(Kyiv) L’Ukraine a fait état dimanche de combats intenses sur le front Est avec les forces russes, Vladimir Poutine affirmant pour sa part que la contre-offensive de l’armée ukrainienne, lancée en juin, était mise en échec.

Le président russe n’a par ailleurs toujours pas annoncé si Moscou acceptait de reconduire l’accord qui expire lundi soir sur les exportations via la mer Noire des céréales ukrainiennes, d’une importance cruciale pour les marchés mondiaux et notamment les pays d’Afrique et du Moyen-Orient.  

L’état-major ukrainien a indiqué dimanche que l’armée « continuait de mener une action offensive dans les zones de Melitopol et Berdiansk » dans le sud-est, où elle cherche à avancer vers la mer d’Azov pour couper les lignes russes et isoler la Crimée.

Dans l’est, plus au nord, « la situation s’est quelque peu intensifée », en raison des efforts des forces russes pour contre-attaquer dans plusieurs zones, où l’armée ukrainienne se retrouve en position « défensive », a de son côté indiqué la vice-ministre ukrainienne de la Défense Ganna Malyar.

« Pendant deux jours d’affilée, l’ennemi a attaqué activement dans le secteur de Koupiansk, dans la région de Kharkiv », a-t-elle déclaré dimanche. « De féroces combats ont lieu, et des positions […] changent plusieurs fois par jour ».

Kyiv a admis livrer des batailles difficiles et a appelé ses alliés à fournir plus d’armes et d’artillerie à longue portée.

Mais la vice-ministre a fait valoir que les forces ukrainiennes « avançaient progressivement » près de Bakhmout, une petite ville tombée sous contrôle russe en mai après des mois affrontements meurtriers.

Les soldats ukrainiens avancent au sud de Bakhmout, et s’efforcent de tenir les positions gagnées au nord de la ville, a-t-elle ajouté.

Encercler Bakhmout

Sur le front dans cette zone, un commandant du bataillon d’artillerie de la 22e brigade mécanisée ukrainienne a dit à l’AFP être satisfait de la contre-offensive, mais a confié que chaque mètre de terrain était gagné au prix de lourds combats.

« Chaque jour où nous gagnons 10, 20, 100 mètres, c’est déjà une grande victoire », a dit ce commandant s’identifiant sous le nom de guerre « Boulat ».

« Nous encerclons Bakhmout, en chassant (les Russes) de Klychtchivka », un village situé au sud de la ville, a dit de son côté « Volyna », le commandant d’une batterie d’artillerie.

Bakhmout, qui comptait 70 000 habitants avant la guerre et était connue pour ses mines de sel et ses vins pétillants, a été pratiquement détruite par des mois de bombardements russes.

« Dans Bakhmout même, nous bombardons l’ennemi, et l’ennemi nous bombarde », a dit la vice-ministre Ganna Malyar.

Dans le sud-est, l’armée ukrainienne avait annoncé vendredi avoir encore avancé de près de deux kilomètres en une semaine en direction de Melitopol, une ville occupée par les Russes peu après le début de leur offensive en février 2022.

« Les gens devraient comprendre le prix que nous payons. Les ennemis sont nombreux. Nous avons besoin de temps pour les broyer », a dit « Boulat » à l’AFP.

Poutine optimiste

Dans une interview à la chaîne de télévision Rossia-1 diffusée dimanche, Vladimir Poutine a affirmé que la contre-offensive ukrainienne n’enregistrait aucun progrès.

« Toutes les tentatives de l’ennemi de percer notre défense […], ont échoué depuis le début de l’offensive. L’ennemi n’a pas obtenu de succès », a assuré le président russe.

PHOTO ALEXEY BABUSHKIN, SPUTNIK VIA ARCHIVES AGENCE FRANCE-PRESSE

S’exprimant dans une interview à la chaîne de télévision Rossia-1, diffusée dimanche, le président russe Vladimir Poutine a jugé que la situation était « positive » pour les forces russes sur le front.

« Nos troupes se conduisent de façon héroïque. De manière inattendue pour l’adversaire, elles passent même à l’offensive dans certains secteurs et capturent des positions plus avantageuses », a-t-il assuré.  

Menée depuis juin avec le soutien d’armes lourdes livrées par l’Occident, la contre-offensive ukrainienne progresse lentement face aux troupes russes qui ont le temps d’établir de solides défenses, notamment de redoutables champs de mines, et disposent toujours d’une importante puissance de feu pour pilonner les forces ukrainiennes.

Mardi, l’armée russe avait affirmé avoir avancé de 1,5 kilomètre dans une des zones du front Est, près de Lyman.

Elle a par ailleurs annoncé dimanche avoir neutralisé au moins dix drones ukrainiens, près de Sébastopol en Crimée, le quartier général de la flotte russe en mer Noire régulièrement ciblé par ce type d’attaques.

La circulation interrompue sur un important pont de Crimée

Un incident s’est produit sur un important pont reliant la Crimée à la région russe de Krasnodar et la circulation y a été interrompue, a fait savoir dans la nuit de dimanche à lundi le gouverneur russe de la péninsule annexée de Crimée.

« La circulation a été interrompue sur le pont de Crimée. Une urgence s’est produite dans la zone du 145e pilier depuis le territoire de Krasnodar », situé dans le sud-ouest de la Russie, a indiqué Sergueï Aksionov sur Telegram, sans préciser la nature de l’incident.

« Les forces de l’ordre et tous les services compétents sont à pied d’œuvre », a-t-il ajouté, demandant aux automobilistes de choisir un itinéraire alternatif.

Un centre de coordination a été mis en place au sein d’un ministère de Crimée, a rapporté l’agence russe d’État TASS, citant les autorités locales.

La Crimée, péninsule annexée par Moscou en 2014, sert de base arrière aux forces russes, notamment pour l’envoi de renforts et la maintenance d’équipements. Les quelques ponts reliant la péninsule au sud occupée de l’Ukraine sont essentiels à la conduite des opérations militaires de Moscou.

L’accord céréalier expire

Alors que l’accord sur les céréales ukrainiennes expire lundi, Vladimir Poutine n’a pas encore dit si la Russie acceptait de le reconduire.

Le président russe avait eu samedi un entretien téléphonique avec son homologue sud-africain Cyril Ramaphosa à ce sujet.  

« Vladimir Poutine a souligné que les obligations fixées dans le mémorandum Russie-ONU sur la levée des obstacles pour l’exportation des produits alimentaires et engrais russes ne sont toujours pas remplies », a indiqué le Kremlin.

« Le principal objectif de l’accord, la livraison de céréales aux pays dans le besoin, notamment sur le continent africain, n’est pas réalisé », a en outre affirmé la présidence russe dans un communiqué.

Vendredi, le président turc Recep Tayyip Erdogan, médiateur entre Kyiv et Moscou, avait assuré que M. Poutine était « d’accord » pour prolonger cet accord vital sur les céréales ukrainiennes. Mais le Kremlin avait nié avoir fait toute déclaration à ce sujet.

Signé en juillet 2022 à Istanbul et déjà reconduit à deux reprises, l’accord expire lundi soir à minuit à Istanbul (17 h heure de l’Est). Il a permis sur l’année écoulée de sortir près de 33 millions de tonnes de céréales des ports ukrainiens en dépit du conflit.