(Moscou) Au moins 11 personnes sont mortes samedi et 15 autres ont été blessées lors d’une fusillade sur un terrain militaire russe dans la région de Belgorod, frontalière de l’Ukraine, a indiqué le ministère russe de la Défense, qui a dénoncé un « attentat ».

Cette fusillade intervient en pleine mobilisation militaire en Russie, décrétée le 21 septembre après des revers de l’armée russe sur le front ukrainien, et alors que les bombardements venus d’Ukraine se sont multipliés ces derniers jours sur la région de Belgorod.

« Le 15 octobre, sur un terrain d’entraînement du district militaire Ouest, dans la région de Belgorod, deux citoyens originaires d’un pays de la CEI ont commis un attentat », a indiqué le ministère russe de la Défense, en référence à la Communauté des États Indépendants, une alliance de plusieurs ex-républiques soviétiques.

« Lors de la conduite d’un entrainement au tir avec des personnes s’étant portées volontaires pour prendre part à l’opération militaire spéciale (en Ukraine), les terroristes ont ouvert le feu avec des armes automatiques sur les membres de l’unité », poursuit le ministère.

« Lors de la fusillade, 11 personnes ont été mortellement blessées. Quinze autres ont reçu des blessures de gravité diverses et ont été conduites dans des établissements de santé où elles reçoivent les soins nécessaires ».  

Selon le ministère, « les deux terroristes ont été abattus lors d’un tir de riposte ». Il n’a pas donné plus de précisions sur l’identité des victimes et des auteurs de la fusillade.

Le 21 septembre, le président russe Vladimir Poutine a ordonné une mobilisation militaire « partielle » en Russie pour envoyer des soldats combattre en Ukraine, alors que l’armée russe était en difficulté face à d’importantes contre-offensives ukrainiennes.  

PHOTO VALERY SHARIFULIN, SPUTNIK VIA AGENCE FRANCE-PRESSE

Le président russe Vladimir Poutine

Début octobre, le ministre russe de la Défense, Sergueï Choïgou, a affirmé que plus de 200 000 personnes avaient été mobilisées en Russie depuis cette annonce. Des dizaines de milliers d’autres ont fui le pays pour éviter un enrôlement forcé.

Région sous tension

Ces derniers jours, la tension est forte dans la région de Belgorod. Les autorités ont signalé quasiment quotidiennement des tirs venus d’Ukraine.

Samedi, le gouverneur local a annoncé une frappe sur un dépôt de pétrole près de Belgorod, capitale de la région éponyme. La vieille, c’est une centrale électrique qui avait été touchée, entraînant une panne de courant.

Cette fusillade sur un terrain militaire intervient aussi alors que le pouvoir russe a mis en garde cette semaine sur des risques « d’attaques terroristes » ukrainiennes.

Les services de sécurité russes (FSB) ont indiqué mercredi avoir arrêté huit personnes suspectées de participation à l’attaque à l’explosif qui a touché le 8 octobre le pont de Crimée, tout en assurant avoir déjoué deux projets d’attentats également imputés à Kyiv.

Ces dernières années, des incidents armés ont déjà eu lieu dans des casernes du pays, sur fond de bizutages, un problème qui mine depuis longtemps l’armée russe.

Ces bizutages, parfois très violents, sont régulièrement la cause de suicides ou de meurtres.

En novembre 2020, un conscrit de 20 ans servant sur une base aérienne près de Voronej (ouest) avait tué à la hache un officier, s’était emparé de son arme de service pour tuer deux autres militaires.  

En octobre 2019, un jeune homme de 19 ans avait lui ouvert le feu alors qu’il prenait son tour de garde dans sa base militaire de Sibérie, tuant huit camarades dont deux officiers.

Quelques semaines plus tard, il avait décrit dans une lettre son « enfer » et expliqué qu’il subissait des sévices réguliers.

Situation la « plus difficile » près de Bakhmout

PHOTO SERVICE DE PRESSE DE LA PRÉSIDENCE UKRAINIENNE, AGENCE FRANCE-PRESSE

Le président ukrainien Volodymyr Zelensky

Le président ukrainien Volodymyr Zelensky a déclaré samedi que la situation sur le terrain militaire était actuellement la « plus difficile » près de Bakhmout, dans l’est de l’Ukraine, quelques jours après que les forces prorusses ont annoncé qu’elles se rapprochaient de cette ville.

« Une situation très grave persiste dans les régions de Donetsk et de Louhansk », dans le bassin industriel Donbass, a déclaré M. Zelensky dans son message quotidien.

« Le plus difficile est près de Bakhmout, comme les jours précédents. Nous tenons toujours nos positions », a-t-il ajouté.

Les forces séparatistes soutenues par la Russie dans la région ukrainienne de Donetsk ont déclaré jeudi avoir pris deux villages voisins, Opytine et Ivangrad.

Depuis des semaines, les troupes russes pilonnent Bakhmout, une cité qui comptait naguère 70 000 habitants, dans l’espoir de s’en emparer.

À une quinzaine de kilomètres de Bakhmout, à Tchassiv Yar, des journalistes de l’AFP ont parlé à un soldat tout juste de retour de la ligne de front dans cette région.

« Pendant des jours, je n’ai pas dormi, je n’ai pas mangé, je n’ai pas bu, sauf du café », a raconté ce soldat de 50 ans de la 93e brigade, surnommé « Poliak ».

« Sur les 13 gars de mon groupe, nous avons perdu deux soldats et cinq ont été évacués », a poursuivi ce militaire, légèrement blessé par des éclats d’obus et qui montre des signes d’épuisement.

« C’est notre vie maintenant, nous ferons tout pour notre pays », a-t-il encore dit, presque au bord des larmes.

Depuis des semaines, les troupes ukrainiennes récupèrent de larges pans de territoires dans le sud et l’est de l’Ukraine.