Des centaines de partisans du premier ministre en exercice du Liban Saad Hariri ont manifesté lundi à travers le pays contre le Hezbollah, qu'ils accusent de mener un «coup d'État» en voulant imposer son candidat comme chef du gouvernement.

Les manifestants ont brûlé des pneus et bloqué plusieurs routes du pays dans la soirée, a déclaré à l'AFP un responsable des services de sécurité, et ont appelé à une «journée de colère» mardi.

L'armée et la police ont renforcé leurs effectifs dans plusieurs régions, a-t-il précisé.

Cet appel intervient après que Najib Mikati, candidat du Hezbollah à la primature, eut émergé comme favori pour être désigné comme futur chef du gouvernement, à la place de Saad Hariri.

«Après le coup d'État qui vise à permettre au Hezbollah d'exercer sa tutelle sur la République libanaise, (...) nous appelons les habitants de (...) tout le Liban à exprimer leur colère et leur refus de la tutelle perse à travers des manifestations populaires pacifiques», a annoncé à la presse Moustapha Allouche, membre du conseil politique de la formation de Saad Hariri (Courant du Futur).

«Le coup d'État du Hezbollah est une tentative de placer la présidence du conseil sous la tutelle du « wilayat al fakiq»», a-t-il ajouté, faisant allusion au système politique clérical en Iran, principal parrain du Hezbollah.

Un député du Courant du Futur, Mohammad Kabbara a appelé de son côté à «une journée de colère».

En fin d'après-midi, des manifestations hostiles au Hezbollah, à son chef Hassan Nasrallah et à Najib Mikati se sont multipliées, à Tripoli, la grande ville du Nord et fief sunnite, mais également à Saïda, berceau de la famille Hariri, à Beyrouth, ainsi que dans plusieurs régions à majorité sunnite.

M. Mikati, originaire de Tripoli, devrait remplacer Saad Hariri au poste de premier ministre du Liban après avoir obtenu lundi l'aval des députés du «Parti de Dieu» et de la plupart de ses alliés.

«Najib, dehors», «Hezbollah, Parti du diable», ont scandé près de 500 manifestants rassemblés sur la place principale de Tripoli. Certains ont également insulté le chef du Hezbollah Hassan Nasrallah, a constaté un correspondant de l'AFP.

«Par notre âme, par notre sang, nous nous sacrifions pour toi, ô Saad», «le sang des sunnites est en train de bouillir», hurlaient d'autres. Ils ont appelé à la reprise des manifestations et à la fermeture des commerces mardi. L'armée s'est déployée dans la zone.

Selon un complexe système de partage, le poste de premier ministre au Liban est réservé aux musulmans sunnites.

M. Hariri est considéré comme le leader sunnite le plus populaire du pays.

«Saad Hariri est le seul représentant de la communauté sunnite. Nous ne permettrons pas que Hassan Nasrallah ou autre nomme un premier ministre pour nous», a lancé aux manifestants Arslan Malas, un dignitaire sunnite.

«Nous appelons nos frères à Tripoli et dans le nord en général à faire preuve de sagesse et de patience», a réagi M. Mikati dans un communiqué publié lundi en fin d'après-midi.

Le gouvernement d'union de Saad Hariri s'est effondré le 12 janvier avec la démission des ministres du camp du Hezbollah en raison d'un bras de fer entre les deux camps au sujet du tribunal de l'ONU chargé d'enquêter sur l'assassinat en 2005 du dirigeant libanais Rafic Hariri, père de Saad, dans lequel le Hezbollah s'attend à être mis en cause.

Un rassemblement de jeunes partisans de Saad Hariri était prévu lundi soir près du mausolée de Rafic Hariri au centre-ville de Beyrouth.

La crise politique au Liban ravive le spectre des violences confessionnelles de mai 2008, quand des combats entre sunnites et chiites avaient fait une centaine de morts et mené le pays au bord de la guerre civile.