Paris et Washington ont affiché lundi «une convergence de vues totale» sur le dossier nucléaire iranien et sur la nécessité d'imposer des «sanctions fortes» à l'Iran, à l'occasion d'une visite à Paris du secrétaire américain à la Défense, Robert Gates.

Au cours d'un entretien, le président français Nicolas Sarkozy et le chef du Pentagone «sont convenus que le temps était à l'adoption de sanctions fortes, dans l'espoir d'une reprise du dialogue» avec Téhéran, a annoncé dans la soirée la présidence française à la presse.

Tous deux ont jugé que «malheureusement, le temps des sanctions» était arrivé pour l'Iran «car la main tendue n'avait pas été saisie», a-t-on précisé de même source.

Le ministre français de la Défense Hervé Morin avait plus tôt indiqué, à l'issue de discussions sur l'Iran avec son homologue américain, que leur «convergence de vues» était «totale».

«Il sera nécessaire malheureusement d'engager un dialogue avec la communauté internationale qui mènera à de nouvelles sanctions si l'Iran ne cesse pas ses programmes» d'enrichissement d'uranium, avait ajouté M. Morin. Il n'y a «pas d'autre choix que de travailler à d'autres mesures» au sein du Conseil de sécurité de l'ONU, avait-il insisté.

«Nous sommes entièrement d'accord pour dire qu'une action de la communauté internationale est la prochaine étape», avait renchéri M. Gates au cours d'une conférence de presse commune avec son homologue français.

Ce durcissement de concert intervient après que l'Iran a officiellement notifié lundi à l'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA) sa décision de commencer à enrichir de l'uranium à 20% malgré les pressions internationales. Téhéran s'est néanmoins déclaré prêt à arrêter ce processus s'il obtenait des grandes puissances le combustible nucléaire qu'il réclame.

Le directeur de l'AIEA, Yukiya Amano, s'est déclaré lundi «inquiet» de la décision iranienne.

De son côté la Russie a haussé le ton en déclarant que l'Iran devait envoyer son uranium à l'étranger pour l'enrichir à 20%, et non le faire lui-même.

«Nous partons toujours du principe que la solution passe par la mise en oeuvre par l'Iran de l'accord de Genève d'octobre qui prévoit l'envoi à l'étranger pour enrichissement supplémentaire du combustible destiné au réacteur de recherche de Téhéran», a commenté le ministère russe des Affaires étrangères, cité par l'agence Interfax.

«Nous ne pouvons pas appliquer autre chose hélas ! que des sanctions puisque la négociation n'est pas possible», a estimé lundi le chef de la diplomatie française, Bernard Kouchner, tout en jugeant que les Iraniens «ne sav(ai)ent pas fabriquer du combustible» pour leur réacteur nucléaire de recherche à partir d'uranium enrichi à 20%.

M. Kouchner a reconnu que la France ne disposait pas actuellement à l'ONU de voix suffisantes pour faire adopter une nouvelle résolution pendant sa présidence en février du Conseil de sécurité de l'ONU. «Il faut neuf voix positives, nous ne sommes pas sûrs de les avoir maintenant».

«Nous n'avons pas encore convaincu les Chinois», a reconnu le ministre, qui avait reçu longuement la semaine dernière à Paris son homologue chinois, Yang Jiechi.

Favorable à une poursuite du dialogue avec l'Iran, la Chine n'avait pas encore réagi à l'annonce de Téhéran, poussant les États-Unis à craindre un blocage, d'autant que leurs relations avec Pékin se sont refroidies après une vente d'armes américaines à Taïwan.

La communauté internationale, en particulier les pays occidentaux, craignent que l'Iran ne cherche à constituer un arsenal nucléaire, pour lequel de l'uranium enrichi à 90% est nécessaire, ce que Téhéran a toujours démenti.