La police israélienne craignait mardi une «vendetta» suivie d'un regain de la guerre des gangs après l'assassinat à la bombe la veille à Tel Aviv d'un puissant parrain de la mafia locale.

La police, qui maintient «une chape de plomb» sur son enquête, s'est déployée en force au cimetière de Raanana (nord de Tel-Aviv) pour les funérailles de Yaacov Alperon, auxquelles des centaines de personnes ont assisté, notamment son fils Dror, relâché de prison pour l'occasion.

«Nous voulons empêcher des liquidations comme celle de lundi, que nous considérons comme très grave, car elles mettraient en péril des innocents», a affirmé à l'AFP le porte-parole de la police Micky Rosenfeld.

Le Premier ministre Ehud Olmert a pour sa part affirmé à la radio publique qu'il allait étudier avec la police «les moyens de durcir la guerre contre le crime organisé». «Actuellement, les moyens dont disposent les force de l'ordre ne sont pas à la hauteur du défi», a déploré M. Olmert.

«Depuis fin 2006, notre objectif numéro un est d'en finir avec le crime organisé, et nous avons créé à cet effet l'unité 443», a pour sa part souligné Micky Rosenfeld en se félicitant de nombreux coups de filets réussis.

Cette unité se divise en plusieurs départements: surveillance électronique, agents du renseignement, enquêtes, et surtout une unité opérationnelle comptant un millier d'hommes «sur le terrain 24 heures sur 24».

Lointaine réminiscence du Chicago des années folles, une dizaine d'Israéliens ont été tués ou blessés notamment à Tel-Aviv, Netanya et Bat Yam, lors de règlements de compte.

Depuis juillet, au moins cinq attaques à la bombe ou à l'arme automatique visant des grandes figures du milieu ont été signalées en Israël.

«Les attentats terroristes de la pègre continuent de frapper en plein jour au coeur de nos villes, et c'est un constat d'échec pour le ministre de la Sécurité intérieure Avi Dichter», un ex-chef du Shin Beth (service intérieur de sécurité) écrit dans son éditorial le quotidien Maariv.

Son confrère, le Haaretz, évoque pour sa part «un échec colossal», tandis que le Yédiot Aharonot à gros tirage souligne qu'«il n'y a plus un seul lieu sûr en Israël».

Selon son avocat Shaï Nudel, Alperon était «un père de famille exemplaire» dévoué à ses sept enfants et à son épouse Ahouva, docteur en naturopathie.

Le défunt parrain avait échappé à neuf tentatives d'assassinat, notamment à un «contrat» en 2005 exécuté par quatre tueurs à gage venus du Bélarus.

«Il est miraculeux qu'il ait réussi à survivre jusqu'à l'âge de 54 ans», estime le député Yitzhak Aharonovitch, ancien commandant adjoint de la police.

Plusieurs familles mafieuses, notamment les Abergel, les Aboutboul, les Mulner, les Kedoshim et les Ohana sont considérées comme rivales directes des Alperon, et certains de leurs membres ont été convoqués pour interrogatoire, a indiqué un responsable de la police.

Extorsions de fonds, usure, blanchiment d'argent, recyclage des bouteilles en plastique, prostitution, trafic de stupéfiants, vols de voitures, jeux illégaux: les intérêts sont loin d'être convergents dans le milieu.

Selon les médias israéliens, les clans rivaux disposent chacun d'une main d'oeuvre nombreuse, souvent formée au sein des unités d'élite de l'armée, extrêmement bien organisée, équipée et entraînée.

Interrogé par l'AFP, l'avocat Menahem Rubinstein, un expert du crime organisé, explique que la police est confrontée à de grandes difficultés face aux familles mafieuses «car elles ont des ramifications à l'étranger et ont réussi à infiltrer le monde des affaires légales, voire la classe politique».

Ainsi, certains des membres de la famille Alperon, dont le frère aîné du défunt, Moussa, sont liés au Comité central du Likoud (droite) de Benjamin Netanyahu. Moussa assistait à la dernière réunion du Comité central cette semaine.