Le Pakistan a intensifié lundi son offensive dans le nord-ouest contre les talibans alliés à Al-Qaeda, après avoir annoncé qu'elle serait désormais généralisée et ne s'arrêterait qu'avec l'«élimination» des combattants islamistes.

L'opération militaire, lancée fin avril, était jusqu'alors cantonnée à la vallée de Swat et ses environs.

L'armée a bombardé ce week-end le Waziristan du Sud, Mohmand et Bajaur, trois districts des zones tribales semi-autonomes frontalières de l'Afghanistan, où les États-Unis considèrent qu'Al-Qaeda a reconstitué ses forces et les talibans afghans des bases arrières, soutenus par les talibans pakistanais.

Les militaires pakistanais affirment y avoir tué au moins une soixantaine de rebelles en deux jours, un bilan impossible à vérifier de source indépendante.

Dans le district tribal du Waziristan du Nord, les habitants de villages réputés sous influence talibane commençaient lundi à quitter les lieux pour gagner des endroits plus sûrs, achetant des tentes et faisant des stocks de nourriture, ont indiqué plusieurs d'entre eux à l'AFP.

Le gouvernement a «lancé une opération tous azimuts dans les zones tribales», y compris le Waziristan, a déclaré dimanche soir Owaïs Ahmad Ghani, gouverneur de la Province de la Frontière du Nord-ouest.

«Les opérations se poursuivront jusqu'à l'élimination des combattants», a-t-il assuré.

Les autorités pakistanaises n'ont pas fait mystère de leur objectif: «Baïtullah Mehsud», chef du Mouvement des talibans du Pakistan (Tehreek-e-Taliban Pakistan, TTP), «et ses partisans», selon le gouverneur.

L'armée pakistanaise est déjà engagée depuis la fin avril dans une offensive contre les talibans dans la région de Swat, plus au nord, à laquelle les rebelles ont répondu par de multiples attentats. Plusieurs de ces attaques ont été revendiquées par le TTP, basé au Waziristan du Sud.

Le chef de l'état-major des forces armées, le général Ashfaq Kayani, accompagné par le chef de l'armée de l'air, le maréchal Rao Qamar Suleman, a fait lundi une tournée dans le nord-ouest. Il a souligné que l'offensive dans la région de Swat avait été «décidée en dernière option, après avoir tenté plusieurs options pacifiques», selon un communiqué de l'armée.

Le général Kayani «a déclaré que le Pakistan était notre patrie et que nous devions tous la défendre quel qu'en soit le coût», indique le communiqué.

La nouvelle offensive dans les zones tribales a reçu le soutien des États-Unis, premier bailleur de fonds du Pakistan.

Washington s'inquiète de la progression des talibans depuis deux ans, et de ses conséquences tant au Pakistan, dont ils menacent la stabilité, qu'en Afghanistan, par leur soutien aux rebelles qui y attaquent les troupes afghanes et américaines.

Dès vendredi, à Washington, un haut responsable américain avait annoncé que l'armée pakistanaise préparait «une campagne dans le sud du Waziristan».

La semaine dernière, le directeur de la CIA, Leon Panetta, avait déclaré que les troupes américaines comptaient elles aussi exercer une pression plus forte sur les islamistes côté afghan, où elles sont déployées, pour priver les rebelles de toute porte de sortie.

Alors que les autorités pakistanaises mettent l'accent sur Baïtullah Mehsud, la cible prioritaire américaine s'appelle toujours Oussama ben Laden, qui «se trouve toujours au Pakistan», selon M. Panetta, cité par les médias américains.

Islamabad a régulièrement lancé ces dernières années des offensives anti-talibans contre les zones tribales, traditionnel foyer d'instabilité.

La dernière, l'une des plus importantes et meurtrières jamais menées dans le pays, a duré près de six mois à Bajaur, entre août et février dernier.

Ces offensives ont souvent été suivies par des accords de paix, qui ont échoué. En 2006, les autorités pakistanaises avaient ainsi signé un cessez-le-feu avec Baïtullah Mehsud, avant d'y mettre fin en juillet 2007, devant la progression des talibans et de leurs alliés hors des zones tribales.