ouverts à cette possibilité, mais ils vont devoir le demander et l'heure tourne», a-t-il déclaré.

Aucun dirigeant irakien ne s'est pour l'instant risqué à demander publiquement le maintien d'une présence américaine.

«Les seuls Irakiens qui soutiennent le maintien des Américains sont ceux qui bénéficient de cette occupation», a accusé samedi matin dans la foule le député sadriste Kamal al-Saïdi. «Mais si les Américains ne partent pas, la résistance pacifique cessera et la résistance armée reprendra dans tous les sens.»

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