Le président afghan Hamid Karzaï, candidat à sa succession, s'est posé samedi en rassembleur, appelant «tous les Afghans», dont ses «frères talibans», à voter aux élections présidentielle et provinciales du 20 août plutôt que de tenter de les empêcher par la violence.

«J'appelle tous les Afghans (...) à prendre part à ces élections et à ainsi rendre service à ce pays», a déclaré le président sortant et favori du scrutin présidentiel au cours d'une conférence de presse à Kaboul.

Il s'est en particulier adressé à ses «frères talibans et à tous les autres Afghans», qu'ils soient à l'étranger ou dans «l'opposition», y compris «armée».

«Je leur demande de revenir dans leur pays, qu'ils prennent des cartes d'électeur (...) et prennent part au vote», quel que soit leur choix, a ajouté M. Karzaï.

Il faisait notamment allusion aux rebelles basés au Pakistan, où beaucoup de talibans - y compris leur insaisissable chef, le mollah Mohammad Omar, selon certaines sources - ont fui et établi leurs bases arrière après le renversement de leur régime en novembre 2001 par une coalition internationale dirigée par les États-Unis, qui soutient aujourd'hui le gouvernement de Kaboul.

«Je leur demande encore et encore de renoncer à la violence, pas seulement pour le jour des élections mais pour toujours, de cesser de sacrifier le peuple afghan» et d'aider le pays «à réunir les conditions favorables à des élections», a dit le président afghan.

Le scrutin apportera «plus de stabilité, plus de paix et plus de développement» au pays, a-t-il estimé.

En Italie, les ministres des Affaires étrangères du G8 ont appuyé l'appel lancé aux talibans, souhaitant un scrutin «légitime pour le peuple afghan».

Cité par l'agence afghane AIP, un porte-parole des talibans, Zabihullah Mujahid, a rejeté la proposition présidentielle, estimant que le résultat de l'élection était déterminé à l'avance à Washington.

«Nous ne prendrons pas part à l'élection et appelons aussi la population à ne pas voter», a-t-il dit, cité par AIP.

Elu en 2004 à l'issue de la première présidentielle au suffrage universel de l'histoire afghane, M. Karzaï est donné favori pour la seconde, dans un pays ravagé par des décennies de guerre et secoué par une insurrection islamiste.

Les violences ont redoublé depuis deux ans et atteint ces dernières semaines des records absolus depuis la chute des talibans, faisant craindre des attaques contre des bureaux de vote ou des intimidations contre les électeurs, en particulier dans les bastions rebelles du Sud. Plusieurs candidats aux provinciales ont déjà été tués.

Le président sortant a appelé les candidats à promouvoir l'unité nationale en évitant de nourrir les tensions. «Lorsque le vainqueur sera annoncé, (...) nous devrons vivre ensemble et nous asseoir à la même table», a-t-il souligné.

Il a également mis en garde contre toute «ingérence» étrangère, tout en veillant à rassurer les États-Unis et ses autres alliés internationaux.

«Tout futur gouvernement (...) poursuivra sa coopération avec eux (les alliés) dans la guerre contre le terrorisme. Par conséquent, personne ne devrait avoir de raison de s'ingérer dans les affaires afghanes», a-t-il dit.

Les États-Unis et leurs alliés déployés en Afghanistan ont fait venir des dizaines de milliers de soldats en renfort pour assurer le bon déroulement des élections, qu'ils financent intégralement à hauteur de 220 millions de dollars avec l'ONU.

Les forces de sécurité afghanes et internationales ont récemment multiplié les opérations contre-insurrectionnelles, notamment dans le sud, pour tenter de pacifier les régions instables en vue du scrutin.